Madame la ministre, mes chers collègues, les franchises constituent une deuxième atteinte grave au principe de solidarité excellemment rappelé par notre collègue Valérie Fourneyron, la première étant la liberté tarifaire accordée au spécialiste dont le patient a le malheur de ne pas suivre le parcours de soins.
Et cette deuxième atteinte est portée sous le prétexte de responsabiliser le malade, alors que celui-ci n'a malheureusement que le droit d'être malade.
Certes vous prétendez plafonner aujourd'hui le dispositif – vous avez, madame la ministre, indiqué le montant de ce plafond pour l'année 2008. Mais nous savons bien qu'il ne restera pas en l'état, et que ces franchises sont appelées à augmenter considérablement, comme vous avez augmenté d'autres franchises, telle que la franchise sur la consultation du médecin traitant ou le forfait hospitalier en cas de pathologie grave.
Ce dispositif est en outre une hérésie en matière de santé publique. En effet les personnes pour qui ces franchises constituent un obstacle financier seront incitées à reculer le moment de recourir aux soins jusqu'à ce que leur pathologie s'aggrave.
Vous n'avez toujours pas d'ailleurs répondu à la question que vous ont posée M. Cahuzac, M. Préel et beaucoup d'entre nous : s'agit-il d'une recette pour permettre de mettre en place de nouvelles politiques en matière de santé ou d'une économie ?
J'ai été enfin pour ma part particulièrement choquée par l'habillage qui en a été fait. Le candidat Nicolas Sarkozy avait annoncé que la franchise était destinée à diminuer le déficit de la sécurité sociale. Cela ne rendait pas le dispositif moins inacceptable ; au moins avait-on le courage d'assumer la mesure.
Et puis le tollé général, jusque dans votre gouvernement – je pense en particulier au Haut-commissaire Martin Hirsch – vous a contraint à changer votre fusil d'épaule. On a alors prétendu que les franchises serviraient à financer des objectifs bien évidemment inattaquables tels que la lutte contre la maladie d'Alzheimer ou contre le cancer, ou une meilleure prise en charge des soins palliatifs. Je trouve inacceptable de faire ainsi appel à l'esprit de solidarité et à la générosité de nos concitoyens pour faire passer la pilule des franchises !
Et puis je ne résiste pas, à un moment où nous parlons des réformes des institutions, à l'envie de vous dire qu'affecter une recette est une mesure d'ancien régime : c'est la gabelle sanitaire…
Nous avons là un dispositif d'autant plus inique que le produit de ces franchises ne sera pas nécessairement consacré à lutter contre les maladies qui sont censées justifier leur institution. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)