M. Éric Ciotti attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur la pratique de l'excision en France. Bien que la France soit le seul pays d'Europe où cette pratique a déjà donné lieu à plus de vingt procès ainsi qu'à des condamnations lourdes, l'INED estime, dans son rapport d'octobre 2007, à plus de 50 000 le nombre de femmes vivant en France qui ont subi une excision. Selon ce rapport, il apparaît que les fillettes sont rarement excisées sur le territoire français et le sont plutôt lors de déplacements en Afrique. Il lui demande donc si des mesures sont envisagées afin que ces comportements inacceptables cessent, et ce, même lorsqu'ils sont pratiqués sur le continent africain.
L'attention du Gouvernement a été appelée sur la pratique de l'excision en France. Les mutilations sexuelles féminines sont des violences intolérables dont il convient de rechercher l'éradication. Ces pratiques constituent, en effet, de graves atteintes à l'intégrité physique de la personne avec des répercussions sur le psychisme et sont lourdes de conséquences sanitaires et sociales. C'est pourquoi le Gouvernement s'attache particulièrement depuis plusieurs années à mettre en oeuvre des actions de prévention et à rendre effective la répression de ces pratiques, ainsi que l'avait préconisé en mars 2005 dans ses recommandations le groupe de travail sur les femmes de l'immigration placé sous l'égide des ministres en charge de la parité et de la justice. Afin que l'exemplarité des peines puisse jouer son rôle de prévention, il importe que les poursuites soient effectivement engagées et que les peines soient dissuasives. S'il n'existe pas de qualification juridique spécifique pour les faits d'excision, les textes actuellement en vigueur permettent déjà de réprimer les violences physiques avec mutilation. En effet, dans la mesure où la victime a le plus souvent moins de quinze ans et si une lame est utilisée, une qualification criminelle est toujours possible au titre soit de violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, infraction punie de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende par l'article 222-9 du code pénal, et de quinze ans de réclusion criminelle lorsque ces violences sont commises à l'encontre de mineurs de quinze ans (article 222-10 du code pénal) ; soit de violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, infraction punie de quinze ans de réclusion criminelle par l'article 222-7 du code pénal, et réprimées à hauteur de vingt ans de réclusion criminelle par l'article 222-8 du code pénal lorsqu'elles concernent des mineurs de quinze ans. C'est précisément dans la perspective de rendre plus effective la répression de ces pratiques que le Gouvernement a fait en sorte que soient adoptées, dans le cadre de la loi du 4 avril 2006 visant à renforcer la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs, des dispositions relatives à la lutte contre les mutilations sexuelles féminines. Parmi ces dispositions figurent notamment : l'allongement du délai de prescription, en matière d'action publique, à vingt ans et à compter de la majorité de la victime ; la possibilité, par dérogation, de réprimer ces pratiques lorsqu'elles sont commises à l'étranger sur une victime mineure étrangère résidant habituellement en France ; la possibilité de lever le secret professionnel en cas de mutilations sexuelles sur mineure. L'accent est également mis sur la prévention, notamment par la sensibilisation des parents et des enfants. À cet effet, le ministère chargé de l'égalité entre les hommes et les femmes accorde et réitère régulièrement son soutien aux associations spécialisées dans la prévention et la lutte contre les mutilations sexuelles féminines. Ces associations sont des partenaires irremplaçables auprès des jeunes et de leurs familles ainsi qu'auprès des intervenants des diverses professions concernées. Elles connaissent et prennent en compte les aspects culturels, les aspirations des jeunes femmes, le poids et les mécanismes des traditions patriarcales contre lesquelles elles agissent et interpellent les institutions en charge de la protection des mineures, des droits des femmes, de l'aide sociale. Parmi ces associations figurent ELELE (migrations et cultures de Turquie) et le Groupe femmes pour l'abolition des mutilations sexuelles (GAMS). Dans cette même perspective de prévention, mais également dans un souci de renforcer l'information et la communication sur ce thème, la brochure « Protégeons nos petites filles de l'excision » élaborée en 2004 par les principaux ministères, institutions et associations concernés, a été réactualisée à l'automne 2006. Ayant donné pleinement satisfaction, cette plaquette a été reprise à l'identique à l'exception des mises à jour nécessaires telles que l'intégration des récentes avancées législatives. Elle est principalement diffusée par les professionnels des plates-formes d'accueil de l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM), les services déconcentrés des principaux ministères concernés (santé et parité) et les associations spécialisées. Par ailleurs, un guide juridique de « l'égalité entre les femmes et les hommes de l'immigration » a été élaboré courant 2006 par le Service des droits des femmes et de l'égalité (SDFE) en collaboration avec les principaux partenaires institutionnels et associatifs concernés. Ce guide, destiné aux femmes et aux hommes de l'immigration, quelle que soit leur nationalité et qu'ils viennent d'arriver en France ou soient déjà installés, a non seulement vocation à combler le besoin d'informations juridiques, mais également à donner des informations sur le caractère répréhensible de certaines pratiques dont les mutilations sexuelles féminines. Il mentionne également la technique chirurgicale réparatrice mise au point par des urologues français et précise qu'il s'agit d'un acte pris en charge par l'assurance maladie. Ce guide fournit des renseignements très pratiques. Il a fait l'objet d'une diffusion fin avril 2007, notamment auprès des professionnels des plates-formes d'accueil de l'ANAEM. Enfin, un colloque intitulé « Pour en finir avec les mutilations sexuelles féminines » a été organisé le 4 décembre 2006 par la direction générale de la santé en étroite collaboration avec la direction de la population et des migrations (DMP) et le SDFE. L'objectif était d'identifier et de renforcer les actions d'ores et déjà menées, d'impulser une dynamique et une prise de conscience collective. L'une des quatre tables rondes organisées dans le cadre de ce colloque a spécifiquement porté sur la technique chirurgicale réparatrice en présence des urologues français qui ont mis au point cette pratique. Cette journée a été l'occasion de faire émerger des propositions qui devraient être reprises dans le cadre d'un plan national d'actions piloté par la direction générale de la santé (DGS), destiné à aboutir à la disparition de ces pratiques à l'horizon 2010 et à l'amélioration de la prise en charge et de l'accompagnement des femmes et des fillettes qui en ont été victimes.
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