Un mot d'abord pour souhaiter que nos débats se déroulent dans la sérénité. Ce sont tout de même les dispositions centrales du projet de loi, en tout cas celles qui ont attiré l'attention de tous, et on aimerait entendre des opinions sur les bancs de la majorité plutôt que des invectives. Nous pouvons ne pas partager les mêmes conceptions de la politique de la santé sans pour autant verser dans l'injure.
C'est donc le débat principal, madame, monsieur les ministres, puisque vous avez choisi, à la suite du Président de la République, de faire des franchises l'un des éléments essentiels pour tenter de retrouver la voie d'un meilleur équilibre de la sécurité sociale.
Sans reprendre ce qu'ont dit excellemment mes collègues il y a un instant, il me semble qu'avec cette mesure, c'est à un formidable retour en arrière que nous assistons. C'est assez contradictoire car vous nous avez présenté d'autres dispositions qui visaient à recrédibiliser, à restaurer le mécanisme même du médecin référent que la politique menée au cours des cinq dernières années avait eu pour objet de casser.
L'idée même de franchise va à l'encontre de l'idée d'un parcours de maîtrise médicalisée, de l'idée de la responsabilité du patient et du professionnel que, pourtant, vous cherchez à mettre en avant.
Il n'y a pas de responsabilité possible, en effet, puisque, pour qu'un patient puisse être jugé responsable au point de devoir contribuer financièrement à une dépense, il devrait être partie prenante dans sa maladie.
Or, comme on l'a déjà maintes fois expliqué, le patient ne décide évidemment pas de tomber malade. Vous allez donc pénaliser ceux qui précisément ne peuvent pas faire autrement que d'aller consulter un professionnel de santé.
Le terme même de franchise – je sais bien, madame la ministre, que ce n'est pas à vous qu'on le doit –, emprunté à l'assurance automobile, est éclairant : on doit pouvoir identifier une faute individuelle. Il ne s'agit pas tant de responsabilité que de comportement fautif. Poussant ce raisonnement jusqu'au bout, on devra considérer que le fait même de ne pas respecter des règles de prévention constitue une faute à l'origine de la maladie. Ainsi, entre autres exemples, le cancer du poumon du fumeur ou toute pathologie due à une addiction ne seraient plus demain pris en charge de la même manière ? Si tel est le cas, madame, il faut nous le dire clairement. Nous serions alors passés dans un autre système d'assurance sociale où les prestations ne sont plus fonction des besoins médicaux, mais des comportements passés. Une telle conception n'a absolument rien à voir avec notre système de santé.
J'ai déjà eu l'occasion d'indiquer que c'est le Président de la République qui a le premier, dès 2001, avancé cette idée de franchise. Ses déclarations montrent qu'il établit un lien direct entre le niveau du déficit et celui de la franchise, puisqu'il a à plusieurs reprises indiqué qu'une aggravation du déficit entraînerait l'augmentation de la franchise.
On voit bien qu'il y a là deux objectifs différents. D'un côté, soucieuse de nous rendre la mesure acceptable,…