Le groupe SRC souhaite interpeller Mme la ministre de la culture et de la communication, qui représente le Gouvernement sur nos bancs aujourd'hui, sur deux faits qui ont marqué ces dernières quarante-huit heures. Nos débats, en effet, ne portent pas seulement sur l'économie de l'audiovisuel : ils concernent également la liberté de la presse.
Le premier point, particulièrement préoccupant, est la procédure choquante dont a été victime l'un des anciens directeurs de la publication du journal Libération, M. Vittorio de Filippis. Depuis des jours, nous dénonçons les pratiques d'intimidation du pouvoir à l'égard de la presse, qui en viennent à créer un climat détestable, qu'il s'agisse de l'AFP ou des chaînes parlementaires que l'on menace de fusionner. Et tout l'enjeu du texte auquel nous nous opposons est la prise de contrôle de l'audiovisuel public, via notamment la nouvelle procédure de nomination et de révocation du président de France Télévisions.
Le traitement réservé à M. de Filippis n'est au fond que la conséquence mécanique du climat de chasse aux sorcières pesant sur les journalistes qui déplaisent au pouvoir. Dans ce contexte je souhaite, madame la ministre, vous faire part de notre grande surprise en entendant aujourd'hui même au Sénat Mme Rachida Dati, garde des sceaux, trouver la procédure visant M. de Filippis « tout à fait régulière ». Eu égard à ce qu'a subi M. de Filippis, cette déclaration vous paraît-elle normale dans un pays comme le nôtre en 2008 ?
Le second fait que je veux évoquer est « l'appel de la Colline » lancé aux Français – et au Gouvernement – en faveur de la liberté de la presse par Mediapart et l'association Reporters sans frontières, qui d'ordinaire mène ce genre de combat en dehors de nos frontières, mais qui se voit maintenant obligée de le faire sur notre territoire : la liberté de la presse, selon cet appel, suppose « le respect général du droit moral des journalistes sur leur travail […] ; le refus impératif du mélange des intérêts industriels et médiatiques, afin de garantir que les opérateurs économiques n'aient pas d'autre objectif que l'information ; la préservation absolue de l'intégrité du service public de l'audiovisuel, afin de garantir que ni ses informations ni ses programmes ne soient contrôlés par le pouvoir exécutif ». Le respect du pluralisme, ajoutent les signataires, passe par « une concentration limitée et régulée, de façon à éviter tout monopole de fait ou tout abus de position dominante ».
Je vous remercie, madame la ministre, de nous répondre sur le premier point et de nous faire part de votre sentiment sur cet appel qui, je l'espère, réveillera les consciences. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)