M. André Wojciechowski attire l'attention de M. le ministre de la défense et des anciens combattants sur la crédibilité actuelle de l'Europe de la défense. Sommes-nous dans ce monde sur le bon chemin ou restons-nous sur des actions concurrentes avec les États-unis, la Russie et les pays du sud de la Méditerranée ? En fait, il voudrait savoir si nous saurons définir une politique de complémentarité avec nos voisins (Russie, pays baltes) ou si nous perdons de vue l'approche commune, rempart contre l'islamisme qui se dirige vers l'Europe.
Contrairement aux grands acteurs stratégiques nationaux, l'Union européenne (UE) n'a jamais pensé son action extérieure dans la perspective d'une projection de puissance. Au contraire, elle a toujours mis en avant sa neutralité dans l'objectif d'asseoir progressivement son rôle de médiateur dans les grands conflits internationaux (processus de Genève [réunissant les États-Unis, la Russie, l'UE et les Nations unies], engagé en 2008, pour la résolution de la crise russo-géorgienne ; participation au Quartet [regroupant le Royaume-Uni, la Chine, la Russie, les Etats-Unis, l'Allemagne et la France] en charge des négociations avec l'Iran sur la question du nucléaire...). Soucieuse d'inscrire son action dans un cadre multilatéral et conditionnant systématiquement ses engagements militaires à l'existence préalable d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies, l'UE a conçu l'Europe de la défense, dès son origine, comme un projet ouvert permettant de développer des partenariats équilibrés avec les grands acteurs stratégiques internationaux. Le haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité - autorité créée par le traité de Lisbonne le 1er décembre 2009 - travaille à l'application de cette politique avec notamment pour objectif le renforcement de la coopération avec les États-Unis, d'une part, et la Russie, d'autre part. Si l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) demeure pour les États-Unis la plate-forme privilégiée des relations stratégiques avec l'UE, des contacts directs entre Bruxelles et Washington se sont largement développés au cours de ces dernières années et un cadre de coopération est actuellement en cours de négociation. Les États-Unis voient en effet dans la consolidation de la défense européenne un moyen de parvenir à une meilleure répartition des responsabilités sécuritaires occidentales. Washington attend en particulier des États membres de PUE qu'ils répondent eux-mêmes aux défis de sécurité dans leur zone de voisinage. Les différentes opérations en cours de l'Union européenne, l'initiative de Weimar (France, Allemagne, Pologne) pour renforcer les outils de la politique de sécurité et de défense commune, ainsi que le traité francobritannique de coopération en matière de défense et de sécurité, signé le 2 novembre 2010, sont des signaux forts de la politique de consolidation stratégique de PUE et témoignent de notre volonté de maintenir des capacités européennes autonomes d'intervention. Enfin, sur le plan opérationnel, les récentes collaborations européennes et américaines au Kosovo et contre la piraterie au large de la Somalie (opérations navales et financement par les États-Unis des salaires des forces de sécurité somaliennes formées dans le cadre de la mission militaire européenne d'entraînement des soldats) ont permis à l'UE d'être reconnue par les États-Unis comme un acteur incontournable de la gestion extérieure des crises. Concernant la coopération avec la Russie et les pays du Sud de la Méditerranée, la construction d'un partenariat nécessite unevision plus homogène de la part des pays européens sur leur voisinage et leurs intérêts de sécurité immédiats, comme en attestent les débats récurrents sur la clé de répartition de l'instrument de voisinage et de partenariat (IEVP) (l'IEVP est l'instrument financier de la politique européenne de voisinage [PEV]. Mis en oeuvre depuis le 1er janvier 2007, l'IEVP reprend les anciens programmes de coopération TACIS [pour les pays d'Europe de l'Est] et MEDA [pour les pays méditérannéens], en élargissant leurs objectifs. Son but principal est de créer un espace de valeurs communes, de promouvoir la stabilité et d'intensifier la coopération et l'intégration économique et régionale]) avec les pays nord-africains et est-européens. Dans ce contexte, la France entend maintenir sa vigilance dans les négociations en cours sur le nouvel accord-cadre de partenariat avec la Russie, partenaire avec lequel nos liens d'interdépendance obligent à construire une relation sereine, notamment dans la gestion commune d'un même voisinage. Concernant les pays du Sud de la Méditerranée, les « Printemps arabes » permettent aujourd'hui à l'Union d'envisager de nouvelles perspectives de coopération. Toutefois, seule une stratégie globale combinant la politique de voisinage, la politique européenne de sécurité et de défense commune, ainsi que le volet « extérieur » de la politique « justice, liberté, sécurité » permettra à PUE d'accompagner pleinement ces pays dans leur transition démocratique.
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