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Intervention de Axel Poniatowski

Réunion du 10 décembre 2008 à 15h00
Déclaration du gouvernement préalable au conseil européen

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAxel Poniatowski :

, président de la commission des affaires étrangères. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la présidence française de l'Union européenne aura été un exercice de haute politique.

La gestion des crises restera l'aspect le plus emblématique de cette présidence mais, à deux jours du Conseil européen, l'heure est celle du bilan : il s'agit d'évaluer les résultats par rapport aux ambitions fixées.

Dans le domaine de l'asile et de l'immigration, les objectifs ont été atteints, en particulier avec l'adoption du pacte ad hoc par les vingt-sept, les 15 et 16 octobre derniers.

S'agissant de la politique agricole commune, un bon accord a été obtenu au terme de discussions parfois difficiles.

Dans le domaine de la défense, des progrès importants ont été accomplis, tant sur la stratégie qu'en termes de programmes opérationnels même s'il reste encore beaucoup à faire.

Le quatrième point est plus délicat. Au sein du « paquet énergie-climat », des avancées ont été enregistrées, qui contribuent à façonner une future Europe de l'énergie. Dans la lutte contre le changement climatique, il faut encore discuter avec ceux de nos partenaires d'Europe centrale et orientale qui produisent du charbon, afin de sceller un accord qui soit à la hauteur de l'enjeu.

Sur des sujets cruciaux pour l'avenir de la construction européenne, il y a donc tout lieu de saluer les résultats obtenus, alors que la France n'avait pas fait le choix de la facilité.

Au-delà de ce bilan, nous avons déjà eu l'occasion de saluer la conduite exemplaire de la présidence de l'Union, et je pense évidemment à la crise russo-géorgienne survenue cet été et à la crise bancaire et financière, qui a atteint cet automne sa phase la plus aiguë, mais je voudrais porter mon regard vers l'avenir.

Mes chers collègues, les événements exceptionnels auxquels nous avons été confrontés ont justifié un fonctionnement institutionnel de l'Union lui-même exceptionnel, mais peut-on pour autant revenir au statu quo ante comme si de rien n'était ? Je ne le pense pas.

Le premier enseignement à tirer de ces épisodes, c'est que l'Europe, quand elle le veut, sait être politique. Il n'est pas anodin de souligner que, lors des deux crises de ce semestre, c'est elle qui a été à la manoeuvre alors que les États-Unis se faisaient discrets. Le poids de l'Europe est devenu incontestable, et il fallait une volonté politique pour mettre l'Union en mouvement. Nicolas Sarkozy a incarné cette volonté.

Le second enseignement à tirer, c'est un rééquilibrage manifeste entre l'intergouvernemental et le communautaire. Qu'il s'agisse du Conseil de l'Union européenne, du Conseil européen, de l'Eurogroupe, ou de formats innovants tels que le G 4 ou le G 20, les exemples abondent de la réactivité et de l'efficacité coordonnée des États. J'y vois l'illustration évidente du fait que nous formons, à vingt-sept, cette « Union d'États souverains » qui est la caractéristique originale de l'Union européenne.

En revanche, les organes proprement communautaires se sont davantage trouvés en situation de répondre aux initiatives des États plutôt que de prendre eux-mêmes l'initiative. Je pense en particulier à la Commission européenne. Au plus fort de la crise, elle s'est contentée d'admettre que les règles communautaires pouvaient être quelque peu assouplies, mais, alors que le danger d'une faillite globale du système s'est éloigné, elle a freiné la mise en oeuvre des décisions des États pour garantir le rôle des banques dans le financement de l'économie. Il faut désormais, à la lumière de cet épisode, que le Conseil européen fasse entendre à la Commission qu'elle doit être plus réactive.

Dès lors, permettez-moi de formuler deux recommandations pour le proche avenir de l'Union.

En premier lieu, les avancées en matière de représentation extérieure de l'Union contenues dans le traité de Lisbonne sont plus que jamais nécessaires. Nous avons besoin d'une présidence stable du Conseil européen, incarnée par une personnalité de premier plan. Nous avons besoin d'un Haut représentant pour les affaires étrangères qui soit à même de jouer un rôle actif, en s'appuyant sur un service européen d'action extérieure qui combine les forces de la Commission et celles des États membres. Il faut donc souhaiter qu'à défaut d'une entrée en vigueur du Traité avant le renouvellement du Parlement et de la Commission en 2009, une perspective claire soit tracée dans les plus brefs délais.

En second lieu, je me réjouis que le thème de l'Europe dans le monde soit l'une des trois priorités de la présidence tchèque, et la France l'appuiera naturellement dans le cadre de la troïka, mais faire exister l'Union européenne sur la scène internationale est autre chose que faire progresser pendant six mois le consensus à vingt-sept sur les dossiers d'intérêt communautaire du moment. C'est pourquoi je préconise un engagement à la fois simple et éloquent : que la future Commission européenne désignée en 2009 le soit dans une composition entièrement nouvelle. Elle sera ainsi le sang neuf de la machine communautaire.

Les crises de ce semestre ont démontré avec plus d'évidence que tous les discours combien l'Europe, une Europe politique, était indispensable, au sein de ses frontières et pour le monde. La cause européenne aura, comme jamais auparavant, progressé dans l'opinion publique.

Monsieur le secrétaire d'État chargé des affaires européennes, cher Jean-Pierre Jouyet, vous y avez pris une part essentielle, non seulement depuis juillet dernier, mais au cours des dix-huit mois qui viennent de s'écouler. La commission des affaires étrangères a eu l'occasion, la semaine dernière, de vous féliciter pour votre action. Je suis heureux de vous redire, dans le cadre solennel de cet hémicycle, combien nous avons apprécié votre implication et votre honnêteté intellectuelle. Vous le savez, tous nos voeux de succès vous accompagnent dans l'accomplissement de votre nouvelle mission à la tête de l'Autorité des marchés financiers. Bonne chance et merci. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

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