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Christian Ménard
Question N° 103064 au Ministère du de l'État


Question soumise le 22 mars 2011

M. Christian Ménard attire l'attention de M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État sur l'organisation de lotos traditionnels destinés à financer les associations sportives et culturelles et à créer une animation locale. Il semble que la jurisprudence s'oriente vers une lecture restrictive de la loi du 21 mai 1836 modifiée par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004. Le financement de bon nombre d'associations est concerné par ces textes dont l'interprétation semble devoir être précisée afin qu'elles puissent prévoir leurs actions en toute sérénité. En particulier, la notion de cercle restreint des participants semble entraîner une interdiction totale de toute publicité pour limiter l'accès aux seuls adhérents de l'association. Ne pourrait-on pas imaginer une solution médiane qui, sans porter préjudice aux établissements de jeux, permette un auditoire suffisant à ces lotos traditionnels ? Il lui demande de bien vouloir préciser quelles mesures il entend prendre en la matière.

Réponse émise le 23 août 2011

Les « loteries de toute espèce » sont prohibées par la loi du 21 mai 1836 et la violation de cette interdiction est sanctionnée de trois ans d'emprisonnement et/ou de 90 000 euros d'amende. Cependant, les articles 5 et 6 de la loi de 1836 prévoient deux exceptions : pour les loteries d'objets mobiliers exclusivement destinées à des actes de bienfaisance, à l'encouragement des arts ou au financement d'activités sportives à but non lucratif (art. 5) et pour les lotos traditionnels également appelés « poules au gibier », « rifles » ou « quines » (art. 6). L'objectif de la loi, qui a été modifiée notamment en 2004, est de protéger le tissu associatif en permettant aux associations à but non lucratif d'organiser des lotos ou loteries afin de récolter des fonds, tout en évitant que ces lotos ou loteries ne deviennent une activité économique à part entière. Ainsi, l'article 6 de la loi de 1836 précise que les lotos traditionnels doivent se dérouler dans un cercle restreint et uniquement dans un but social, culturel, scientifique, éducatif, sportif ou d'animation sociale et que les mises doivent être inférieures à 20 euros. La jurisprudence a précisé que la notion de cercle restreint « s'oppose au concept de loisir de masse et suppose une certaine convivialité incompatible avec une manifestation faisant appel à un grand concours de population » (CA Pau, 22 mai 1996 et 8 octobre 1997). Le cercle restreint est également défini comme un « regroupement de personnes ayant des activités ou des affinités identiques avec pour finalité de procurer aux organisateurs une source de financement permettant la pérennité du tissu associatif » (CA Montpellier, ch. corr. 3, 28 juin 2007, n° 06/01184). Le juge apprécie la notion de cercle restreint, au cas par cas, en analysant les buts poursuivis par les organisateurs, et cherche à déterminer s'ils sont ou non dépourvus d'intention lucrative. Ainsi, afin de distinguer les lotos traditionnels des loteries organisées à des fins essentiellement économiques, le juge s'appuie sur un faisceau d'indices comprenant notamment : l'importance des moyens mis en place par les organisateurs (dénote, par exemple, un objectif lucratif la location de salles permettant de rassembler 800 personnes ou l'organisation d'un service de transports interdépartementaux - Cour de cassation, ch. crim., 5 novembre 1998, n° Q 97-815 91D), la fréquence des lotos, le nombre de participants (Cour de cassation, ch. crim. 2 juin 2010, n° 09-83 665), les bénéfices générés, la part des bénéfices effectivement reversée à l'association si le loto est organisé par un tiers (CA Pau, ch. correctionnelle, 31 janvier 2008, n° 08/00548, CA Pau, 15 janvier 2009, n° 08/00548), le type de lots susceptibles d'être gagnés, etc. Pour autant, la jurisprudence n'a pas adopté une interprétation de la notion de cercle restreint qui conduit à interdire purement et simplement toute publicité pour les lotos traditionnels ou qui empêcherait leur ouverture à des personnes non membres de l'association concernée, tant que le but recherché est bien social, culturel, scientifique, éducatif, sportif ou d'animation sociale. En vertu de l'article 4 de la loi de 1836, seule la publicité pour les loteries prohibées est interdite. Ainsi, ni la loi de 1836 ni la jurisprudence n'interdisent la publicité pour les lotos traditionnels. Cependant, le juge s'assure que les dépenses de publicité et la forme que prend cette dernière ne sont pas un indice du caractère commercial de la loterie. Ainsi, la jurisprudence considère qu'une publicité dont la diffusion est très fréquente et importante (insertions publicitaires de grande ampleur dans un quotidien régional à grand tirage, publicité payée par la société organisant le loto et non par les associations, coût total des insertions publicitaires de plus de 80 000 euros sur moins d'un an) ou qui met en avant la société organisant le loto et non les associations bénéficiaires, est incompatible avec une organisation de lotos en cercle restreint (CA Montpellier, ch. correctionnelle, 24 septembre 2009, n° 08/02146 ; CAA Bordeaux, 8 décembre 2009 n° 08BX02325 et CA Pau, 15 janvier 2009, précité). En ce qui concerne les participants aux lotos, le juge ne prend pas en compte le fait qu'ils soient adhérents ou non de l'association concernée mais cherche à déterminer si l'audience du loto n'est pas « manifestement disproportionnée », comme c'est le cas par exemple lorsque des lotos sont organisés cinq fois par semaine avec 150 à 350 participants selon les saisons (CA Montpellier, ch. correctionnelle, 24 septembre 2009, précité) ou lorsque les participants viennent de tout un département et des départements limitrophes (Cour de cassation, ch. crim, 2 juin 2010, précité). Par conséquent, les présidents d'association qui souhaitent organiser des lotos traditionnels doivent veiller scrupuleusement à rester dans le cadre d'une activité occasionnelle à but non lucratif, dans les conditions précisées par la jurisprudence.

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