Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, un mot d'abord pour saluer l'intervention de M. Loncle : je souscris pleinement à ses propos et partage les réserves qu'il a exprimées.
Ce projet de loi revêt une importance toute particulière. En effet, il s'agit d'offrir aux 47 États membres du Conseil de l'Europe, les outils nécessaires pour faire face aux nouvelles menaces terroristes. Le Conseil de l'Europe porte une attention très vive à ce sujet depuis longtemps. La convention européenne pour la répression du terrorisme de 1977 conjugue avec équilibre les impératifs de la lutte contre le terrorisme et la protection des droits de l'homme. Elle laisse ainsi aux États membres une appréciation assez large dans la qualification des infractions commises. C'est pourquoi, l'usage de la catégorie des infractions dites « politiques » est courant et permet souvent de se soustraire à toute procédure d'extradition. Si ce principe est sain dans certaines circonstances, force est de constater que les temps ont changé. Depuis la chute du mur de Berlin et la disparition du bloc soviétique, les mouvances terroristes ont pris une ampleur parfois insoupçonnée. Souvenons-nous de l'attentat dans le métro parisien en 1995. Souvenons nous aussi de la force destructrice inouïe de l'attaque des tours jumelles à New York, le 11 septembre 2001. Peu de temps après, de nouveaux attentats ont frappé Londres, Madrid et d'autres pays encore.
Dans ce contexte, le droit international a dû s'adapter, mais il faut le reconnaître, pas toujours de manière très pertinente. Toutefois, dans le domaine judiciaire, une réelle volonté d'améliorer la coopération internationale s'est imposée. C'est justement cet aspect qu'il nous est demandé de favoriser aujourd'hui. La ratification du présent protocole amendant la convention de 1977 est une absolue nécessité pour renforcer la coopération judiciaire entre les États membres du Conseil de l'Europe, notamment en matière d'extradition. Trop souvent, en effet, les terroristes se cachent derrière des motifs politiques ou sont protégés par des États peu scrupuleux utilisant ces mêmes motifs. Or, nous devons toujours veiller à examiner la nature de l'acte commis et non les motifs fabriqués après-coup. Les déclarations sont une chose, la nature de l'acte en est une autre. Les victimes et les familles des victimes des attentats de Paris, de Londres ou encore de Madrid en savent malheureusement quelque chose.
Il ne s'agit cependant pas de porter atteinte aux droits de l'homme et de « dépolitiser » toutes les infractions. Comme vous le savez, et comme je le mesure moi-même en tant que président de la délégation française à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, le souci des droits de l'homme est au coeur des travaux de cette institution. Mais protéger les droits de l'homme ne signifie pas pour autant protéger abusivement les responsables d'attentats.
Aussi ne puis-je que saluer la pertinence des travaux du Conseil de l'Europe qui ont permis d'apporter une réponse des plus judicieuses à ce problème. Ils ont conduit à actualiser la convention en prenant appui sur les conventions signées dans le cadre des Nations unies et, de ce fait, reconnues par la communauté internationale. Ils ont contribué à assouplir la procédure d'amendement de la convention afin de lui permettre de s'adapter aux évolutions rapides des menaces terroristes. En outre, ils autorisent les États ayant le statut d'observateur auprès du Conseil de l'Europe à adhérer à cette convention. Enfin, ils prévoient un mécanisme de suivi pour assurer une application efficace du texte.
Vous le comprendrez donc aisément, chers collègues, je ne peux que vous appeler à voter en faveur de ce projet de loi, afin que la France montre clairement son attachement à la coopération judiciaire internationale et européenne, sa détermination à lutter contre les auteurs des actes terroristes et son attachement aux valeurs qui ont fait le Conseil de l'Europe, la plus ancienne des institutions paneuropéennes, que la France a contribué à créer. Nous avons toute notre place dans cette noble instance et nous nous devons de nous montrer exemplaires, afin de convaincre les nouveaux pays ayant rejoint le Conseil de l'Europe de ratifier de nouveaux protocoles. C'est une telle occasion qui nous est offerte ce soir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)