M. Bernard Derosier attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, sur la mise en oeuvre des recommandations du « rapport Goldstone ». Dans le cadre de la 16e session du conseil des droits de l'Homme des Nations-unies qui se tiendra en mars 2011, la France va être amenée à se prononcer sur les suites à donner aux recommandations formulées par le rapport de la mission d'établissement des faits de l'Organisation des nations unies sur le conflit à Gaza, dit « rapport Goldstone ». Jusqu'à présent, de nombreux rapports ont conclu que les autorités israéliennes et palestiniennes n'avaient pas répondu aux demandes d'enquêtes formulées par l'assemblée générale des Nations-unies. Or, dans la résolution du 10 mars 2010, le Parlement européen a appelé les États membres de l'Union européenne « à surveiller l'application des recommandations du rapport Goldstone » et à aboutir à une « forte position commune, demandant publiquement l'application de ses recommandations et la poursuite des responsables de toutes les violations des droits de l'Homme, dont celles de présumés crimes de guerre ». Aussi, elle souhaiterait savoir quelle position prendra notre pays dans le cas où le comité d'experts indépendants, chargé par le conseil des droits de l'Homme des Nations-unies du suivi des enquêtes menées par les autorités israéliennes et palestiniennes, établirait que ces enquêtes ne répondent pas aux conditions d'indépendance, de crédibilité et de respect du droit international, et en particulier si elle soutiendra la soumission officielle du « rapport Goldstone » au conseil de sécurité, en vue d'une éventuelle saisine de la Cour pénale internationale.
La France avait condamné les provocations qui ont conduit à l'escalade de la violence au sud d'Israël et dans la Bande de Gaza, ainsi que l'usage disproportionné de la force qui a occasionné d'importantes pertes civiles dans ce territoire entre le 27 décembre 2008 et le 18 janvier 2009. La position de la France sur les initiatives qui ont été prises dans l'enceinte et sous l'égide des Nations unies après ce conflit est demeurée constante et conforme aux principes et aux valeurs qu'elle promeut. Le droit international humanitaire doit être respecté en tout lieu, en toutes circonstances et par toutes les parties à un conflit. En cas d'allégation sur des violations du droit international humanitaire, des enquêtes indépendantes, conformes aux standards internationaux doivent être menées, quelles que soient les victimes. Les auteurs de ces violations doivent être traduits devant la justice. La France a, en particulier, soutenu la création d'une mission d'établissement des faits des Nations unies sur le conflit à Gaza, dès lors que le mandat qui lui était confié demeurait équilibré et concernait toutes les parties au conflit. La France a ainsi soutenu la décision prise en ce sens par le président du Conseil des droits de l'Homme en avril 2009 et son choix de désigner Richard Goldstone pour diriger cette mission. Quelle que soit l'appréciation que l'on peut porter sur les diverses recommandations du rapport de la mission d'établissement des faits, le travail qui a été effectué répondait à la nécessité d'enquêter sur les allégations de violations du droit international humanitaire et des droits de l'Homme. Dans le cadre du suivi du rapport de la mission d'établissement des faits effectué par le Conseil des droits de l'Homme à Genève et l'Assemblée générale des Nations unies à New York, la France a toujours veillé à ce que l'équilibre nécessaire à l'établissement de la vérité et à la justice soit préservé, et en fonction de la substance des textes qui lui ont été soumis. Lors des négociations, elle a toujours adopté une attitude active favorisant le dialogue et l'impartialité. À Genève, l'absence totale d'ouverture de la part des auteurs de la première résolution qui a suivi la présentation du rapport Goldstone (résolution S-12/1 du 16 septembre 2009), a conduit la France, avec le Royaume-Uni, à refuser de prendre part au vote. Par la suite, des négociations limitées ont pu être engagées, sans pour autant que les conditions d'équilibre et d'impartialité soient réunies pour soutenir les textes présentés. Afin de traduire son engagement en faveur du droit international et de la lutte contre l'impunité, la France, ainsi que plusieurs de ses partenaires européens, a décidé de prendre part au vote en s'abstenant des trois résolutions de suivi le 14 avril 2010, le 6 octobre 2010 et le 25 mars 2011. À New York, le même raisonnement s'est appliqué, conduisant à l'abstention de la France lors du vote du 5 novembre 2009 et à un vote en faveur de la résolution le 26 février 2010. Après la publication du rapport Goldstone, et dans le cadre de son suivi dans les enceintes des Nations unies, la France a constamment plaidé en faveur de la mise en place par les parties au conflit de commissions d'enquête indépendantes, crédibles et conformes aux standards internationaux. Les parties au conflit ont mis en place des procédures d'enquêtes, dont certaines se poursuivent encore. Leur conformité aux normes internationales a été examinée par une commission d'experts indépendants nommée par les Nations unies. La France a pris note des conclusions finales de cette commission, publiées le 18 mars 2011. Tout en faisant état des carences et des insuffisances, ce rapport relève que des moyens significatifs ont été consacrés par Israël pour enquêter sur plus de 400 allégations de violations, reconnaît les initiatives positives prises par l'Autorité palestinienne et souligne l'absence totale d'engagement des autorités de facto à Gaza à enquêter sur les tirs de roquettes contre Israël. La France a toujours regretté le refus d'Israël de coopérer avec les mécanismes des Nations unies, refus qui ne lui permet pas de faire valoir son point de vue et rend l'établissement des faits plus complexes. De manière constante, elle invite Israël à réexaminer sa position à ce sujet. S'agissant de la poursuite du processus de suivi des recommandations du rapport Goldstone, la France se déterminera dans le respect des principes qu'elle défend, en fonction du mérite des projets de résolutions qui seront soumis aux différentes enceintes des Nations unies et en tenant compte des rapports des mécanismes déjà mis en place.
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