M. Jean-Luc Préel attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les discriminations engendrées par les lois successives en matière de prestation compensatoire. La prestation compensatoire, attribuée à un des époux par le jugement de divorce, a pour objet de compenser la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux. Elle a un caractère forfaitaire et prend la forme d'un versement en capital ou à titre exceptionnel d'une rente viagère. Or si la prestation compensatoire n'est pas révisable en raison de son caractère forfaitaire, il existe certaines situations pénalisantes. Par exemple, dans le cas du décès de celui qui verse la prestation, le paiement de celle-ci est prélevé sur la succession et dans les limites de l'actif successoral. C'est pourquoi il souhaite savoir si elle entend supprimer la prestation compensatoire en cas de décès du débiteur. D'autre part, il souhaiterait également connaître les aménagements prévus par le Gouvernement en cas de remariage ou de concubinage du créancier. Enfin, il lui demande de lui préciser si les sommes déjà versées en cas de substitution d'un capital à la rente peuvent être prises en compte.
La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce, entrée en vigueur le 1er janvier 2005, a mis fin au principe de la transmissibilité automatique de la prestation compensatoire aux héritiers du débiteur décédé. Cette prestation est, désormais, prélevée sur la succession du débiteur et les héritiers ne sont tenus que dans les limites de l'actif successoral, à moins qu'ils ne décident d'un commun accord de maintenir les modalités de paiement qui incombaient à l'époux débiteur lors de son décès. Lorsque la prestation compensatoire prenait la forme d'une rente, celle-ci est automatiquement convertie en capital, dans les conditions prévues aux articles 280 à 280-2 du code civil. Le décret n° 2004-1157 du 29 octobre 2004 détermine les modalités de calcul du montant du capital substitué à la rente, après déduction des pensions de réversion, en cas de décès du débiteur. Cette substitution n'étant en aucun cas une révision, il est nécessaire que le montant du capital substitué soit équivalent à la rente. Pour ce faire, la substitution d'un capital à la rente ne s'opère techniquement qu'à la date de l'événement y ouvrant droit, en fonction de l'espérance de vie du créancier. Toute autre solution aurait abouti à remettre en cause l'autorité de la chose jugée, l'équilibre des droits fixés par le jugement du divorce et aurait ainsi porté atteinte à la sécurité juridique. Par ailleurs, la réforme précitée a eu pour effet d'élargir les modalités de révision des rentes allouées antérieurement à la loi du 30 juin 2000. Celles-ci peuvent désormais être révisées, suspendues ou supprimées en cas de changement important dans la situation de l'une ou l'autre des parties ou lorsque le maintien en l'état de la rente serait de nature à procurer au créancier un avantage manifestement excessif au regard des critères posés à l'article 276 du code civil. Si le remariage, le concubinage notoire ou le PACS du créancier ne mettent pas fin de plein droit à la perception de la rente allouée à la suite d'un divorce, ils constituent un élément d'appréciation de sa situation personnelle, pris en considération par le juge dans le cadre d'une procédure en révision. Il appartient donc aux débiteurs concernés de saisir, le cas échéant, le juge aux affaires familiales par simple requête, le ministère d'avocat n'étant pas obligatoire en la matière. L'ensemble de ce dispositif est de nature à concilier les attentes des débiteurs de prestation compensatoire avec la nécessaire protection des intérêts des créanciers.
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