Une critique tout d'abord sur la méthode. Alors même que ce texte était très important, il a été examiné, après déclaration d'urgence, fin juillet et début août – quasiment la nuit du 4 août – dans des conditions de travail qui resteront dans les annales de la mauvaise façon de légiférer. Du reste, d'autres textes nous ont été soumis dans les mêmes conditions au cours de cette session extraordinaire : il s'agissait de faire vite pour essayer que personne ne s'aperçoive de rien. Du coup, il a fallu bricoler.
Nous sommes pour la paix sociale. Mais celle-ci suppose un dialogue social de qualité. Ce dernier n'est malheureusement pas au rendez-vous dans ce texte de toutes les illusions et de toutes les provocations. En effet, contrairement à ce qui avait été promis, il ne garantit aucunement un service minimum puisque c'est en fonction du nombre de grévistes et de non-grévistes disponibles dans l'entreprise – cela ne s'exprimera pas cependant site par site – que pourra être mise en oeuvre une réponse alternative à une perturbation liée à la grève.
En revanche, il porte gravement atteinte au droit de grève. Vous avez laissé croire à nos concitoyens que les perturbations du trafic sont liées aux grèves alors que moins de 3 % d'entre elles leur sont imputables. Mais crier haro sur les grévistes et les stigmatiser vous évite de traiter les vrais problèmes comme le manque d'investissements dans les infrastructures et les matériels, et dans la maintenance. Pénaliser jusqu'au licenciement – Jean-Yves Le Bouillonnec l'a parfaitement démontré – le salarié qui aura oublié de prévenir son employeur 48 heures avant de faire grève témoigne bien de votre volonté de limiter la liberté fondamentale de faire grève. Et que dire de l'instauration d'un fichier des grévistes et de toutes les autres manoeuvres d'intimidation, comme l'organisation d'un référendum après huit jours de grève ? Tout montre que vous voulez porter une atteinte frontale et définitive au droit de grève.
Votre texte fait également reculer le dialogue social. À tous les étages du projet, vous avez rappelé l'échéance du 1er janvier 2008. Le décret tombera à cette date et plus jamais des accords comme ceux d'alarme sociale qui ont fait la preuve de leur efficacité à la RATP et à la SNCF ne pourront être signés. L'obligation de signer avant le 1er janvier 2008 les avenants, y compris pour valider les accords préétablis par la négociation des partenaires sociaux, constitue une atteinte très grave au dialogue social. Tout le travail de négociation et de discussion effectué en amont peut ainsi être mis à mal parce que les avenants n'auront pas été signés avant le 1er janvier 2008.