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Intervention de Axel Poniatowski

Réunion du 9 octobre 2007 à 15h00
Accords france-Émirats arabes unis relatifs au musée universel d'abou dabi — Discussion d'un projet de loi adopté par le sénat

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAxel Poniatowski, président de la commission des affaires étrangères :

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la création d'un musée universel à Abou Dabi représente une chance pour notre politique culturelle et l'ensemble de nos musées. Ce projet exceptionnel, qui garantit l'intervention pendant trente ans de nos meilleurs experts, apportera une ressource financière d'environ un milliard d'euros qui permettra le développement et le financement sur notre territoire de nouvelles actions culturelles.

Ce projet a déclenché de très vives critiques et de violentes réactions qui, je dois vous l'avouer, suscitent de ma part une certaine incompréhension. En effet, la création d'un musée universel à Abou Dabi ne se fait pas au détriment du public français ; elle ne fait peser aucune menace sur la sécurité des oeuvres de nos musées ; elle est suffisamment encadrée pour garantir que le nom du Louvre ne soit pas associé à une institution à l'ambition culturelle défaillante. Aussi, afin d'apaiser les dernières inquiétudes, je souhaite revenir sur certains points des accords du 6 mars 2007.

Pour commencer, la création du Louvre d'Abou Dabi contribuera à renforcer l'influence de la culture et de la langue françaises dans le monde. Ce musée sera réalisé conformément aux conceptions françaises et les oeuvres exposées seront issues des collections de tous les musées français.

Le musée universel sera par ailleurs un moyen pour des artistes français de faire connaître plus largement leurs oeuvres contemporaines. Des artistes contemporains français seront donc sollicités pour présenter leur travail à un public nouveau et jusqu'alors inaccessible.

Certains jugeront peut-être que la participation de la France aux ambitions culturelles des Émirats Arabes Unis n'était pas une nécessité, que nos liens avec ce pays auraient pu être renforcés plus efficacement. Je rappellerai à ceux-là que nos échanges économiques et commerciaux sont déjà très développés avec les Émirats Arabes Unis, puisque nos exportations à destination de ce pays dépassent les 3 milliards d'euros. La coopération culturelle viendra très opportunément compléter et intensifier cette relation. Je voudrais également faire justice aux efforts qu'il a fallu déployer pour que la France parvienne à convaincre, face à des concurrents redoutables, de l'intérêt d'un tel projet. Au départ, les autorités émiriennes avaient choisi de prendre pour modèle les accords que passe la Fondation Guggenheim lorsque celle-ci apporte son aide à la construction d'un musée. Cette dernière participe d'ailleurs à la construction d'un musée d'art moderne sur l'île aux musées d'Abou Dabi.

La participation de tous les acteurs de la politique muséale française et les talents combinés de plusieurs négociateurs ont permis de susciter, chez nos partenaires émiriens, une ambition véritablement nouvelle. Sans l'implication de Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture à l'origine de cette initiative, le musée universel d'Abou Dabi n'aurait été qu'une simple antenne du Louvre.

Pour un projet d'une telle ampleur, la création d'une agence spécifique s'imposait comme le meilleur moyen de combiner un développement de l'activité internationale de nos musées et la protection des plus petits musées de France. A cet égard, la critique consistant à présenter l'Agence France-Museums comme l'instrument de la domination du Louvre sur les autres musées de France manque singulièrement son but. Sans l'Agence France-Museums, comment les plus petits musées de France pourront-ils renforcer leur présence hors de nos frontières ? En effet, l'Agence pourra par la suite conclure sur le plan international d'autres accords et mener d'autres projets qui seront bénéfiques non seulement aux trente-trois musées nationaux, mais aussi aux musées décentralisés, dont plus de mille bénéficient déjà de l'assistance de la direction des musées de France. Imagine-t-on un musée régional d'importance moyenne négocier avec les autorités chinoises pour associer ses collections à la création d'un musée en Chine ? Peut-on sérieusement croire que le musée français aura la logistique et les moyens de défendre ses intérêts et de faire valoir ses conditions avant la conclusion d'un accord ?

L'Agence France-Museums permet de résoudre ces difficultés. En sa qualité d'interlocuteur unique clairement identifié, elle offre aux autorités gouvernementales étrangères qui souhaiteront bénéficier d'une coopération française la garantie de notre savoir-faire. L'Agence sera dotée de moyens suffisants pour défendre tous les musées français qui souhaitent développer leur activité à l'étranger. Nous avons là une véritable « force de frappe » culturelle.

Il me semble enfin que les musées français doivent considérer l'Agence France-Museums comme leur alliée pour le développement de leurs ressources financières. Les sommes que l'Agence reçoit, et redistribue aux musées de France, pourront servir à relancer une politique d'acquisition d'oeuvres et d'enrichissement des collections.

Positive pour la culture et la langue françaises, avantageuse pour nos artistes, preuve de la qualité de notre savoir-faire comparé à celui des grandes institutions américaines, facteur d'accroissement du tourisme à destination de la France, aide et encouragement au développement international de nos musées, élément de diversification de leurs ressources, la création d'un musée universel à Abou Dabi renforce la place de la France dans le monde de la culture.

Nos musées vont trouver dans cette aventure culturelle une source nouvelle de financement qui constituera la juste contrepartie de leur participation et les incitera à plus de dynamisme. L'équilibre trouvé dans cet accord est bénéfique pour tous les acteurs français et émiriens. La commission des affaires étrangères ne s'y est pas trompée en demandant à l'unanimité son adoption. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

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