M. Michel Vauzelle attire l'attention de Mme la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, sur le niveau très haut du prix des matières premières relevé par l'Organisation des nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Ainsi, cette dernière a indiqué jeudi 3 février que son indice mensuel, établi sur la base d'un échantillon de 55 produits alimentaires de base, a enregistré en janvier 2011 son niveau le plus haut depuis 1990, à 231 points alors qu'un indice de 200 points avait occasionné, en 2008, les émeutes de la faim. Ce niveau particulièrement inquiétant s'explique par un ensemble d'intempéries et de mauvaises récoltes ayant touché plusieurs pays producteurs mais aussi par un phénomène de spéculation absolument insoutenable d'un point de vue moral. Les troubles, que connaissent actuellement différents pays du sud de la Méditerranée, outre l'aspiration de ces peuples à la démocratie, puisent en partie leur source dans ces difficultés à se procurer des denrées alimentaires de base dans des pays où la plus grande partie des revenus, voire la quasi-intégralité de ces derniers, est dépensée pour la nourriture. Il lui demande donc quelles mesures elle compte prendre afin d'imposer au niveau international un meilleur contrôle du prix de ces denrées.
Afin d'apporter des réponses aux enjeux de la sécurité alimentaire, la communauté internationale a déjà pris, ces dernières années, d'importants engagements, en particulier dans le cadre de l'initiative de l'Aquila pour la sécurité alimentaire, lancée lors du sommet du G8 en 2009, ainsi qu'à l'occasion des sommets du G20 de Pittsburgh en 2009 et de Séoul en 2010. Tous les pays ont souligné le besoin de politiques agricoles, d'une meilleure coordination des donateurs ainsi que d'une implication politique forte au plan global et régional. Ce large consensus a permis de progresser dans la réforme du Comité de la sécurité alimentaire (CSA) et de mettre en oeuvre le partenariat mondial pour l'agriculture, la sécurité alimentaire et la nutrition. L'indice de la FAO (l'organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture) des prix des produits alimentaires - qui reflète l'évolution des prix internationaux d'un panier de produits destinés à la transformation alimentaire - a, en janvier 2011, augmenté pour le septième mois consécutif pour atteindre le plus haut niveau jamais atteint (en termes réels et nominaux) depuis la création de cet indice en 1990. Même si le prix moyen des céréales reste encore inférieur de 11 % au sommet atteint en avril 2008 et si les prix agricoles dans leur ensemble restent inférieurs à ceux de 1974, cette hausse brutale contribue doublement à l'insécurité alimentaire des populations. Pour les consommateurs les plus vulnérables, la hausse du coût de la nourriture se traduit souvent par des restrictions alimentaires et, pour les petits agriculteurs, la hausse a été trop soudaine pour qu'ils réagissent en augmentant les surfaces ensemencées et la taille de leurs cheptels. Les fortes variations de prix n'incitent pas à investir en agriculture, au Nord comme au Sud. La volatilité des prix est un des facteurs essentiels de sous-production agricole dans les pays les moins avancés et donc de dépendance alimentaire. À l'échelle mondiale, elle freine la modernisation des agricultures, participe au retard de développement des zones rurales et hypothèque les grands équilibres alimentaires. C'est pourquoi la France, à l'occasion de sa présidence du G20, plaide pour des mesures permettant de faire face à la volatilité des prix des matières premières agricoles et alimentaires. Ces mesures s'adressent aux marchés tant physiques que financiers, afin de prévenir l'occurrence de soudaines et excessives variations des prix des matières premières agricoles et de mieux gérer ces crises lorsqu'elles surviennent. Ces priorités s'inscrivent dans les conclusions du sommet du G20 de Séoul, qui engagent à « améliorer la cohérence et la coordination des politiques de sécurité alimentaire et à augmenter la productivité de l'agriculture et la disponibilité de l'alimentation ». Le G20 a ainsi demandé aux organisations internationales concernées de développer, en vue du sommet de Cannes les 3 et 4 novembre 2011, des « propositions pour mieux gérer et atténuer les risques liés à la volatilité des prix, sans distorsions de marché ». La France identifie quatre interventions essentielles pour une meilleure régulation des prix internationaux : 1. L'amélioration de la transparence et de l'intégrité des marchés physiques afin de prévenir les soudaines variations de prix. À cet égard, doit aussi être examiné l'intérêt des systèmes de stocks nationaux ou régionaux de sécurité alimentaire pour faire face à la volatilité extrême des prix agricoles. Une réflexion doit aussi être conduite sur les moyens d'améliorer les informations et statistiques sur les marchés et les stocks pour améliorer la prévision des crises par des indicateurs d'alerte et, par ailleurs, de réduire les anticipations négatives des gouvernements et des opérateurs. 2. L'amélioration de la coordination internationale en cas de crise des marchés agricoles. Les représentants des gouvernements du G20 qui représentent 85 % de la production et des exportations agricoles mondiales et les institutions internationales concernées devraient pouvoir se réunir pour discuter de façon flexible et réactive, analyser les marchés et leurs perspectives et émettre des recommandations préventives. Afin d'améliorer le dialogue entre pays producteurs et importateurs, un nombre limité de pays non membres du G20 pourraient être invités à ces réunions. 3. L'amélioration de la couverture du risque prix et du fonctionnement des marchés financiers. La régulation financière est à l'agenda du G20. Les marchés de matières premières, notamment agricoles, sont cruciaux et doivent être mieux régulés pour que les marchés financiers et de dérivés puissent jouer leur rôle de couverture des risques. Cette réflexion peut s'inspirer des mesures prises tant aux États-Unis qu'en Europe. De plus, certaines institutions internationales, comme la FAO, ont proposé la mise en place d'instruments de couverture pour les pays en développement, en particulier des facilités de financement pour les pays importateurs à faibles revenus qui dépendent fortement des importations de produits agricoles. 4. Le maintien de l'effort de développement de la productivité agricole et d'atténuation des crises. La France s'est engagée à l'Aquila à augmenter son effort en faveur du développement agricole et de la sécurité alimentaire. Sur les 1,5 Mdeuros prévus en 2009 pour trois ans, 960 Meuros ont été engagés à l'issue des deux premières années. Malgré une conjoncture budgétaire difficile, et afin d'aider les pays les plus vulnérables, l'aide alimentaire programmée française est maintenue à son niveau de 35 Meuros. 20 Meuros ont déjà été ciblés en janvier 2011 sur 17 pays jugés prioritaires.
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