Je tiens tout d'abord à vous dire toute ma satisfaction de voir enfin aborder le titre II de ce texte, à l'intitulé si noble : « Accès de tous à des soins de qualité ». J'espère en effet que ce projet permettra d'améliorer l'accès aux soins de nos concitoyens.
L'article 14 répond à une attente et à une nécessité : définir les soins de premier recours et les missions du médecin généraliste de premier recours. Cette définition reconnaît le rôle pivot et essentiel du médecin généraliste dans l'offre de soins ; elle participe ainsi à la nécessaire revalorisation de ce métier.
Nous devons en effet faire face à une désaffection de la médecine générale par les étudiants et à une lassitude de ceux qui l'exercent. Il nous faut réagir, et vite. Sur nos territoires ruraux, 40 % des généralistes ont plus de cinquante-cinq ans. Après une carrière fatigante impliquant d'importantes responsabilités et des horaires très lourds, ils n'aspirent qu'à prendre leur retraite, mais auront du mal à trouver un successeur, car nos jeunes étudiants n'ont plus guère envie de s'engager dans cette voie.
Il est très inquiétant de constater que même ceux qui ont suivi cette spécialité font tout, à l'issue de leurs études, pour ne pas l'exercer. 40 % des médecins généralistes libéraux n'exercent pas la médecine générale de premier recours mais choisissent des MEP – modes d'exercices particuliers – comme l'acuponcture ou l'homéopathie. Certains ont des compétences particulières, comme l'allergologie ou la gynéco médicale, et, de ce fait, ne participent pas à la permanence des soins.
Pour lutter contre cette fâcheuse tendance, j'ai déposé un amendement suggérant qu'à l'issue de leurs études les jeunes médecins soient tenus d'exercer la médecine générale de premier recours pendant au moins cinq ans avant de prendre une autre orientation. C'est l'une des propositions de la mission d'information sur l'offre de soins qui a été adoptée à l'unanimité par la commission des affaires sociales.
Il faut donc rendre cette discipline plus attractive et lui permettre de s'adapter aux attentes des jeunes générations en favorisant moins leur installation que leurs conditions d'exercice. Le projet de loi esquisse plusieurs pistes allant dans le bon sens : la coopération avec les paramédicaux, le décloisonnement des barrières entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social, les structures collectives. Je suis d'ailleurs heureux que la commission ait accepté mes amendements renforçant le rôle et la place des centres de santé, lesquels pallient utilement le déficit de l'offre libérale dans bien des territoires, notamment dans certains quartiers des zones urbaines sensibles.
Le texte favorise également la collaboration entre les médecins libéraux et les hôpitaux locaux, et cela va aussi dans le bon sens.
Mais il faut aller plus loin dans l'offre de statuts alternatifs, développer le salariat, l'exercice en cabinet satellite et le statut de collaborateur. Toutes ces mesures sont contenues dans ce que j'appelle « les pôles de santé », qui doivent être favorisés lorsqu'ils sont porteurs d'un véritable projet médical pour le territoire dans lequel ils s'inscrivent. Ces pôles doivent structurer le maillage de l'offre de soins de premier recours à l'échelle du bassin de vie, réalité géographique en l'occurrence plus pertinente que le canton dont parlait à l'instant M. Préel.
Les pôles de santé doivent regrouper autour des hôpitaux locaux, des maisons de santé pluridisciplinaires, des structures médico-sociales et des cabinets satellites capables de répondre aux besoins de santé des patients éloignés du centre de territoire. Ils doivent assumer des missions de santé publique, notamment en matière de prévention ou de suivi des maladies chroniques, tout comme ils doivent jouer le rôle d'une instance médico-sociale en matière par exemple de protection maternelle infantile ou dans la gestion des troubles liés aux addictions.
Si tout notre territoire était organisé ainsi, nous ferions un grand pas vers l'égal accès de tous aux soins de premier recours, lequel n'est à l'heure actuelle pas garanti sur notre territoire.
L'article L. 1411-11 créé par ce texte évoque « le respect des exigences de proximité ». Pour que cela ne reste pas un voeu pieux, il faut définir des critères et des normes, ce que ne fait pas suffisamment le projet de loi. Ne laissons pas échapper la chance qui nous est offerte ! Si nous ne prenons pas des dispositions plus contraignantes, nous allons vers une aggravation de la situation. Les déserts médicaux vont se multiplier et s'étendre. Je compte sur vous, madame la ministre, et sur vous, mes chers collègues, pour que ne rations pas ce rendez-vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)