M. Michel Lefait appelle l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur le récent décret fixant les conditions de départ anticipé à la retraite pour les personnes justifiant d'une incapacité allant de 10 % à 20 %. Ce départ anticipé, contrairement au dispositif concernant les personnes dont l'incapacité au moment du départ est supérieure à 20 %, n'intervient que si un certain nombre de conditions, que ce décret précise, sont remplies. Ce texte prévoit ainsi le passage des personnes concernées devant une commission pluridisciplinaire composée de techniciens mais ne comportant pas de représentant des partenaires sociaux. D'autre part, les personnes prétendant à ce départ anticipé devront fournir une fiche d'exposition d'au moins dix-sept ans à des contraintes physiques marquées, un environnement agressif ou des contraintes liées au rythme de travail. Ces deux conditions sont d'autant plus mal accueillies par les syndicats qu'elles n'ont pas été abordées lors des rencontres ayant précédé l'adoption de la loi, ce qui est choquant étant donné leur implication. En conséquence, il lui demande de lui préciser les mesures qu'il compte prendre afin que les partenaires sociaux soient associés au processus de définition des conditions permettant aux personnes justifiant d'une incapacité de 10 % à 20 % de partir en retraite à 60 ans.
Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative aux conditions de départ en retraite anticipée des personnes présentant un taux d'incapacité entre 10 % et 20 %. La loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a ouvert un droit à retraite à taux plein dès l'âge de soixante ans au profit des assurés justifiant d'une incapacité permanente consécutive à une maladie professionnelle ou à un accident du travail ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre des maladies professionnelles. Les décrets n° 2011-352, n° 2011-353 et n° 2011-354 du 30 mars 2011 (parus au Journal officiel du 31 mars 2011) ont apporté au code de la sécurité sociale et au code rural les modifications nécessaires. Il est exact que cette législation nouvelle ne tient compte que des seules personnes dont l'état de santé s'est dégradé antérieurement à la retraite. En effet, la prise en compte de la pénibilité à effets différés - c'est-à-dire le risque que la santé d'un assuré se détériore postérieurement au départ en retraite pour des raisons imputables au travail - se heurte à l'insuffisance des connaissances scientifiques sur l'impact à long terme des expositions à certains facteurs de risque. Il est donc nécessaire de poursuivre des études en ce sens. C'est pourquoi l'article 88 de la loi du 9 novembre 2010 a confié à un comité scientifique le soin d'évaluer les conséquences de l'exposition aux facteurs de pénibilité sur l'espérance de vie avec et sans incapacité des travailleurs. Sur la base de ces travaux, des propositions tendant à la prise en compte de la pénibilité à effets différés devront être formulées avant le 1er janvier 2014. S'agissant des taux d'incapacité permanente retenus pour le droit à retraite à raison de la pénibilité, il convient tout d'abord de rappeler que le texte initialement déposé au Parlement ne concernait que les seuls assurés justifiant d'un taux d'incapacité permanente au moins égal à 20 %. Lors de la discussion au Parlement, le Gouvernement a souhaité élargir ce droit aux assurés dont le taux d'incapacité est inférieur à 20 % mais au moins égal à 10 %. Cette avancée est destinée à permettre à davantage de personnes de bénéficier d'une retraite à raison de la pénibilité. Lorsque le taux d'incapacité est inférieur à 20 %, le bénéfice de la retraite pour pénibilité est subordonné à l'avis d'une commission pluridisciplinaire chargée, d'une part, de vérifier que l'assuré a été exposé, pendant un nombre d'années déterminé par décret, à des facteurs de risques professionnels, d'autre part, d'apprécier l'effectivité du lien entre l'incapacité permanente et l'exposition aux facteurs de risques professionnels. Ces conditions ont été expressément prévues par la loi du 9 novembre 2010. La durée d'exposition requise a été fixée à dix-sept ans par le décret du 30 mars 2011 précité. Cette durée a été retenue par analogie avec celle qui sera à l'avenir nécessaire pour bénéficier d'une retraite de la fonction publique au titre des catégories dites actives : il s'agit d'une durée significative pour juger de la pénibilité d'une carrière. Préalablement à sa parution, ce décret avait fait l'objet d'une concertation avec les organisations professionnelles et syndicales. Les observations formulées lors de cette concertation ont permis de prévoir certains aménagements (cf. circulaire DSS/SD2/201 1/151 du 18 avril 2011, disponible sur le site http ://www.securité-sociale.fr/ et sur le site hup ://www.circulaires.gouv.fr/). Pour les salariés victimes d'une maladie professionnelle, il a été considéré que la condition d'exposition à des facteurs de risques professionnels peut être présumée remplie, l'instruction en la matière ayant été faite au moment de la reconnaissance de la maladie professionnelle, au travers des tableaux de maladies professionnelles ou via les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles. Ainsi, seul sera vérifié le fait que l'assuré justifie de dix-sept années d'activité professionnelle ayant donné lieu à cotisations à sa charge, tous régimes confondus (c'est-à-dire y compris ceux n'ouvrant pas droit à retraite pour pénibilité). Cette solution est cohérente avec le fait que présumer remplie une condition d'exposition de dix-sept ans suppose que l'assuré a au moins travaillé dix-sept années. Enfin, il importe de souligner que, quel que soit le cas de figure considéré, le seul interlocuteur de l'assuré est la caisse liquidatrice de la pension de retraite qui saisira, s'il y a lieu, le médecin-conseil (incapacité reconnue suite à un accident du travail) et/ou la commission pluridisciplinaire (taux d'incapacité au moins égal à 10 % et inférieur à 20 %). En revanche, l'assuré peut être, à son initiative ou à celle de la commission, entendu par la commission pluridisciplinaire. Il peut, dans ce cas, se faire assister par une personne de son choix.
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