Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Delphine Batho
Question N° 110111 au Ministère de la Justice


Question soumise le 31 mai 2011

Mme Delphine Batho alerte M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur la situation alarmante des établissements pour mineurs (EPM). Plusieurs EPM ont connu récemment des incidents violents. Des violences se sont produites pendant plusieurs jours à l'EPM de Lavaur. Précédemment, une surveillante a été agressée à l'EPM de Marseille, tandis qu'une éducatrice a été prise en otage à l'EPM de Meyzieu. Ces violences répétées témoignent d'une situation préoccupante. Alors qu'elle avait déjà demandé une remise à plat du projet et du fonctionnement des EPM après de graves incidents début 2008, le Gouvernement avait indiqué que des ajustements logistiques et organisationnels seraient mis en oeuvre. Pourtant, ces établissements semblent toujours souffrir de défauts de conception quant à leur doctrine, à l'animation de leur direction, et au contenu des activités malheureusement plus occupationnelles qu'éducatives auxquelles sont astreints les détenus mineurs. En outre les personnels qui y travaillent soulignent les erreurs de conception architecturales de ces établissements organisés autour d'une cour centrale, l'ensemble des détenus ayant ainsi connaissance du moindre incident. Enfin le contrôleur général des lieux privatifs de liberté a indiqué que les trajectoires des mineurs incarcérés étaient incohérentes, puisqu'ils peuvent être successivement placés en centre éducatif fermé, puis en EPM et réciproquement, sans que la mise en oeuvre de la sanction trouve son sens et sa cohérence. C'est pourquoi, alors que la lutte contre la délinquance et la récidive des mineurs devrait être une priorité nationale absolue, elle lui demande de bien vouloir indiquer s'il compte prendre des mesures d'urgence pour remédier aux défauts de conception des EPM et si le Gouvernement a l'intention de revoir la doctrine de fonctionnement ainsi que les conditions matérielles d'organisation de ces établissements.

Réponse émise le 30 août 2011

Depuis la loi du 9 septembre 2002, d'importants moyens ont été mis en oeuvre pour améliorer la prise en charge des mineurs détenus : l'intervention continue des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse en quartiers mineurs (QM) est assurée, et six établissements pénitentiaires pour mineurs ont été mis en service (EPM). Le dispositif des EPM répond aux exigences posées par les normes internationales et européennes, soit, pour les mineurs détenus, la séparation stricte des majeurs, l'encellulement individuel de nuit, l'accompagnement éducatif constant et l'accès à l'enseignement, à la santé, aux activités socio-éducatives, culturelles et sportives. L'objectif des EPM est d'éviter que la détention ne devienne un facteur de maintien voire d'aggravation de la délinquance en assurant une prise en charge éducative permettant notamment de mieux appréhender la situation du mineur et de préparer sa sortie. Ce dispositif s'appuie sur l'articulation et l'engagement de quatre acteurs institutionnels, qui s'inscrivent au coeur de la prise en charge des mineurs incarcérés : la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), l'administration pénitentiaire (AP), l'éducation nationale (EN) et la santé. Les personnels de ces administrations participent, chacun dans leur champ de compétences, à cette nécessaire pluridisciplinarité dont l'illustration la plus aboutie est le concept du binôme éducateur-surveillant. Le fonctionnement de ce binôme entraîne des ajustements et une appropriation de pratiques professionnelles spécifiques, liées entre autres à l'interdépendance des personnels. La mise en oeuvre de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 ainsi que les incidents survenus au cours de ces derniers mois et les évolutions de la prise en charge des mineurs conduisent la direction de l'administration pénitentiaire (DAP) et la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) à actualiser la circulaire relative au régime de détention des mineurs du 8 juin 2007. Ces évolutions doivent trouver leur traduction opérationnelle au sein du guide méthodologique relatif à la prise en charge des mineurs en EPM en cours d'actualisation dans le cadre d'un groupe de travail composé essentiellement d'acteurs opérationnels permettant de prendre en compte l'expérience acquise au cours des quatre premières années de fonctionnement des EPM. La situation des professionnels en EPM fait l'objet d'une attention particulière de la DAP et de la DPJJ. Une inspection conjointe, menée courant 2010 sur les violences en EPM, a donné lieu à un rapport remis en novembre 2010, qui relève : une usure professionnelle de certains agents liée à la pénibilité du travail auprès de mineurs détenus ; une baisse globale des violences commises par des mineurs à l'encontre des personnels dans les EPM (- 13,9 % du nombre des violences sur les personnels entre 2009 et 2010). La DAP et la DPJJ engagent une refonte des contenus de formation pour les agents affectés en EPM pour faciliter l'intégration, la cohésion, l'acceptation d'une culture professionnelle différente. De nouvelles sessions de formation sont prévues dès le mois de septembre 2011. Le plan architectural des EPM est conçu en trois zones : hors enceinte, hors détention et en détention. Dans le cadre de la détention, la zone est structurée en quatre pôles : le pôle unités d'hébergement, le pôle activités d'enseignement et socio-éducatif, le pôle santé et le pôle sportif. Cette configuration des lieux induit une organisation spécifique de la prise en charge des mineurs. Les difficultés rencontrées par certains EPM ont été à l'origine d'adaptations pose de « caillebottis » aux fenêtres des cellules, installation de grilles de circulation autour de la cour centrale. Les EPM assurent la prise en charge de mineurs particulièrement « difficiles » qui sont à la toute fin de la chaine pénale et de la prise en charge éducative. Ils sont en effet, dans leur grande majorité, inscrits dans un parcours de délinquance marqué par la réitération ou la récidive, et ont très souvent bénéficié de multiples modalités de prise en charge éducative. Les professionnels composent donc avec des adolescents qui ont une forte tendance au passage à l'acte et qui nécessitent, en réponse, une attitude contenante marquée. Les Centre éducatifs fermés (CEF) et les EPM sont les structures les mieux équipées pour assurer la prise en charge des ces mineurs. Dans l'exercice de sa mission d'aide à la décision des magistrats, la protection judiciaire de la jeunesse contribue à l'amélioration de l'individualisation de la justice des mineurs. En 2002, 825 mineurs étaient détenus en moyenne en France, contre 703 en 2010. Cette diminution tend à démontrer l'efficience du dispositif de prise en charge de la protection judiciaire de la jeunesse en alternative à l'incarcération.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion