…qui sont, d'une part, des missions de sécurité intérieure et, d'autre part, des missions liées aux activités du ministère de la défense, comme l'intervention en opérations extérieures ou la sécurité nucléaire.
Je tiens toutefois à lever toute ambiguïté : nous ne sommes absolument pas opposés au principe de la réforme ni à la volonté du Président de la République de rendre plus cohérent et plus efficace notre dispositif de sécurité intérieure. Nous le sommes d'autant moins que le texte législatif organisant la gendarmerie date de plus de deux cents ans et le décret de plus de cent ans ! Une adaptation de ce cadre aux réalités actuelles semble donc parfaitement justifiée, le monde actuel étant évidemment bien différent de celui de 1798 !
De plus, la révision générale des politiques publiques a mis sur les rails une réorganisation difficile mais inévitable et, finalement, bénéfique de la carte militaire. Les finances de l'État nécessitaient une réorganisation en profondeur de la présence de nos forces sur le territoire national. Monsieur le ministre de la défense, il est donc, pour nous, naturel de soutenir cette réforme, la gendarmerie et la sécurité intérieure ne pouvant rester à l'écart d'une telle ambition.
Dans un souci d'efficacité accrue à coût réduit, le principe de mutualisation de certaines fonctions nous paraît tout à fait pertinent pour les domaines communs aux deux forces. Sans me livrer à un inventaire, je noterai, par exemple, que les commandes groupées d'armes de poings, qui sont les mêmes pour les deux corps, ne posent à ces derniers aucun problème, bien au contraire ! De tels ajustements, ou d'autres encore, sont donc les bienvenus. Ils existent déjà et il convient de les encourager.
Comment oublier, par ailleurs, que le chevauchement de certaines missions nourrit un certain flou qui nuit parfois à l'efficacité de l'action ? Afin de remédier à ce problème, j'avais proposé, pour une meilleure clarification et une plus grande efficacité, que les missions de secours en zones montagneuses soient, par exemple, confiées exclusivement à la gendarmerie puisque ces zones relèvent de la zone de gendarmerie – j'y reviendrai lors de l'examen des amendements.
Enfin, comme je l'ai déjà souligné, il est important d'examiner et de voter cette loi puisque la réforme a déjà été engagée depuis plusieurs mois, ce qui entraîne une insécurité juridique préjudiciable aux deux corps.
Le texte, que le Sénat – il convient de le reconnaître – a amélioré par voie d'amendements, rappelle à juste titre la nécessité de sauvegarder des missions importantes pour la gendarmerie nationale, comme celle de police judiciaire, aussi importante au demeurant pour la justice que pour la gendarmerie. Quant à l'abandon de la désuète procédure de réquisition, il nous paraît une véritable avancée, permettant d'adapter les textes aux besoins actuels.
Nous soutenons donc l'idée de la réforme, messieurs les ministres. Toutefois, le transfert total de la gendarmerie de la défense à l'intérieur était-il vraiment la seule solution ?
En effet, pour partager des missions de sécurité intérieure avec la police nationale, la gendarmerie n'en couvre pas moins, comme je l'ai rappelé, des missions qui lui sont propres. Son spectre est très large et il ne saurait être question de la réduire à la gendarmerie départementale. Elle est extrêmement diverse dans ses composantes : on pense immédiatement au GIGN ou à la Garde républicaine, mais on aurait tort d'oublier la gendarmerie mobile, l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale, les pelotons de gendarmerie de montagne et de haute montagne, les brigades nautiques et fluviales, la section aérienne et le détachement aérien, le groupe d'investigation cynophile, le groupe spéléologique ou encore la gendarmerie des transports aériens, de l'armement ou de la sécurité des armements nucléaires.
Une telle diversité de composantes correspond à une réelle diversité de missions, dont certaines sont assurées exclusivement par des gendarmes. Que se passera-t-il, dans certaines zones rurales et dans certains départements et territoires d'outre-mer, si le caractère militaire de la gendarmerie disparaît ?
En effet, en cas de disparition des obligations liées au statut militaire, des pans entiers du territoire métropolitain et ultramarin risqueraient de ne plus être couverts par une force capable d'assurer leur sécurité. La mission d'aménagement et de protection du territoire est essentielle pour la gendarmerie, qui est présente sur 95 % de notre territoire et touche 50 % de notre population. Cette proximité est essentielle à l'égalité d'accès de tous à la sécurité : or c'est bien le statut militaire, avec ses règles différentes de celles de la police, qui garantit cette présence équilibrée et permanente sur l'ensemble du territoire. Cette disponibilité fait sa force, et il y a fort à parier que le rapprochement se révélera, pour des questions de statut, de processus hiérarchique ou de grades, très complexe et, in fine, difficile à gérer.