Cet amendement tend à réserver le bénéfice de la nouvelle déduction forfaitaire prévue par votre projet aux entreprises menant des politiques salariales et de l'emploi vertueuses.
Nous ne soulignerons jamais assez combien les salariés de ce pays souffrent de ne pas voir leur travail reconnu à leur juste valeur et correctement rémunéré, notamment au regard des gains de productivité que leur qualification et l'exercice de leurs compétences permettent à leurs entreprises d'engranger. Parler de croissance économique et de travail en négligeant les gains de productivité et l'intensification du travail, c'est, au mieux, être ignorant de la réalité des entreprises, au pire, mentir délibérément aux gens pour accréditer l'idée qu'on ne peut pas faire autrement que d'accroître la durée du travail effectif.
Mais passons : l'essentiel, c'est la faiblesse de la rémunération du travail, sous quelque forme que ce soit, dans notre pays. Quelques chiffres permettent d'en mesurer la réalité. Près de 40 % des foyers salariés ne paient pas l'impôt progressif sur le revenu, ce qui prive d'effet la défiscalisation des heures supplémentaires, puisque le dispositif de l'article 1er s'adresse très spécifiquement aux bas salaires. Quant à la moyenne mensuelle de rémunération, elle se situe, toutes primes comprises, aux alentours de 1 600 euros, ce qui n'est jamais que le centième de l'exonération de droits prévue dans l'article relatif aux donations. J'ajoute, pour être complet, que, entre 2003 et 2006, le salaire moyen n'a progressé que de 5,4 points, c'est-à-dire qu'il n'a fait que suivre l'inflation, dans le meilleur des cas.
Cette situation est le résultat de longues années de modération salariale, à peine corrigée par le redressement du SMIC et encouragée par toutes les politiques de déflation salariale, notamment celles liées aux choix d'allégement du coût du travail, dont l'article 1er semble être une sorte d'aboutissement. Aujourd'hui, l'enjeu économique majeur n'est pas le coût du travail. La vérité est que la France souffre des conséquences de la stagnation des salaires, de la multiplication des salariés pauvres, de la non-reconnaissance des qualifications réelles des salariés, du mépris dans lequel sont tenus les jeunes de plus en plus diplômés que nous formons chaque année, de l'émiettement du travail à grands coups de contrat précaire, de temps partiel imposé et d'horaires éclatés fixés au seul gré de l'employeur.
Notre économie produit de la richesse, et le décalage est de plus en plus marqué entre la réalité de la richesse créée et la rémunération du travail. Dans de nombreuses entreprises, la part des salaires dans les coûts de production ne cesse de diminuer, laissant une part toujours plus grande, pour un chiffre d'affaires en progression raisonnable, à la rémunération du capital.
Nous ne pouvons décemment admettre que les heures supplémentaires soient une solution dans des entreprises – et elles sont fort nombreuses – où les conditions économiques permettraient de revaloriser de manière sensible les salaires, dans l'intérêt des entreprises elles-mêmes, puisqu'une telle revalorisation ne manquerait pas d'améliorer la productivité.