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Intervention de Yves Cochet

Réunion du 26 septembre 2007 à 15h00
Accord france-canada sur les champs d'hydrocarbures transfrontaliers — Question préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Cochet :

Ensuite, on a prétendu que le président irakien possédait des armes de destruction massive. Mais tous ces arguments n'ont pas tenu bien longtemps. En fait, comme le disait la semaine dernière Alan Greenspan, dont la lucidité est bien connue, les Américains ont envahi l'Irak parce qu'on y trouve du pétrole – qui plus est à bas coût d'extraction. On peut toujours explorer les bassins sédimentaires à la recherche de gisements, mais le pétrole polaire ou off shore, les huiles lourdes de l'Orénoque, les sables bitumeux de l'Athabasca, au Canada, tout cela coûte cher à extraire et réclame de gros investissements énergétiques et financiers. Le pétrole à bas coût d'extraction, c'est sur les rives de la Caspienne et autour du Golfe persique qu'on le trouve. Là se trouvent les trois quarts des réserves mondiales de pétrole bon marché. Grattez le sable de la Mésopotamie, il en jaillit aussitôt. Comme les Américains le reconnaissent ouvertement maintenant, ce n'est pas le sort des Irakiens qui leur importait : ils en ont tué par centaines de milliers. Le million de morts depuis 1991 compte pour du beurre. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Non, leur vision de l'Irak, c'est un immense camp militaire américain assis sur une immense accumulation de pétrole. Voilà ce qui les intéressait. D'ailleurs, Dick Cheney et George Bush, eux-mêmes magnats du secteur, ne s'y sont pas trompés : ils connaissent l'odeur du fric et du pétrole.

Bref, pour résumer, d'un point de vue géostratégique, le pétrole, c'est la guerre. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Là où il y a du pétrole, il y a la guerre, comme on le voit en Asie mineure.

La Chine, elle, ne s'approvisionne pas sur les marchés spot, que ce soit à Rotterdam ou ailleurs, préférant les contrats directs, comme pour le charbon et le gaz. Elle s'adresse à Hugo Chavez, aux Qataris, aux Iraniens, et conclut des contrats de dix, vingt ou trente ans, pour lesquels sont investis des milliards de dollars. Elle anticipe les évolutions futures. La semaine dernière, en Irlande, j'ai rencontré des Chinois qui, faisant allusion aux vastes réserves de charbon que possède leur pays, affirmaient que celui-ci pourrait toujours, en cas de pénurie de pétrole, produire du gaz liquide ou même du charbon liquide – plus exactement, du CTL, coal to liquid, issu de la liquéfaction du charbon. Mais en réalité, même la Chine abandonne cette technique, qui coûte très cher et est fortement émettrice de gaz à effet de serre. Cette voie ne mènerait qu'à une catastrophe économique et environnementale.

Comme dirait M. de la Palice, le gaz est gazeux et le charbon, solide ; malheureusement, ce qui compte, c'est l'énergie sous forme liquide. La solution n'est certes pas le « pétrole vert » inventé il y a deux ans par M. de Villepin. Quel aveuglement ! En Europe, où l'on a trop d'essence et pas assez de diesel, il ne faut surtout pas produire de l'éthanol. Quitte à produire des agrocarburants, il aurait mieux valu s'orienter vers la production d'huile. Mais il n'est certes pas étonnant que les lobbies des betteraviers et céréaliers, grands amis de l'UMP, aient fait pencher la balance vers l'un plutôt que l'autre.

Dans ce contexte mondial, que peut-on faire pour protéger notre pays et l'Europe ? Une partie de mes amis – voyez comme je peux faire preuve d'autocritique à l'égard de mon propre camp – appelle à développer les énergies renouvelables mais, en voulant remplacer une offre déclinante par une nouvelle offre, ils restent dans le fantasme productiviste. Il faut tenir compte du potentiel des renouvelables : si je ne les ai même pas cités dans la composition de la production énergétique mondiale, c'est qu'ils représentent moins de 0,5 % ! J'adore les éoliennes, l'énergie solaire, le photovoltaïque. Mais il aura fallu développer tout cela il y a trente ans ! Nous ne pouvons plus rêver à ce que sera le monde en 2030, car le compte à rebours a commencé. Par conséquent, il faut…

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