M. Daniel Boisserie appelle l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur la décision du comité européen des droits sociaux qui met en exergue le non-respect par la législation française du travail de plusieurs points de la charte sociale européenne révisée. La France s'est engagée à la respecter en la signant et en la ratifiant. Les non-conformités portent sur deux points. Le premier concerne les salariés (cadres et non-cadres) en forfait jour qui subissent des durées de travail excessives et ne bénéficient pas du paiement d'heures supplémentaires ; concernant le second, les salariés peuvent être en astreinte pendant leur temps de repos, ce qui les prive d'un véritable droit au repos. La France a déjà été condamnée pour les mêmes raisons à deux reprises en 2004. Depuis cette date, elle n'a toujours pas pris les meures nécessaires pour respecter ses engagements. Il lui demande donc de bien vouloir lui faire connaître les mesures qu'il entend prendre.
Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative aux décisions rendues en 2010 par le Comité européen des droits sociaux (CEDS) ayant constaté une non-conformité de la France à la charte sociale européenne révisée, en matière de forfaits en jours et d'astreintes. Il convient de préciser, à titre liminaire, que le Comité des ministres du Conseil de l'Europe, qui intervient sur le rapport du comité européen des droits sociaux dans la phase finale du mécanisme de contrôle de la bonne application de la charte sociale européenne révisée, n'a pas jugé utile d'adresser de recommandation à la France. Cette position est fondée au regard des garanties légales et conventionnelles encadrant les forfaits en jours et les astreintes. En effet, s'agissant du forfait en jours, l'idée qui inspire ce dispositif est qu'un cadre, à la condition qu'il soit autonome dans l'organisation de son emploi du temps, ne peut prédéterminer son temps de travail. La loi française a donc prévu la possibilité que son temps de travail puisse être décompté en jours et non en heures. Plusieurs dispositions assurent pour autant une durée raisonnable de travail et lui garantissent une protection effective de sa santé : une protection légale tout d'abord, le code du travail assurant au salarié en forfait-jours le bénéficie du repos quotidien de onze heures, du repos hebdomadaire de trente-cinq heures, ainsi qu'une limitation du nombre de jours travaillés dans l'année fixé par l'accord collectif prévoyant la mise en place de telles conventions de forfait dans les limites posées par la loi. En outre, le salarié en forfait en jours bénéficie obligatoirement d'un entretien annuel permettant notamment d'aborder la question de sa charge de travail ; des garanties conventionnelles très souvent, de nombreux accords de branche ou d'entreprise ayant été signés (notamment depuis la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail) pour encadrer ce dispositif. Par un arrêt du 29 juin 2011, la Cour de cassation a validé le dispositif des forfaits en jours. La chambre sociale a en effet considéré que ce système particulier de décompte du temps de travail n'était contraire ni aux textes communautaires ni à la charte sociale européenne. S'agissant du régime des astreintes, plusieurs garanties encadrent également le recours à ce dispositif : si l'astreinte est prise en compte pour le calcul des périodes minimales de repos quotidien et hebdomadaire, il convient de rappeler qu'en cas d'intervention pendant la période d'astreinte, le repos intégral doit être donné à compter de la fin de l'intervention sauf si le salarié en a déjà bénéficié entièrement ; si l'astreinte a été mise en place conventionnellement, l'employeur ne peut pas s'exonérer des modalités d'organisation et de la limitation de la fréquence des astreintes prévues par l'accord collectif, celle-ci ne pouvant être trop élevée, compte tenu de la sujétion qu'elle implique pour le salarié.
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