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Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 25 septembre 2008 à 21h30
Revenu de solidarité active — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoland Muzeau :

Votre projet de loi proclame, certes, le droit à l'accompagnement, en particulier pour les personnes sans emploi. Mais cette louable proclamation ne suffit pas à dissiper les craintes que nous pouvons légitimement nourrir quant aux garanties d'un accompagnement social et professionnel de qualité. Il nous semblait pourtant que le RSA avait pour vocation de permettre aux bénéficiaires de sortir de la précarité.

Qu'en sera-t-il des moyens réellement affectés à une politique d'accompagnement personnalisée ? Qu'est-ce que le Gouvernement envisage, au-delà d'un nouveau transfert de charges aux collectivités locales ? Le service public de l'emploi aura-t-il les moyens d'accompagner les 300 000 à 400 000 personnes nouvelles qui vont s'inscrire sur les listes des demandeurs d'emploi ?

À toutes ces questions, votre projet de loi n'apporte aucune réponse. Seule certitude : la baisse de 14 % des crédits de la mission « Travail et emploi » annoncée par le Gouvernement dans les prévisions pour les projets de loi de finances de 2009 à 2011, ce qui augure mal du succès du dispositif.

Prétendre permettre aux plus modestes de sortir de la pauvreté sans se pencher sérieusement sur la question du financement et des transferts de charges, sans tenter une mise en cohérence des différents dispositifs existants, cela a un mot, monsieur Hirsch, cela s'appelle se payer de mots. L'assemblée des départements de France vous l'a d'ailleurs signifié de manière claire, sans que vous jugiez expédient de répondre à leurs légitimes inquiétudes. Le débat sur le financement du dispositif en offre une autre illustration.

J'en viens donc à ce feuilleton du financement, qui aura occupé longtemps le devant de la scène et occulté pour partie le débat de fond. Nous en connaissons l'épilogue : la commission des finances de l'Assemblée nationale a adopté la semaine dernière un amendement instaurant un plafonnement global des niches fiscales, dont vous revendiquez aujourd'hui la paternité, et qui prévoit que les rentrées fiscales supplémentaires concourront au financement du RSA. Le Président de la République a ajouté cet après-midi à Toulon que ce financement irait décroissant.

Nous avons dénoncé cette mesure comme dilatoire. L'évidence s'impose en effet qu'au prétexte de faire concourir les niches fiscales au financement du RSA, cette proposition va aboutir au maintien des avantages exorbitants que comportent certaines d'entre elles au bénéfice des ménages les plus riches et de certaines grandes entreprises. Que devient le nécessaire débat sur la remise à plat de ce maquis de dérogations fiscales ? Il passe à la trappe. Or les niches fiscales représentent une masse financière de quelque 73 milliards d'euros cette année, somme sur laquelle la majorité ne prévoit de prélever que 200 malheureux millions.

C'est vous qui avez, avec le Gouvernement, augmenté le nombre des niches fiscales. Une nouvelle est encore née il y a quelques heures dans le cadre de la discussion du texte sur les revenus du travail. De 416 en 2003, le nombre des niches est passé à 486 en 2006 – et à 487 ce soir –, soit une aggravation de la dépense fiscale de quelque 23 milliards d'euros. Ces dépenses somptuaires sont restées sans effet sur la croissance, sur l'emploi ou sur le pouvoir d'achat. Elles sont donc inutiles, et auraient été mieux employées dans le relèvement des minima sociaux, l'investissement dans la recherche, le financement des dispositifs de formation et d'insertion ou celui de la protection sociale.

La manoeuvre du Gouvernement et de sa majorité est assez grossière. Elle élude totalement la question de la taxation du capital ou du patrimoine des plus aisés, d'une caste de privilégiés et d'une poignée de grandes entreprises, qui, malgré vos dénégations, continueront à bénéficier des niches fiscales au prix d'un très léger sacrifice, et éviteront ainsi de participer à l'effort de solidarité nationale à hauteur de leurs facultés contributives, comme le veut pourtant la Déclaration des droits de l'homme.

Pour ce qui nous concerne, l'enjeu est d'asseoir le financement du RSA sur un authentique dispositif d'imposition du capital, comme la taxation de la distribution des stock-options. Nous avons déposé un amendement en ce sens – la majorité en a déposé un autre presque identique –, ainsi qu'un autre amendement visant à faire échapper la taxation de 1,1 %, somme toute minime, au scandaleux couperet du bouclier fiscal.

Reste que ce débat sur le financement du RSA permettra de mettre l'accent sur les limites de la volonté politique du Gouvernement de réduire effectivement la pauvreté dans notre pays.

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