M. Hervé Féron attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur le laboratoire Servier. Selon un grand quotidien national, les chercheurs des laboratoires Servier étudiaient, depuis le début des années 1990, les composés produits dans l'organisme par le Mediator. Parmi eux, la norfenfluramine, identifiée en 1995 comme responsable de la toxicité de coupe-faim de Servier, l'isoméride et le ponderal, tous deux interdits en 1999. Or une étude démontre dès 1995 que la prise d'isoméride et de ponderal entraîne des effets secondaires graves : une hypertension artérielle pulmonaire, responsable d'insuffisances cardiaques. Le laboratoire Servier ne pouvait donc ignorer, au moins depuis 1995, que le Mediator pouvait être suspecté de produire lui aussi des effets secondaires graves. Au lieu de quoi, il a toujours affirmé que le Mediator avait des "activités pharmacologiques radicalement différentes" de celles de l'isoméride et du pondéral et que sa tolérance cardiovasculaire était "satisfaisante". Il lui demande quelle a été sa réaction à la lecture de cette information.
L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) a, par plusieurs décisions en date du 24 novembre 2009, suspendu les autorisations de mise sur le marché de l'ensemble des spécialités contenant du benfluorex, qui ne sont plus disponibles depuis le 30 novembre 2009. En France, trois spécialités disposaient d'une autorisation de mise sur le marché : Mediator (R) 150 mg, commercialisé par les laboratoires Servier depuis 1976, et deux médicaments génériques mis sur le marché par les laboratoires Mylan et Qualimed. À cet égard, il doit être précisé que les spécialités contenant du benfluorex ont fait l'objet d'une surveillance depuis 1998, consécutivement au retrait de l'Isoméride et du Pondéral en 1997, du fait d'une augmentation du risque d'hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). Ce suivi a notamment conduit l'agence en 1998 à ne pas accorder au laboratoire Servier une nouvelle indication thérapeutique pour le Mediator (R) dans le diabète de type 2 en première ligne de traitement. En outre, afin d'éviter que le benfluorex ne puisse être utilisé comme coupe-faim en lieu et place de l'Isoméride et du Pondéral après leur retrait, l'utilisation dans les préparations magistrales a été interdite dès 1996. Par ailleurs, une enquête officielle de pharmacovigilance qui avait été confiée en 1998 au CRPV de Besançon afin d'évaluer le risque d'HATP lié à l'utilisation du benfluorex, n'avait pas permis à cette époque d'identifier ce risque spécifique, compte tenu des très rares observations recensées. Par la suite, une surveillance active a conduit notamment, en 2005, à renforcer les informations sur ses effets neuropsychiatriques. En 2007, une nouvelle évaluation a entraîné la suppression de son indication aux personnes présentant une hypertriglycéridémie (taux élevé de graisse dans le sang). Depuis, les médicaments contenant du benfluorex étaient uniquement indiqués chez les patients diabétiques en surcharge pondérale, en complément d'un régime adapté. Dans un premier temps, les quelques observations d'HTAP recensées avaient été jugées trop rares pour constituer un signal significatif. Mais au printemps 2009, la notification de 5 nouveaux cas d'HTAP et de cas de valvulopathies a conduit à une nouvelle réévaluation du profil de tolérance du benfluorex. Les résultats de l'enquête nationale de pharmacovigilance ainsi que de deux études menées par le CHU de Brest ont mis en évidence une augmentation du risque d'atteinte des valves cardiaques, pouvant évoluer vers une insuffisance cardiaque chez les personnes traitées avec Mediator (R). Une étude ultérieure menée en 2009 par la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) et faisant ressortir un surrisque d'hospitalisation et d'intervention chirurgicale pour valvulopathie chez les patients diabétiques traités avec le benfluorex est venue renforcer ces résultats. Aussi, au vu de l'ensemble de ces données, l'AFSSAPS a-t-elle suspendu l'autorisation de mise sur le marché des 3 spécialités contenant du benfluorex. Parallèlement, la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), à la demande de l'AFSSAPS, a mené une étude complémentaire durant l'été 2010 sur les hospitalisations et les interventions chirurgicales pour valvulopathies ainsi que sur les décès survenus chez les patients qui avaient pris du benfluorex en 2006. Aussi, eu égard au nombre de décès estimés, présentés à l'issue de cette étude, une mission d'enquête et d'évaluation a été confiée à l'inspection générale des affaires sanitaires et sociales (IGAS). Un premier rapport rendu en janvier 2011 s'est attaché à reconstituer la succession des évènements et des choix concernant le retrait de ce médicament afin d'analyser les mécanismes de prise de décisions en prenant en compte les éléments issus de la pharmacovigilance, l'évolution des connaissances scientifiques, les décisions intervenues dans d'autres pays et les conditions d'utilisation de ce médicament compte tenu du cadre défini par l'autorisation de mise sur le marché. De surcroît, outre l'enquête judiciaire ouverte sur le dossier Médiator visant à établir l'ensemble des responsabilités dans la gestion du dossier Médiator, plusieurs missions (deux missions parlementaires, une seconde mission de l'Inspection générale des affaires sanitaires et sociales ainsi que les différents groupes de travail constituant les Assises du Médicament) dont les rapports ont été rendus publics en juin, ont élaboré des propositions de réformes du système sanitaire des produits de santé. L'enjeu principal de rénovation du dispositif sanitaire réside essentiellement dans la réforme des processus d'évaluation, de décisions, de suivi, d'utilisation et de promotion des produits de santé, afin de garantir une sécurité optimale aux patients, avec pour objectif principal : restaurer la confiance.
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