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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 10 décembre 2008 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2008 — Article 38, amendement 234

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

Voter les alinéas 1 et 2 de l'article 38 reviendrait à signer un chèque en blanc au Gouvernement pour qu'il déréglemente par simple arrêté ministériel une activité professionnelle sensible. En règle générale, je n'aime guère les chèques en blanc, encore moins quand ils sont donnés au Gouvernement.

Ces alinéas concernent les fabricants et les marchands d'or, d'argent et de platine, et toutes les personnes qui détiennent des matières et ouvrages en métaux précieux pour l'exercice de leur profession. Elles doivent tenir un registre de leurs achats, ventes, réceptions et livraisons, pour les transactions d'un montant égal ou supérieur à 15 000 euros. Ce registre doit être présenté à l'autorité publique à toute réquisition et mentionner l'identité des parties aux transactions sur ces métaux précieux. L'exposé des motifs de ces deux alinéas indique de manière aussi benoîte qu'elliptique que « ces allégements devraient être définis ultérieurement après concertation avec les représentants des organisations professionnelles concernées ». On admirera l'emploi prudent du conditionnel.

Notre rapporteur général, l'excellent Gilles Carrez, ne s'est pas contenté de ce qu'on hésite à désigner comme des informations et s'en est allé à la pêche aux précisions. Selon celles qu'il a recueillies avec beaucoup de difficultés, « il s'agit d'alléger les procédures pour les professionnels limitant leur activité aux ouvrages en plaqué de métal précieux. La DGDDI est notamment favorable à une dispense de l'inscription des ouvrages en plaqué qui ne sont pas marqués du poinçon de garantie. »

Nous ne sommes donc guère plus avancés et ces objets, bien que plaqués, ne sont concernés par la législation actuelle que s'ils sont d'un prix égal ou supérieur à 15 000 euros, somme déjà considérable. On peut craindre que la déréglementation ait pour conséquence de favoriser des trafics, les métaux précieux devenant une valeur refuge par ces temps de crise et d'extrême volatilité boursière. On sait que les trafics de métaux précieux sont déjà nombreux, en particulier dans nos banlieues. Si la législation actuelle ne s'applique que pour un prix égal ou supérieur à 15 000 euros, il suffit de fixer son prix à 14 995 euros pour y échapper : comme pour les surfaces commerciales, on sait comment procéder.

Nous proposons donc de supprimer ces alinéas, car, si le besoin de légiférer en la matière se faisait vraiment sentir, il faudrait que les termes en soient établis et que la concertation qu'on nous annonce ait eu lieu pour que nous puissions nous déterminer en connaissance de cause. Vraiment, je me demande quelle mouche a pu piquer le Gouvernement pour qu'il nous demande un chèque en blanc sur un sujet aussi sensible. On sait pourtant que, dans ce domaine, la morale n'est que rarement au rendez-vous, sauf pour les meilleurs professionnels, et que les trafics de toute sorte se donnent libre cours, y compris sur notre territoire national. Voter le texte du Gouvernement, c'est encourager la fraude, le vol et la corruption.

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