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Rudy Salles
Question N° 97880 au Ministère de la Santé


Question soumise le 18 janvier 2011

M. Rudy Salles attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé, sur les graves conséquences, en matière de santé publique, de la consommation d'alcool par les femmes enceintes. Une étude de l'Inserm sur le sujet "Grossesse et alcool" publiée en décembre 2010 montre en effet, qu'en dépit des campagnes publiques d'informations, 25 % des femmes enceintes continueraient aujourd'hui de boire durant leur grossesse, en France. Cette alcoolisation pendant la grossesse concernerait donc près de 200 000 naissances par an, ce qui est considérable. Il est pourtant scientifiquement établi qu'un bébé exposé à l'alcool, même en faible quantité, durant la période de gestation de la mère peut naître avec des déficiences mentales, le syndrome d'alcoolisation foetale ou des malformations organiques. On sait également aujourd'hui que de nombreux enfants chez qui on détecte, à l'âge scolaire, des problèmes d'hyperactivité, de déficits d'attention, de troubles du comportement sont en fait des enfants dont la mère a consommé de l'alcool enceinte. Il lui demande donc quelles sont les mesures envisagées par le Gouvernement pour mieux informer, en étroite coopération avec les professions de santé, les futures mères des dangers de la consommation d'alcool pendant la grossesse et réduire ainsi les risques d'apparition ultérieure de malformations ou de troubles du comportement chez les enfants concernés.

Réponse émise le 1er mars 2011

L'alcool est la première cause de handicap non génétique chez l'enfant et le syndrome d'alcoolisation foetale (SAF), conséquence de l'exposition du foetus à des concentrations d'alcool pendant la grossesse, concerne entre 3 000 et 5 000 naissances par an. Même à très faibles doses, l'alcool passe, librement et rapidement, du sang maternel au sang du foetus au travers du placenta. Or, les molécules d'alcool ont un effet destructeur sur le cerveau du foetus. L'alcool a une toxicité directe sur le système nerveux. Hormis le SAF, d'autres conséquences de la consommation d'alcool pendant la grossesse ont été établies : une augmentation de la mortalité des grossesses gémellaires, l'apparition de malformations de la face, des troubles de la vision et un retard de croissance sévère. Ainsi toute exposition à l'alcool pendant la grossesse, même à des doses très faibles, fait courir de nombreux risques au foetus. La seule mesure susceptible d'éviter le SAF est l'abstention totale de consommation d'alcool pendant la grossesse. Afin de permettre une meilleure information sur les risques sanitaires pour le foetus de la consommation d'alcool pendant la grossesse, depuis le 3 octobre 2007, conformément à l'arrêté du 2 octobre 2006 du ministère chargé de la santé, toutes les unités de conditionnement des boissons alcooliques doivent porter un « message à caractère sanitaire préconisant l'absence de consommation d'alcool par les femmes enceintes ». Ce message peut prendre la forme d'une phrase littérale : « La consommation de boissons alcoolisées pendant la grossesse, même en faible quantité, peut avoir des conséquences graves sur la santé de l'enfant » ou d'un pictogramme. La mise en place du pictogramme n'est pas une mesure isolée, mais vient en complément d'une série de dispositions adoptées dans le cadre de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, qui rendent notamment obligatoires des campagnes d'information et de communication sur la prévention du SAF vis-à-vis du grand public et des professionnels de santé ou encore une information, au collège et au lycée, sur les risques sanitaires de la consommation d'alcool pendant la grossesse et la formation de tous les professionnels de santé et des professionnels du secteur médicosocial aux effets de l'alcool sur le foetus. Cette stratégie globale de prévention d'un problème de santé publique a en partie porté ses fruits, puisque, suite à la mise en place du pictogramme et aux campagnes de communication qui l'ont accompagné, une étude de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) a montré que l'adhésion de la population aux messages de prévention avait progressé de 2004 à 2007, de même que le niveau d'information des femmes sur cette question. Le nombre de femmes enceintes déclarant avoir bu dans les sept derniers jours a fortement diminué, passant de 26,8 % en 2000 à 10,7 % en 2007. Toutefois, une étude sociologique récente a montré un degré encore trop élevé d'acceptabilité de la consommation d'alcool pendant la grossesse, chez les femmes non membres de professions de santé en particulier. Pour remédier à ce fait, il convient que les professionnels de santé au contact des femmes enceintes et de celles désirant une grossesse puissent se sentir légitimes pour délivrer le message de prévention opportun. À cette fin, le ministère chargé de la santé a réuni des pédiatres, alcoologues et professionnels de la grossesse pour concevoir un guide pratique en ce sens. Ce travail s'est, notamment, fondé sur l'expérience de santé communautaire développée à l'île de La Réunion. Une version synthétique de ce document, présenté le 1er avril 2009 à la Commission nationale de la naissance, pourrait être éditée courant 2011 par le ministère chargé de la santé et diffusée ensuite aux professionnels concernés. Il conviendra par ailleurs d'attendre les résultats de l'enquête nationale périnatale réalisée en mars 2010 qui devraient permettre de disposer de données sur la consommation (déclarée) d'alcool par les femmes enceintes et des extractions du baromètre santé 2010 de l'INPES sur ce groupe spécifique (nécessitant donc un traitement statistique particulier). Ceux-ci devraient être disponibles à la fin de 2011. Un meilleur état des connaissances permettra alors de renforcer si besoin la politique de prévention du SAF.

