Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Frédérique Massat
Question N° 107130 au Ministère de l'Économie


Question soumise le 3 mai 2011

Mme Frédérique Massat attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le décret n° 2011-304 du 22 mars 2011 déterminant les modalités du remboursement minimal du capital emprunté à chaque échéance pour les crédits renouvelables. Si ce décret d'application de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation fixe une durée maximale - trente-six mois de crédit pour tout montant inférieur ou égal à 3000 €, soixante mois au delà - il autorise de l'autre main l'établissement prêteur à la reporter à chaque fois que le client puise dans sa réserve d'argent. Ainsi supposée limiter dans le temps le crédit à la consommation, la loi de 2010 vient d'être rendue totalement inutile par ce décret d'application. C'est pourquoi elle lui demande de bien vouloir réexaminer ce décret afin qu'il puisse mettre en oeuvre les conditions d'une véritable lutte contre le surendettement.

Réponse émise le 28 juin 2011

La loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation a notamment pour objectif de responsabiliser la distribution et le fonctionnement des crédits renouvelables. Pour cela elle a prévu, en plus des mesures permettant de mieux encadrer le crédit à la consommation, des dispositions propres au crédit renouvelable et adaptées aux spécificités et aux risques de ce produit. Parmi ces mesures, l'obligation d'un remboursement minimum de capital dans chaque échéance est l'une des plus importantes. Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 1er mai dernier, les prêteurs bénéficiaient d'une grande souplesse pour organiser le fonctionnement des crédits renouvelables. En effet, contrairement aux crédits « classiques », les crédits renouvelables permettent à l'emprunteur de choisir le niveau de la mensualité qu'il souhaite acquitter et donc le rythme auquel il souhaite rembourser son crédit. De fait, la plupart des offres commerciales proposaient des rythmes de remboursement qui pouvaient être très lents et correspondant à des niveaux de mensualité très faibles et peu sensibles à l'augmentation de l'encours utilisé. Ainsi, un client qui avait opté pour un petit montant de mensualité pouvait utiliser de façon répétée son crédit sans que le montant de la mensualité n'augmente significativement, l'ajustement se faisant par une diminution de la part de capital contenue dans la mensualité et par un allongement de la durée de remboursement. Evidemment cela se traduisait par un allongement de la durée de remboursement du crédit, une hausse des intérêts effectivement payés par le client et donc du coût total du crédit. Ce mode de fonctionnement est l'une des principales dérives constatées dans l'usage du crédit renouvelable ces dernières années. En effet, le faible niveau des mensualités était susceptible d'attirer des consommateurs ayant des revenus limités et qui multipliaient les utilisations du crédit sans que cela ne se traduise par une hausse de la mensualité prélevée à la fin du mois. Perçu comme « indolore » par les clients, ce mode de fonctionnement se traduisait cependant par une hausse progressive de leur niveau d'endettement et par une réduction de ce qu'ils remboursaient effectivement de leur capital emprunté. Ne payant pratiquement plus que des intérêts, sans rembourser le capital lui-même, ces emprunteurs subissaient un coût très élevé pour leur crédit, un allongement parfois démesuré de la durée des remboursements et étaient fragilisés, voire exposés au surendettement, en cas de perte de revenus, à la suite d'un accident de la vie par exemple. Depuis le 1er mai 2011, les nouvelles règles mises en place par la loi portant réforme du crédit à la consommation mettent fin à de telles situations. L'article L. 311-16 du code de la consommation définit en effet que chaque contrat de crédit renouvelable : « prévoit que chaque échéance comprend un remboursement minimal du capital emprunté, qui varie selon le montant total du crédit consenti et dont les modalités sont définies par décret ». La loi prohibe ainsi que les mensualités payées par l'emprunteur ne contiennent que des intérêts et détermine un rythme de remboursement minimal du capital. En obligeant à ce que le montant de la mensualité tienne compte du niveau de capital emprunté, cette nouvelle disposition va rendre de fait impossible des propositions commerciales reposant sur des faibles niveaux de mensualités, sauf pour des niveaux de capital emprunté très réduits. Cette mesure met donc un terme aux pratiques commerciales qui utilisaient les petites mensualités comme produit d'appel. Et de même, cette mesure amènera nécessairement à ce que l'utilisation du crédit se traduise par une hausse à due concurrence de la mensualité. La multiplication des « tirages » et l'accumulation d'un capital emprunté se traduira nécessairement par une hausse de la mensualité, ce qui n'était pas le cas auparavant. Cette hausse sera par ailleurs plus rapide et constituera donc un signal d'alerte pour l'emprunteur. Le crédit renouvelable ne sera plus indolore, et son utilisation conduira nécessairement à une hausse de la somme prélevée à la fin du mois sur le compte de l'emprunteur qui pourra plus rapidement ajuster son utilisation du crédit. Cette disposition fait ainsi disparaître la déconnexion devenue dangereuse entre la charge « perçue » par l'emprunteur et la charge « réelle » à laquelle son crédit renouvelable l'engage. Enfin, en fixant un rythme de remboursement minimum du capital, la mesure va se traduire par une réduction du coût du crédit pour les emprunteurs. Cette réduction du coût résultera de deux effets qui peuvent se cumuler : la réduction de la durée moyenne des remboursements, c'est-à-dire des périodes pendant lesquelles le crédit est effectivement utilisé et où l'emprunteur paye des échéances ; une ou plusieurs utilisations du crédit mettront moins de temps à se rembourser aujourd'hui qu'elles n'en mettaient avant le 1er mai ; la réduction de la part des intérêts dans les échéances acquittés par l'emprunteur ; c'est-à-dire que pour un même montant de capital emprunté, en une ou plusieurs utilisations successives du crédit, l'emprunteur aura payé, lorsqu'il aura fini de rembourser ce capital, au total moins d'intérêts aujourd'hui qu'il n'en aurait payé avant le 1er mai. Par exemple, pour un crédit renouvelable avec un plafond de 3 000 euros, un TAEG de 20,51 % et une assurance emprunteur de 0,6 % par mois, sur lequel l'emprunteur fait un tirage de 1 000 euros, les prêteurs pouvaient avant la réforme prévoir des mensualités de 30 euros. Le capital était alors remboursé en cinq ans. Aujourd'hui la règle prévue par le décret interdit au prêteur de fixer dans ce cas une mensualité inférieure à 40 euros, ce qui permet le remboursement des 1 000 euros en trois ans. Cette règle fonctionne également s'il y a plusieurs tirages successifs : avec le même crédit mais trois tirages successifs de 250 euros, puis 500 euros, puis 1 000 euros espacés de six mois chacun, l'emprunteur aurait auparavant remboursé le capital en quatre vingt-seize mois, contre soixante-douze mois après la réforme, soit une réduction de deux ans. On note dans ce cas que la mensualité, même fixée au niveau minimal prévu par le décret, soit 15 euros, après le premier tirage, aurait augmenté jusqu'à 54 euros à l'issue du troisième tirage. L'accélération du rythme de remboursement a un effet sur la diminution du coût du crédit pour l'emprunteur. Dans le premier exemple, l'emprunteur aurait payé au total 793 euros d'intérêts et d'assurance avant la réforme, contre seulement 450 euros avec les règles du décret, soit une diminution de 43 %. Dans le second exemple, il aurait payé 1 594 euros avant la réforme, contre 757 euros avec les règles du décret, soit une diminution de 43 % également.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion