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Intervention de Jean-Paul Lecoq

Réunion du 26 septembre 2007 à 15h00
Application de l'article 65 de la convention sur les brevets européens — Exception d'irrecevabilité

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

Ainsi, à tout concurrent français, les plus puissantes firmes américaines, japonaises et autres, pourraient opposer légalement en anglais non seulement une description de leurs brevets, mais aussi les revendications dont il s'assortit, lesquelles peuvent être modifiées à tout moment, selon la Convention sur le brevet européen révisée en 2000.

En cas de litige devant nos tribunaux, certes, il y aura une traduction, mais la force légale découlera de la langue originale dans laquelle le brevet a été déposé, c'est-à-dire, l'anglais. Nous connaissons tous suffisamment les différences de fond et de forme qui existent entre le système juridique anglo-saxon et notre tradition et système juridique. Le juge français ne serait-il pas obligé de parler, lire, écrire et faire son raisonnement juridique suivant la structure du droit anglo-saxon ?

Je me pencherai aussi sur la menace qui pèse sur le pluralisme, la diversité culturelle et la diversité des langues et des traditions des peuples européens.

Je ne peux éviter de mentionner brièvement le contexte dans lequel ce projet nous est soumis à approbation.

La mondialisation pousse, en effet, à l'uniformisation des comportements et des modes de vie, de visions, d'opinions, de points de vue. Cette uniformisation est la conséquence logique de la soumission des peuples et pratiquement de toute la planète aux lois du marché, seule référence possible, qui est présentée comme inéluctable.

L'enjeu que pose ce projet de loi est de taille : il ne s'agit ni plus ni moins que de la préservation et de la promotion de la diversité culturelle, de la diversité des langues, de la pluralité des traditions historiques, de la diversité de systèmes juridiques, toutes ces catégories correspondant à une exigence politique essentielle, puisqu'elle conditionne le pluralisme de l'expression des idées.

La tendance à nier le et les pluralismes est encore plus affirmée si l'on tient compte du fait que l'Acte portant révision de la Convention européenne sur la délivrance de brevets européens s'aligne sur l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce – ADPIC – de l'Organisation mondiale du commerce. Cet accord est l'un des outils pour faire de la terre une marchandise. Son objectif est de parvenir à l'harmonisation des différents droits nationaux ou régionaux, comme le brevet européen, relatifs à la propriété intellectuelle etou industrielle.

La mondialisation libérale et son cadre juridique international menacent les identités culturelles et ils manifestent une tendance généralisée en vue d'engendrer une standardisation culturelle.

Il ne s'agit pas de nier l'existence des valeurs et des références communes à l'ensemble de l'humanité, y compris à l'Europe. Néanmoins, le fait de partager des valeurs communes n'est pas synonyme d'effacer les spécificités léguées par le temps, de laisser de côté les identités et la diversité des cultures.

Nous ne pouvons pas banaliser le traitement de la culture et du pluralisme, lesquels sont clairement menacés par ce projet.

Dans le cas de notre langue, elle n'est pas seulement un moyen de communication pour tous ceux et celles qui résident dans notre pays et dans d'autres continents. Notre langue est le moyen par lequel nous gardons et nous transmettons nos valeurs de solidarité, d'accueil – même si ces valeurs sont fortement remises en cause aujourd'hui –, de respect des droits humains, de respect du droit international, et surtout, par notre langue, nous gardons intact aussi notre tradition révolutionnaire, qui tant d'espoirs a engendrés dans le monde entier et, en particulier, aux peuples opprimés.

Mais nous savons aussi que la langue peut constituer un outil, un instrument de domination et d'hégémonie.

Dans le contexte actuel de la mondialisation libérale, cette affirmation se révèle vraie en ce qui concerne l'anglais et le système juridique anglo-saxon, d'origine essentiellement nord-américaine.

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