1 commentaire :

Le 21/01/2011 à 11:26, Selina Kyle (Fondatrice du GRENN) a dit :

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Monsieur Salles,

Contrairement à ce que vos propos suggèrent, la recherche scientifique n'a absolument pas démontré l'effet délétère d'une consommation d'alcool modérée durant la grossesse. Bien au contraire, dans l'étude récente dont je vous cite les références ci-dessous, les femmes, interrogées alors que leur enfant avait neuf mois, ayant bu de faibles quantités d'alcool alors qu'elles étaient enceintes ont eu des enfants ayant moins de problèmes comportementaux que les femmes qui s'étaient abstenues. Les enfants ont été suivis jusqu'à l'âge de 5 ans.

Une autre étude datant de 2008 était par ailleurs parvenue à la même conclusion, mais les enfants n'ayant été suivis que jusqu'à 3 ans, on redoutait de possibles effets différés.

L'interdiction qui est posée par le corps médical est davantage un principe de précaution lié au fait qu'il est éthiquement inconcevable de mener des expérimentations sur des femmes enceintes et qu'on ignore donc à partir de quelle dose cela devient problématique. Seraient également à prendre en considération les particularités morphologiques et métaboliques de chaque femme, le type d'alcool ingéré ainsi que le moment de sa consommation. Tout le monde consentira à reconnaître qu'on ne peut soumettre des foetus à un risque en demandant expressément à des femmes de se prêter à ce type d'expérience.

Plus problématique est selon moi la liste des interdictions posées aux femmes enceintes, qui s'allonge d'année en année sans que jamais on ne s'interroge ni sur leur validité, ni sur l'impact d'un changement d'habitudes alimentaires, ni sur les effets du sentiment de privation, ni sur les angoisses générées chez les futures mères, que par ailleurs on trouve trop sottes pour comprendre que le "zéro alcool" n'a pas de fondements scientifiques. La version officiellement soutenue par les professionnels de santé, c'est que si on leur permet de boire un peu, elles vont boire de manière déraisonnable. Parce qu'une femme, c'est insensé et que si on ne l'encadre pas fermement par des injonctions à faire ceci ou cela, en usant de la culpabilisation et de messages alarmistes tels que le vôtre, elle fait n'importe quoi. C'est une attitude paternaliste et infantilisante qui fait offense à l'intelligence des femmes et à leur souci du bien-être de l'enfant qu'elles portent.

De toutes manières, des femmes ayant un problème d'alcoolisme n'en guérissent pas grâce des interdictions formelles de boire. Il me semble au contraire qu'une diabolisation de l'alcool et qu'une stigmatisation extrême de ces femmes soit de nature à ne pas les inciter à consulter pour les aider à diminuer leur consommation.

C'est peut-être dur à admettre pour vous, mais la femme n'est pas qu'un utérus sur pattes censé pondre une progéniture dépourvue de tares. Sinon, pourquoi ne pas toutes les hospitaliser sous haute surveillance dès le début de la gestation. En les privant totalement de liberté, on réussira à obtenir de jolis poupons joufflus au QI acceptable, en minimisant les déficiences qui seraient générées par leur vilaine maman si on la laissait libre...

D'un point de vue éthique, le contrôle du corps des femmes enceintes à travers les interdictions alimentaires soulève bon nombre de questions... Je déplore qu'elles vous échappent.

http://www.ucl.ac.uk/news/news-articles/1010/10100602

http://news.doctissimo.fr/alcool-et-grossesse-vers-une-remise-en-cause-du-zero-alcool-_article7375.html

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