M. Christian Eckert attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur le projet de loi créant le Défenseur des droits. Avec l'appui du ministre, la majorité de l'Assemblée nationale a définitivement adopté mardi 15 mars 2011 le projet de loi créant le Défenseur des droits. Les députés socialistes, au nombre desquels s'honore être le député, s'y sont opposés. Manquant l'occasion d'une réelle avancée démocratique, ce projet marque un grave recul dans la défense des droits et libertés de nos concitoyens. En effet, la disparition d'institutions légitimes et reconnues et leur fusion au sein d'un énorme pôle administratif, privé de moyens d'investigations, désigné par le seul Président de la République, ne pourront que nuire aux missions autrefois remplies. Il lui demande de bien vouloir lui rappeler pourquoi le Gouvernement soutient le contraire.
L'institution du Défenseur des droits, dotée d'une assise constitutionnelle et, partant, d'une autorité morale renforcée, vise à donner plus de cohérence et plus de lisibilité à la mission de protection des droits et libertés, auparavant confiée à plusieurs autorités administratives indépendantes dont les attributions se chevauchaient. C'est dans cette perspective que le rapport du comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République, présidé par M. Édouard Balladur, a préconisé, notamment, l'insertion du Médiateur de la République, de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité de la Commission nationale de déontologie de la sécurité et du Défenseur des enfants dans le champ d'intervention du Défenseur des droits. Le législateur organique a fait le choix de suivre cette préconisation. La nouvelle autorité dispose de pouvoirs et de moyens d'action étendus, gage d'une efficacité renforcée. Le Défenseur des droits est désigné par le Président de la République à l'instar des anciennes autorités administratives indépendantes auxquelles il a succédé (Médiateur de la République, Défenseur des enfants, président de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité et président de la Commission nationale de déontologie de la sécurité). Son mode de nomination se distingue seulement de ces précédents en ce qu'il ajoute les garanties que représente le passage en conseil des ministres et l'avis des commissions compétentes des deux assemblées dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution (avec possibilité de veto aux trois cinquièmes), participe également au renforcement du statut du Défenseur des droits. Son indépendance est garantie par la durée et le caractère non renouvelable de son mandat, auquel il ne peut être mis fin. La Constitution n'a pas fait du Défenseur des droits une autorité collégiale mais a prévu qu'il pourrait être assisté d'un collège pour l'exercice de certaines de ses attributions. Comme l'a rappelé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2011-626 DC, par laquelle il a jugé la loi organique conforme à la Constitution, c'est à lui seul que le constituant a attribué la mission de défense des droits, et non aux collèges créés par la loi organique. Ceux-ci, composés de personnalités choisies en fonction de leurs compétences dans des domaines spécifiques, auront pour mission, par leurs avis, d'éclairer l'action du Défenseur des droits sur toutes questions nouvelles. La loi organique a donc prévu la présence d'adjoints, vice-présidents des collèges, auxquels pourront être déléguées certaines attributions, mais qui n'ont pas vocation à agir en qualité de personnes qualifiées et ne disposent pas de pouvoirs propres. Un tel dispositif aboutit à un équilibre : il confère une visibilité aux missions du Défenseur des droits et renforce son efficacité d'action tout en préservant son autorité. Ainsi, loin de constituer un recul, la création du Défenseur des droits doit permettre de rendre plus efficace la défense des libertés. Dans son champ de compétence élargi, il dispose d'ailleurs de prérogatives plus étendues qu'aucune autre des institutions auxquelles il s'est substitué.
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