M. Michel Hunault interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur le scandale que représente la non-application des peines d'emprisonnement prononcées chaque année par les tribunaux. Il lui demande s'il peut publier les chiffres à sa disposition pour l'année 2010 et, au-delà, les mesures prises pour une meilleure application des décisions de justice.
Les peines prononcées par les juridictions pénales, et notamment les peines d'emprisonnement, font l'objet d'une attention particulière du ministère de la justice et des libertés. Plusieurs outils ont été successivement mis en place afin d'évaluer les peines en attente d'exécution. Suite au rapport de l'Inspection générale des services judiciaires de mars 2009 sur l'évaluation du nombre de peines fermes en attente d'exécution, une expérimentation suivie d'une comptabilisation manuelle a été développée en 2010. Les derniers travaux s'appuient sur la mise en oeuvre du « système d'information décisionnel pénal » (outil de comptabilisation des peines en attente d'exécution) de la sous-direction de la statistique et des études. Cet outil a permis d'estimer à 80 000 peines environ le stock total des peines d'emprisonnement ferme en attente d'exécution. Ces données sont amenées à être affinées grâce au déploiement de la nouvelle application informatique qui équipe les juridictions (Cassiopée). L'une des caractéristiques principales de ce volume de condamnations est que près de 95 % d'entre elles sont constituées de peines aménageables par le juge de l'application des peines conformément aux dispositions de l'article 723-15 du code de procédure pénale. Or une peine aménagée constitue une peine exécutée qui favorise la réinsertion des condamnés et la prévention de la récidive. Pendant toute la durée de la mesure d'aménagement, le condamné fait l'objet d'un suivi par le juge de l'application des peines et les personnels des services d'insertion et de probation. À l'inverse, les peines non aménageables (condamnations supérieures à un an en récidive ou deux ans pour les primo-délinquants) représentent uniquement 5 % de l'encours. Ainsi les peines d'emprisonnement dont le quantum est le plus important sont exécutées rapidement. Une autre caractéristique est celle de l'ancienneté des peines d'emprisonnement en attente d'exécution. Ce délai est inférieur à un an, dans plus de 65 % des cas. Afin de résorber le stock des peines d'emprisonnement ferme exécutoires, le garde des sceaux a rappelé, dans une circulaire de politique pénale générale, adressée le 15 février 2011 aux procureurs généraux et aux procureurs de la République, la nécessité de réduire les délais d'exécution des peines d'emprisonnement fermes aménageables en application des dispositions de l'article 723-15 du code de procédure pénale, ramener à exécution les peines d'emprisonnement ferme, conformément à l'article 723-16 du code de procédure pénale, en cas d'urgence motivée soit par un risque de danger pour les personnes ou les biens établi par la survenance d'un fait nouveau, soit par l'incarcération de la personne dans le cadre d'une autre procédure, soit par un risque avéré de fuite du condamné, instaurer un circuit court d'exécution des peines prononcées dans le cadre des procédures rapides que sont la comparution immédiate ou la convocation par procès-verbal. La chancellerie a également conclu, le 23 février 2011, avec les quatorze juridictions présentant les stocks de peines d'emprisonnement les plus importants des contrats d'objectifs destinés à permettre un apurement de ceux-ci, en contrepartie de l'affectation de magistrats et de fonctionnaires sur les postes vacants et du recrutement de vacataires. Dans son discours du 13 septembre 2011 à Réau (Seine-et-Marne), le Président de la République a fait de l'exécution des peines une priorité de l'action gouvernementale et annoncé ce dépôt, dans les prochaines semaines, d'un projet de loi de programmation qui permettra d'apporter de nouvelles réponses.
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