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Intervention de Jean-Michel Ferrand

Réunion du 7 février 2008 à 15h00
Accord france turquie sur les investissements — Discussion d'un projet de loi adopté par le sénat

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Michel Ferrand, rapporteur de la commission des affaires étrangères :

Aujourd'hui, les deux pays s'emploient à dépasser leurs divergences et à construire une relation forte.

Cependant, la question européenne continue de les opposer. Le Président de la République est ainsi défavorable à l'adhésion turque à l'Union européenne, préférant la formule de l'association. C'est dans ce contexte qu'au mois de décembre dernier, le Conseil européen a retenu la proposition française de constituer un groupe de sages chargés de réfléchir aux frontières de l'Union européenne, Dans l'attente des conclusions du groupe de réflexion sur le futur de l'Union européenne à l'horizon 2020-2030, les négociations d'adhésion se poursuivent, en dépit des avancées timides et des lacunes persistantes qu'a soulignées la Commission dans son dernier rapport de suivi. Lors de la conférence intergouvernementale du 19 décembre dernier, deux nouveaux chapitres de négociation ont ainsi été ouverts : la santé et la protection des consommateurs ainsi que les réseaux transeuropéens de transports.

La mise en oeuvre de l'union douanière entre l'Union européenne et la Turquie depuis le 1er janvier 1996 a d'ores et déjà permis d'intensifier les relations économiques avec les États membres. Si les échanges avec la Turquie ne représentent qu'une part modeste de notre commerce extérieur, ils ont fortement progressé depuis l'entrée en vigueur de l'union douanière : en dix ans, ils ont été multipliés par cinq, atteignant 10 milliards d'euros. Les produits automobiles dominent ce commerce bilatéral.

En 2006, avec une part de marché proche de 5 %, la France était le cinquième fournisseur de la Turquie, comme vous le rappeliez, madame la secrétaire d'État.

La Turquie est le douzième client de la France, le cinquième hors Union européenne. En 2006, les ventes françaises dans ce pays se chiffraient à 5,2 milliards d'euros. Nos investissements y ont fortement progressé en l'espace de quinze ans, faisant aujourd'hui de la France le quatrième investisseur étranger en Turquie. Le nombre d'entreprises françaises qui y sont implantées est ainsi passé de 15 en 1985 à près de 250 actuellement ; elles emploient 45 000 personnes.

Afin d'intensifier des échanges prometteurs, l'environnement pour les investisseurs doit néanmoins être amélioré pour offrir des garanties juridiques aux deux parties. C'est l'objet de l'accord visant à encourager les investissements réciproques.

Dans la continuité des 91 accords précédemment ratifiés par la France, le texte signé à Ankara le 15 juin 2006 reprend les clauses qui caractérisent ce type d'accords, à l'exception de stipulations faisant l'objet d'un protocole qui lui est adjoint.

J'évoquerai brièvement les principales dispositions de cet accord.

L'article 3 pose les principes généraux d'admission et d'encouragement par une partie des investissements effectués par les investisseurs de l'autre partie : les investissements de l'autre partie bénéficient d'un traitement « juste et équitable ». Les investisseurs ne peuvent être traités moins favorablement que ceux de l'État où ils investissent, ou moins favorablement que les investisseurs de la nation la plus favorisée si le traitement réservé à ceux-ci est plus favorable. Chaque partie examine avec bienveillance les demandes d'entrée et d'autorisation de séjour, de circulation ou de travail sur son territoire de nationaux de l'autre partie, dans le cadre d'un investissement.

En vertu de l'article 4, l'État partie dans lequel l'investissement est réalisé assure la protection et la sécurité pleine et entière de celui-ci. Les mesures d'expropriation ou de nationalisation sont prohibées sauf pour cause d'utilité publique. L'expropriation éventuelle donne lieu au paiement d'une indemnité « prompte et adéquate ».

L'article 5 garantit le libre transfert des diverses formes de revenus que peut produire l'investissement, sauf circonstances exceptionnelles exigeant des mesures de sauvegarde, ces dernières étant limitées à une durée de six mois.

Le mode de règlement des conflits prévu par le présent accord dépend de la nature des différends. En cas d'échec de la phase de règlement amiable, les différends opposant un investisseur et une partie contractante sont soumis soit à la juridiction compétente dans le pays où l'investissement a été réalisé, soit à l'arbitrage du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements, tandis que les différends opposant les parties contractantes sont éventuellement soumis à un tribunal d'arbitrage.

Le protocole adjoint au présent accord rappelle que les autorités turques ont, par déclaration en date du 3 mars 1989, soustrait à la compétence de la CIRDI les différends relatifs aux droits de propriété et aux droits réels sur les biens immobiliers. Ces derniers demeurent de la compétence exclusive des tribunaux turcs. En revanche, tous les autres différends découlant des activités d'investissement direct peuvent être soumis à la CIRDI.

Alors que les échanges économiques et commerciaux ont bénéficié de la mise en place de l'union douanière entre la Turquie et 1'Union européenne, le texte signé à Ankara améliore une protection des investissements encore insuffisante. C'est la raison pour laquelle la commission des affaires étrangères est favorable à cet accord, de facture très classique, qui contribue à renforcer les liens entre la France et la Turquie et à permettre à nos deux pays de dépasser leurs divergences politiques. Suivant l'avis de la commission, je vous recommande d'adopter le présent projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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