M. Daniel Goldberg attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur le délai anormalement long de traitement des litiges devant les conseils de prud'hommes. Le Syndicat des avocats de France s'inquiète notamment des dysfonctionnements constatés à Bobigny, où trente-deux mois sont nécessaires à la tenue des audiences présidées par le juge départiteur, alors que l'article L. 1454-2 du code du travail prévoit, en pareille hypothèse, un délai d'un mois. Ce délai n'est pas exceptionnel. Bien au contraire, il est de près de deux ans à Nanterre. Devant les conseils de prud'hommes de Longjumeau et Melun, le délai de renvoi des affaires devant le bureau de jugement dépasse, désormais, treize mois. À Meaux, il est constaté un délai de près de dix mois entre l'audience de plaidoirie et le prononcé du jugement. L'extrême lenteur de la procédure est également dénoncée devant les conseils de prud'hommes de Creil, Paris et Pau. Ce dysfonctionnement de la justice civile se répercute sur certaines chambres sociales de cours d'appel. Il est devenu banal que la durée de la procédure devant la cour d'appel de Paris dépasse vingt-et-un mois. À Versailles, compte tenu de l'encombrement de la juridiction d'appel, un salarié est parfois contraint d'attendre sept mois pour connaître le délibéré dans son affaire. Face à la généralisation de ces délais, le Syndicat des avocats de France rappelle que le droit pour tout justiciable de voir statuer sur ses prétentions dans un délai raisonnable est un droit fondamental, reconnu par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et la loi française. Par ailleurs, l'ampleur de ces dysfonctionnements ne saurait résulter de la seule crise économique. En effet, soixante-deux juridictions ont été fermées depuis 2008. Or l'exigence de respect de délais raisonnables est d'autant plus essentielle devant les juridictions du travail que celles-ci statuent sur des litiges dont le jugement touche à la vie quotidienne des salariés. Il lui demande donc quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour que le droit d'obtenir une décision de justice dans un délai raisonnable soit effectivement garanti devant l'ensemble des conseils de prud'hommes.
Après un fort afflux d'affaires en 2009 (228 901), le nombre d'affaires dont les conseils de prud'hommes ont été saisis baisse sensiblement en 2010 (217 128). Ces affaires sont constituées de 172 044 affaires au fond (- 2,6 %) et de 45 084 référés (- 13,7 %). Par ailleurs, les conseils de prud'hommes ont enregistré en 2010 une forte augmentation (+ 6,9 %) du nombre d'affaires terminées, lesquelles sont passées de 192 411 en 2009 à 205 626 en 2010. La durée moyenne des affaires terminées en 2010 s'est établie à 11,1 mois. Elle inclut celle des affaires au fond (13,7 mois) et celle des référés (2 mois). Elle est en hausse par rapport à 2009. Il convient d'ajouter que 25 % des affaires terminées en 2010 l'ont été en moins de 2,5 mois, 50 % l'ont été en moins de 9 mois et 25 % l'ont été en plus de 15,8 mois. L'âge moyen du stock n'a que faiblement augmenté en 2010, s'établissant à 11,7 mois. Cette durée moyenne reste en deçà du niveau des 5 dernières années. En ce qui concerne les conseils de prud'hommes de Nanterre et de Bobigny, s'il est établi que la durée moyenne des affaires terminées en 2010 y est plus importante que la moyenne nationale, soit respectivement 21,4 mois et 22,9 mois, il reste que l'âge moyen de leur stock d'affaires s'est réduit puisqu'il est passé à Nanterre de 18,3 mois en 2009 à 13,6 mois en 2010, et à Bobigny, de 19,5 mois en 2009 à 19 mois en 2010, malgré un volume annuel d'affaires nouvelles conséquent (environ 5 300 pour Nanterre et 6 000 pour Bobigny). En toute hypothèse ces juridictions font actuellement l'objet d'une attention particulière de la chancellerie, très sensible à la durée de traitement des contentieux. À cet égard, il faut noter que cette durée moyenne des affaires terminées n'est pas uniquement liée aux moyens mis à disposition des greffes des conseils de prud'hommes concernés ; les délais de jugements sont parfois allongés par la pratique des renvois successifs souhaités par les parties et/ou leurs avocats, tout comme par le recours fréquent au juge départiteur dans ce type de contentieux aux enjeux économiques importants. Ainsi, en 2010, le taux de départition est de 28,9 % à Bobigny, de 21 % à Nanterre, et de 20,9 % à Villeneuve-Saint-Georges. Si la procédure de départage garantit l'équilibre des intérêts des demandeurs et des défendeurs, le renvoi en départage induit automatiquement un allongement substantiel de la procédure. Par ailleurs, le nombre d'affaires portées en appel est, toutes procédures confondues, en hausse (+ 5,6 %) par rapport à 2009. Si l'on examine les juridictions qui sont à l'origine des décisions au fond appelées, on constate que 42,5 % d'entre elles viennent des tribunaux de grande instance, 23,1 % des conseil de prud'hommes, 10,1 % des tribunaux d'instance, 9,4 % des tribunaux de commerce et 4 % des tribunaux des affaires de sécurité sociale. La durée moyenne de traitement des affaires devant les cours d'appel, tout type de contentieux confondu, ne varie guère par rapport à l'année précédente et s'établit à 11,2 mois. Il reste que le Gouvernement est sensible à ce que tout soit mis en oeuvre pour que la justice prud'homale soit rendue dans des délais raisonnables et diverses pistes de réflexion communes au ministère de la justice et des libertés et au ministère du travail, de l'emploi et de la santé sont entreprises en vue d'une amélioration sensible des délais de traitement des procédures prud'homales. D'ores et déjà, le projet de loi relatif à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles examiné en deuxième lecture au Sénat le 18 octobre 2011 et qui sera examiné à l'Assemblée nationale avant la fin de l'année prévoit la possibilité de spécialiser les juges départiteurs ; cette spécialisation devrait améliorer la qualité de la justice prud'homale et réduire le délai de traitement des procédures dans un contentieux technique toujours plus complexe. Par ailleurs, des échanges réguliers avec les organisations syndicales et patronales lors des assemblées plénières du Conseil supérieur de la prud'homie ont conduit la direction des services judiciaires à piloter des groupes de travail destinés à faire émerger des solutions aux difficultés liées à l'indemnisation des conseillers prud'hommes et à optimiser les moyens matériels et financiers mis à la disposition des conseillers prud'hommes au sein de ces juridictions.
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