Mme Chantal Robin-Rodrigo appelle l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur la décision du Comité européen des droits sociaux (CEDS) du Conseil de l'Europe en date du 23 juin 2010 portant sur les forfaits en jour et les astreintes. En effet, ladite décision, rendue publique le 14 janvier 2011, conclut à la violation par la France de la charte sociale européenne révisée (CSER). L'un des éléments essentiels de cette décision porte sur les astreintes et la rémunération de ces dernières. Dans sa décision, le CEDS conclu que « par leur nombre et la nature des fonctions qu'ils exercent, les cadres et autres salariés assimilés n'entrent manifestement pas dans les exceptions visées par l'article 4§2. Dès lors, ils doivent bénéficier du droit prévu par cet article [...] Le Comité estime que les heures de travail effectuées par les salariés soumis au système de forfait en jours qui ne bénéficient, au titre de la flexibilité de la durée du travail, d'aucune majoration de rémunération, sont anormalement élevées. Le fait qu'une majoration de la rémunération soit désormais prévue pour les jours travaillés correspondant aux jours de congés auxquels le salarié soumis au système de forfait en jours a renoncé, n'apparaît pas comme suffisant au regard du paragraphe 2 de l'article 4. Dans ces conditions, une période d'un an est excessive [...] Par conséquent, le Comité dit que la situation est contraire à l'article 4§2 de la charte révisée ». Par ailleurs, sur le régime des astreintes, il est décidé par le CEDS que « l'assimilation des périodes d'astreinte au temps de repos constitue une violation du droit à une durée raisonnable du travail prévue par l'article 2§1 de la charte révisée » et « est contraire à l'article 2§5 de la charte révisée sur le repos hebdomadaire ». Aussi elle lui demande de lui indiquer les mesures qu'il entend prendre (et le calendrier afférent) afin de mettre le droit du travail français en conformité avec cette décision européenne pleinement opposable à la France.
Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative aux décisions rendues en 2010 par le Comité européen des droits sociaux (CEDS) ayant constaté une non-conformité de la France à la charte sociale européenne révisée, en matière de forfaits en jours et d'astreintes. Il convient de préciser, à titre liminaire, que le Comité des ministres du Conseil de l'Europe, qui intervient sur le rapport du comité européen des droits sociaux dans la phase finale du mécanisme de contrôle de la bonne application de la charte sociale européenne révisée, n'a pas jugé utile d'adresser de recommandation à la France. Cette position est fondée au regard des garanties légales et conventionnelles encadrant les forfaits en jours et les astreintes. En effet, s'agissant du forfait en jours, l'idée qui inspire ce dispositif est qu'un cadre, à la condition qu'il soit autonome dans l'organisation de son emploi du temps, ne peut prédéterminer son temps de travail. La loi française a donc prévu la possibilité que son temps de travail puisse être décompté en jours et non en heures. Plusieurs dispositions assurent pour autant une durée raisonnable de travail et lui garantissent une protection effective de sa santé : une protection légale tout d'abord, le code du travail assurant au salarié en forfait-jours le bénéficie du repos quotidien de onze heures, du repos hebdomadaire de trente-cinq heures, ainsi qu'une limitation du nombre de jours travaillés dans l'année fixé par l'accord collectif prévoyant la mise en place de telles conventions de forfait dans les limites posées par la loi. En outre, le salarié en forfait en jours bénéficie obligatoirement d'un entretien annuel permettant notamment d'aborder la question de sa charge de travail ; des garanties conventionnelles très souvent, de nombreux accords de branche ou d'entreprise ayant été signés (notamment depuis la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail) pour encadrer ce dispositif. Par un arrêt du 29 juin 2011, la Cour de cassation a validé le dispositif des forfaits en jours. La chambre sociale a en effet considéré que ce système particulier de décompte du temps de travail n'était contraire ni aux textes communautaires ni à la charte sociale européenne. S'agissant du régime des astreintes, plusieurs garanties encadrent également le recours à ce dispositif : si l'astreinte est prise en compte pour le calcul des périodes minimales de repos quotidien et hebdomadaire, il convient de rappeler qu'en cas d'intervention pendant la période d'astreinte, le repos intégral doit être donné à compter de la fin de l'intervention sauf si le salarié en a déjà bénéficié entièrement ; si l'astreinte a été mise en place conventionnellement, l'employeur ne peut pas s'exonérer des modalités d'organisation et de la limitation de la fréquence des astreintes prévues par l'accord collectif, celle-ci ne pouvant être trop élevée, compte tenu de la sujétion qu'elle implique pour le salarié.
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