Madame la ministre de la culture et de la communication, le cinéma constitue un aspect très marquant de la politique culturelle en général et de la politique culturelle de la ville de Montreuil en particulier, si l'on en juge par une fréquentation importante – plus de 200 000 spectateurs par an depuis 2004 –, par la programmation de ses cinémas « art et essai », mais aussi par la présence de nombreux professionnels du septième art dans la ville – autant d'éléments qui contribuent au rayonnement du cinéma.
En portant le cinéma municipal Méliès de trois à six salles – soit 1 120 places – dotées des dernières technologies numériques, la ville espère poursuivre le développement de son cinéma municipal d'art et essai. Parce qu'elle est fière de son lien historique avec le cinéma – j'ignore si vous le savez, madame la ministre, mais c'est à Montreuil que fut réalisé par Georges Méliès, en 1895, nous n'étions nés ni l'un ni l'autre, le premier studio de cinéma du monde –, la ville entend, par ce transfert et cet agrandissement, accorder toute sa place à cette pratique culturelle.
Au coeur de ce projet culturel et politique, s'affirme la conviction qu'il est possible et important de défendre un cinéma de proximité de grande qualité dans une commune populaire de la première couronne.
Pour ce complexe art et essai, la ville de Montreuil entend fermement conserver les trois labels attribués par le CNC, qui distingue aujourd'hui le travail du cinéma Méliès en direction du « jeune public », tout comme sa valorisation du cinéma de « recherche » et de « découverte », de « répertoire » et de « patrimoine ». Le passage de trois à six salles permettra d'amplifier cet effort en corrigeant les principaux défauts de la programmation actuelle. En s'engageant à ne pas projeter plus de films qu'aujourd'hui – puisque c'est l'objet d'une critique de la part des marchands de pop-corn –, mais à mieux les exposer, c'est-à-dire plus souvent et plus longtemps, le Méliès veut lutter, à sa manière, contre la rotation accélérée des films qui favorise la fréquentation d'impulsion provoquée par le marketing et la communication des grands médias, au détriment du bouche à oreille et du cinéma le plus exigeant.
Parallèlement, la ville et le ministère de l'éducation nationale mettent en place, dans l'un des lycées de la commune, une section cinéma afin de développer l'accès au septième art et l'éducation à l'image. Cette filière cinéma permettra, entre autres, de mettre à profit et en valeur les professionnels du spectacle montreuillois travaillant dans les milieux du cinéma.
Aujourd'hui, le projet de transfert du Méliès et son extension sont menacés par un recours du groupe UGC, qui possédait ces cinémas jusqu'en 1986 – c'est intéressant pour la petite histoire – et qui les a fermés – je vous le donne en mille – parce qu'ils ne rapportaient pas assez. Heureusement, la ville les a rachetés et leur a donné le rayonnement qu'on leur connaît aujourd'hui. UGC, rejoint par le groupe MK2, s'oppose à la décision favorable unanime de la Commission départementale d'équipement cinématographique pour la réalisation des six salles en question. Ainsi, le groupe MK2, qui voulait, paraît-il, « faire du cinéma autrement », fait aujourd'hui alliance avec UGC et sombre dans la commercialisation des produits dérivés, indépendamment des films projetés.
Je souhaite donc que soit affirmée, madame la ministre, une position de l'État de nature à permettre à Montreuil de surmonter cette embûche, fruit de considérations mercantiles face à l'ambition culturelle de la ville.