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Stéphane Demilly
Question N° 100441 au Ministère de la Justice


Question soumise le 22 février 2011

M. Stéphane Demilly interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur la violence des paroles de certains groupes de rap s'exprimant en français contre les institutions telles la justice, la police et toute forme d'autorité publique. Ces paroles sont d'une extrême violence et n'incitent qu'à la haine. Elles encouragent à commettre des actes délictuels voire criminels contre toute forme d'autorité publique ou tout symbole de la République. Certes, la liberté d'expression est un droit fondamental dans notre pays mais, à partir du moment où de tels propos tendent à remettre en cause l'intérêt général et plus particulièrement l'ordre public, il convient de distinguer le droit de l'abus de droit. Certaines paroles choquent d'ailleurs certains de nos concitoyens qui ne comprennent pas l'absence de sanction, d'autant que les violences gratuites, y compris contre le service public des pompiers, tendent à se multiplier. Les dispositions du code pénal tels les articles 433-10, 431-6 ou 433-3 relatifs à la provocation directe à la rébellion, à la provocation directe à un attroupement armé, et aux menaces de commettre un crime ou un délit contre une personne dépositaire de l'autorité publique, peuvent tout à fait, au vu de certaines paroles, servir de base aux poursuites. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer s'il envisage des sanctions juridiques contre les propos tenus par ces groupes de rap.

Réponse émise le 21 juin 2011

Comme toute forme d'expression publique, les chansons de rap sont régies par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, qui prévoit notamment des règles particulières de prescription. En effet, la loi du 29 juillet 1881 étant une loi spéciale, elle s'applique en priorité par rapport à la loi générale que constituent les dispositions du code pénal, en application de l'adage speciala généralibus derogant. Dès lors que les propos sont exprimés dans les conditions de l'article 23 de cette loi, c'est-à-dire soit par des discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics, soit par des écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes ou images ou tout autre support de l'écrit, de la parole ou de l'image, vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics, les dispositions spéciales de la loi ont vocation à s'appliquer. Ainsi, les poursuites sont régies par des règles particulières de prescription, fixée à trois mois, qui commence à courir du jour de la première diffusion des propos litigieux. Les auteurs de propos appelant à la haine ou à la violence ne peuvent donc être poursuivis sur le fondement des articles 433-3, 433-10 et 431-6 du code pénal que si les conditions d'application de la loi du 29 juillet 1881 ne sont pas réunies. Enfin, force est de constater que l'article 24, alinéas 2 et 3 de la loi du 29 juillet 1881 qui prévoit les délits de provocation publique à commettre certaines infractions les réprime d'une peine plus sévère que les infractions évoquées par l'honorable parlementaire, à savoir cinq ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende. Il convient de rappeler qu'en tout état de cause, les magistrats du ministère public s'attachent à apporter des réponses adaptées aux propos qui dépasseraient le cadre de l'expression artistique.

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