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Intervention de François de Rugy

Réunion du 20 mai 2008 à 9h30
Conditions de l'élection des sénateurs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

Nous, les Verts, nous plaidons pour une réforme des modes de scrutin pour les élections des députés et des sénateurs. Nous pensons que toute réforme doit être uniquement fondée sur l'application de principes démocratiques. Nos assemblées doivent refléter, de façon aussi fidèle que possible, le vote des citoyens. Normalement, c'est l'expression de la volonté populaire qui doit se retrouver dans nos assemblées. C'est ce qui leur permettra, car ce n'est pas le cas aujourd'hui, d'être réellement représentatives de la France d'aujourd'hui, avec sa diversité sociologique, territoriale et politique.

Je précise aussi que nous sommes favorables à l'existence des deux chambres, l'Assemblée nationale et le Sénat, car cela a contribué à un travail législatif de qualité. M. Roman l'a rappelé dans son rapport, en parlant de l'effet modérateur du Sénat. L'histoire de notre République a montré que c'était une bonne chose. Dans le contexte actuel, depuis le début de la législature, où le Gouvernement déclare l'urgence sur la quasi-totalité des projets de loi, on voit bien que, même s'il n'est pas de notre sensibilité politique, le Sénat peut avoir son utilité.

Nous pensons toutefois que seul le suffrage universel direct est démocratique. Je songe, madame la ministre, à la remarque que vous avez faite tout à l'heure : nous le disons pour toutes les élections, y compris celles des structures intercommunales, dont nous dénonçons le mode de scrutin indirect. Des propositions de loi ont été déposées à ce sujet. C'est pourquoi nous proposons que les sénateurs soient élus au suffrage universel direct, à la proportionnelle intégrale, pour six ans, dans le cadre des régions. Faisons simple, pour que nos concitoyens y voient clair.

Pour affirmer cet ancrage régional, qui donnerait sans aucun doute au Sénat une nouvelle légitimité, nous pensons que les élections sénatoriales pourraient avoir lieu le même jour que les élections régionales, ce qui n'alourdirait donc pas le calendrier. Le fait que le rythme de ces élections ne soit pas calqué sur ceux de l'élection présidentielle et des élections législatives leur donnerait aussi leur légitimité propre et un intérêt qu'elles n'ont pas, aujourd'hui, aux yeux des Français.

Le Sénat ayant quasiment les mêmes pouvoirs que l'Assemblée nationale, il est, à nos yeux, impératif qu'il soit élu au suffrage universel direct. Sur ce point, aussi, je vous invite à lire l'excellent rapport de notre collègue Bernard Roman, qui a fait le tour des situations existant dans le monde et qui, logiquement, conclut que le meilleur système est l'élection au suffrage universel direct. Mais comme, dans l'architecture actuelle, le Sénat n'a pas le dernier mot en cas de divergence avec l'Assemblée, son élection à la proportionnelle intégrale ne poserait strictement aucun problème. Le fait qu'il ne s'y dégage pas forcément une majorité absolue, de gauche ou de droite, ne compromettrait en rien la capacité d'agir dont dispose le Gouvernement.

C'est pourquoi nous défendons cette vision qui s'inscrit, bien évidemment, dans une architecture plus globale, beaucoup plus démocratique que la Ve République actuelle. Nous plaidons en effet pour la VIe République, mais nous y reviendrons à propos du débat sur la réforme de la Constitution.

La proposition de loi de nos collègues socialistes est, évidemment, d'une portée beaucoup plus restreinte que ce que nous proposons. Sans doute – vous l'avez dit, madame la ministre –, elle est complexe. Mais c'est le système actuel, dans lequel elle s'inscrit, qui l'est. Il n'en demeure pas moins que cette proposition de loi est méritoire. C'est un premier pas – nous ne sommes pas naïfs, nous savons bien qu'il n'existe pas aujourd'hui de majorité à l'Assemblée, et sans doute encore moins au Sénat, pour conduire une réforme franchement démocratique passant par l'adoption du suffrage universel direct. Cette réforme est méritoire en ce qu'elle tente de corriger, dans le cadre du suffrage indirect, les inégalités les plus choquantes, inégalités entre territoires qui sont en fait des inégalités entre Français, et il n'est pas normal que les Français ne soient pas égaux devant le suffrage.

Dans la mesure où elle pourrait faire espérer – j'utilise à dessein le conditionnel – que le Sénat reflète un peu mieux la réalité politique de notre pays, celle qui est issue du vote des élections locales – car, à la base, il faut bien parler quand même du vote des Français –, nous voterons cette proposition de loi. Nous espérons d'ailleurs que le caractère très restreint, voire minimaliste, de cette réforme lui permettra de recueillir un soutien très large sur l'ensemble des bancs de notre assemblée, ou alors il est à craindre que le seul critère retenu pour juger cette réforme soit le nombre de sénateurs UMP auquel elle conduirait. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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