M. François Brottes attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur la colère de nombreux gérants de lieux sonorisés (cafés, restaurants, bars et restaurants à ambiance musicale, commerce de distribution, salons de coiffure, etc.) suite à l'application de la décision de la commission de la rémunération équitable de la SPRE (Société de perception de la rémunération équitable) du 5 janvier 2010, fixant de nouveaux barèmes de perception des « droits voisins » (artistes-interprètes, producteurs) pour les lieux sonorisés. Jusqu'alors fixés à 18 % des droits d'auteurs perçus par la SACEM, cette décision a conduit à une déconnection du barème avec celui de la SACEM. Le mode de calcul varie selon la nature des établissements mais conduit dans tous les cas à des augmentations spectaculaires, pouvant aller jusqu'à 2 000 % dans le cas des BAM (bars à ambiance musicale). Compte tenu de la composition de la commission de la rémunération équitable de la SPRE, et du poids qu'y tiennent les majors de la production phonographique, compte tenu du fait que cette décision s'impose à l'État, de façon tout à fait dérogatoire, puisqu'il a délégué, en l'occurrence, sa mission régalienne de lever l'impôt sans conserver aucun droit de contrôle sur son exercice, ainsi qu'il l'admet lui-même dans une réponse à la QE n° 77105 publiée le 28 septembre 2010 (« la loi ne place pas cette commission sous l'autorité du Gouvernement et rien dans les textes ne permet au ministre de retirer, d'abroger ou de modifier toute décision de barème ainsi adoptée »), on ne peut que s'interroger, avec les gérants des lieux sonorisés, sur l'équité de ces augmentations, mais aussi, de façon plus générale, sur la légitimité du mandat légal accordé à la SPRE, société cogérée par quatre sociétés de producteurs et artistes-interprètes, de déterminer, sans contrôle de la représentation nationale, les montants des sommes qui leur seront directement reversées. Dans le contexte de perte importante de bénéfices pour les artistes-interprètes comme pour les sociétés de production phonographique, suite à la généralisation de la pratique du téléchargement (légal ou non), d'aucuns seraient tentés d'y voir une tentative de « renflouement des caisses », avec la complicité de l'État. Il lui demande donc de lui préciser les dispositions qu'il entend prendre pour que l'intérêt général soit bien représenté au sein de la commission pour la rémunération équitable et que des gardes fous soient intégrés dans le mandat accordé à la SPRE, de manière à ce que les augmentations de barème ne puissent intervenir que dans le respect de la décence et de l'équité véritable.
L'article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle institue une licence légale dans le cas de radiodiffusion, de retransmission par câble simultanée et intégrale et de communication au public de phonogrammes du commerce, tout en créant pour les producteurs de phonogrammes et les artistes interprètes un droit à rémunération compensatoire. La rémunération équitable garantit à l'utilisateur le renouvellement de l'offre musicale nécessaire à son activité, et cela sans avoir ni à signer de contrat ni à demander préalablement une autorisation de diffusion. Elle ne vise en aucun cas les pertes liées à la piraterie de la création musicale. La commission prévue à l'article L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle fixe les barèmes de rémunération, dans le cadre de décisions réglementaires directement exécutoires. Cette commission est composée paritairement de représentants des bénéficiaires du droit à rémunération et de représentants des diffuseurs. La loi ne place pas cette commission sous l'autorité du Gouvernement et rien dans les textes ne permet au ministre d'abroger ou de modifier toute décision de barème ainsi adoptée. Les décisions élaborées point par point par les titulaires de droits et les organisations syndicales représentant les utilisateurs ne peuvent ainsi être retirées par le ministre. Le président de la commission, qui est un représentant de l'État, a pour mission de faciliter la négociation. La décision de barème de rémunération équitable pour les lieux sonorisés du 5 janvier 2010 a été adoptée après une négociation menée sur près d'un an. Cette décision s'inscrit dans un mouvement de revalorisation de la rémunération équitable entamé en 2001 et poursuivi par la décision de barème des radios privées du 15 octobre 2007, la décision de barème des radios publiques du 17 septembre 2008 et, plus récemment, la décision de la télévision du 19 mai 2010. La rémunération équitable dans les lieux sonorisés n'avait pas fait l'objet de réactualisation depuis 1987. La décision de barème de rémunération équitable des lieux sonorisés du 5 janvier 2010 fait évoluer le coût global de la musique vers une croissance de 15 % la première année d'application du barème et de 9 % la deuxième et la troisième année. Des abattements substantiels ont été négociés au sein de la commission pour permettre la mise en oeuvre progressive du barème. Les redevables bénéficient d'une réduction sur la rémunération équitable annuelle de 45 % la première année d'application du barème, de 30 % sur la deuxième année et de 15 % la troisième année. Le niveau moyen de ce barème sera de près de 65 % du montant des droits d'auteur correspondants en « vitesse de croisière », c'est-à-dire à compter de la quatrième année d'application du barème. Un minimum annuel de rémunération de 90 euros TTC est fixé à l'article 6 de la décision du 5 janvier 2010. Des modalités particulières sont prévues pour les associations et autres organisations à but non lucratif diffusant de la musique.
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