Conformément à la nouvelle procédure du « Semestre européen », que nous appliquons depuis l'an dernier, nous soumettons aujourd'hui à votre examen le nouveau Programme de stabilité de la France pour la période 2012-2016 avant qu'il ne soit transmis à la Commission européenne.
Permettez-moi tout d'abord de vous présenter les éléments de cadrage macroéconomique sur lesquels il s'appuie.
Depuis le mois d'août, nous avons eu souvent l'occasion de revenir sur les événements qui ont ébranlé la zone euro à la suite de la crise la plus violente qu'elle ait connue de toute son histoire. En quelques années seulement, l'euro s'est hissé au rang de seconde monnaie de réserve internationale et voilà qu'aujourd'hui son avenir serait remis en cause en raison des problèmes de la Grèce et des problèmes d'endettement public ?
Je n'y crois pas un seul instant. L'euro est notre patrimoine commun et constitue un facteur de stabilité et de prospérité qui sortira renforcé de cette crise car le processus de convergence des politiques économiques engagé dans la zone euro est sans précédent. De ce point de vue, la crise aura eu un effet salutaire : une prise de conscience générale en Europe et une rupture profonde avec les politiques économiques du siècle précédent, politiques qui ne s'intéressent qu'au partage des fruits de la croissance sans se soucier de ce qui la crée. Ce processus est indispensable pour réduire les disparités économiques qui existent au sein de la zone euro et pour retrouver une croissance forte et équilibrée. Il contribuera également à réduire les déséquilibres au niveau mondial, véritables causes de la crise internationale.
Pour y parvenir, l'Europe bénéficie de fondamentaux solides : elle est le premier marché du monde et constitue un pôle d'innovation abritant une centaine des 500 premières entreprises mondiales. Et il est toujours bon de le rappeler : avec 35 représentantes, la France est le pays européen qui compte le plus grand nombre d'entreprises dans ce classement, devant l'Allemagne.
Nous disposons donc d'atouts solides pour construire notre avenir, mais cela ne doit évidemment pas être un prétexte à l'immobilisme. La concurrence des pays émergents est vive et nous ne voulons en aucun cas y sacrifier nos modèles sociaux. Nous devons donc redoubler d'efforts pour préserver et accroître nos savoir-faire, notre compétitivité et nos emplois. Dans cette optique, chacun doit assumer sa part du nécessaire ajustement.
S'agissant de la France, le diagnostic est clair : il faut mettre un terme à notre addiction à la dépense publique. C'est ce que confirme ce Programme de stabilité qui s'inscrit dans la stratégie cohérente et pragmatique de réduction des déficits publics mise en oeuvre par le Gouvernement, qui, depuis le début de la crise, s'est adapté de façon transparente à l'évolution de la conjoncture – le Programme atteste d'ailleurs une nouvelle fois du réalisme et de la prudence dont il a fait preuve.
À partir de 2010, l'économie française a retrouvé un certain dynamisme, la croissance ayant atteint 0,9 % au premier trimestre de 2011. L'activité s'est ralentie à la fin de l'année dernière car nous avons traversé une période de très fortes tensions sur les marchés financiers et les dettes souveraines. Si, dans bien des secteurs, l'impact de cette nouvelle crise sur notre économie aurait pu être aussi important qu'en 2008, la France est néanmoins le seul pays, parmi les grandes nations occidentales, à avoir enregistré une croissance positive à chaque trimestre depuis le deuxième trimestre de 2009. Certains, dans les rangs de l'opposition, avaient annoncé avec assurance l'entrée de notre pays dans la récession dès le mois de décembre : ils se sont trompés. Nous avons tenu tous les engagements qui avaient été fixés dans la loi de finances de 2011 et les chiffres, là encore, témoignent que l'activité économique a mieux résisté en France qu'ailleurs en Europe.
La croissance du PIB a ainsi atteint 0,2 % au quatrième trimestre contre moins 0,3 % pour l'ensemble de la zone euro. En 2011, elle s'est élevée à 1,7 %, conformément à notre prévision du mois d'août dernier. Depuis le début de 2012, nous observons les signes d'une amélioration progressive de la conjoncture. Même si celle-ci est encore fragile, elle témoigne d'un retour progressif de la confiance des ménages et des entreprises nettement perceptible dans les enquêtes de l'Insee portant sur le mois de mars.
Ce résultat n'est pas le fruit du hasard : nous le devons à l'action du Gouvernement et à celle des chefs d'État et de gouvernement européens, qui a permis en particulier de répondre à la crise grecque au plus vite et de doter la zone euro de pare-feux efficaces.
Les deux opérations exceptionnelles de refinancement à long terme mises en place par la BCE ont également permis d'atténuer significativement les tensions sur les marchés financiers et de créer les conditions d'une reprise de la croissance.
Ces nouvelles informations, ajoutées à la bonne résistance de l'activité au quatrième trimestre, nous ont conduits au mois de mars dernier à réviser notre prévision de croissance pour 2012 à 0,7 %. Sur la base des résultats de 2011, désormais connus, l'acquis de croissance pour 2012 est d'ores et déjà de 0,3 %. En intégrant les nouvelles prévisions de l'Insee pour le premier semestre 2012, il est porté à 0,5 %. Le Gouvernement maintient donc son scénario d'une montée en puissance de l'activité tout au long de l'année, ce qui justifie la prévision de croissance révisée à 0,7 %.
En la portant à 1,75 %, nous avons également révisé notre prévision de croissance pour 2013. Cela signifie que dès l'an prochain notre économie progressera à nouveau à son rythme potentiel. Elle le dépassera ensuite légèrement pour combler l'écart de production qui s'est creusé durant la crise.
Conformément à notre stratégie, nous nous adaptons à la conjoncture pour respecter notre trajectoire de réduction des déficits publics. Le Programme est guidé par deux exigences : la prudence dans nos prévisions macroéconomiques et la détermination dans la poursuite de la consolidation budgétaire. Nous avons d'ailleurs eu l'occasion de témoigner de notre détermination en 2011 en prenant les mesures nécessaires afin de garantir le respect de notre objectif de réduction des déficits dès lors que la conjoncture l'exigeait.
Et les résultats sont au rendez-vous. Comme en 2010, malgré une conjoncture défavorable en fin d'année, nous avons dépassé l'objectif de déficit que nous nous étions initialement fixé : 6 % du PIB dans la loi de finances pour 2011, chiffre qui a été révisé à 5,7 % dans le Programme de stabilité de l'année dernière. Le déficit notifié pour 2011 s'élève finalement à 5,2 % du PIB, soit une diminution d'environ 34 milliards par rapport à 2010. Pour la première fois depuis 1960, l'ensemble des dépenses publiques – État, sécurité sociale, collectivités locales – a été stable en volume. Ce bon résultat permet de réviser à 4,4 % le déficit prévisionnel pour 2012, chiffre inférieur à celui de 4,5 % que nous avions présenté dans la loi de finances initiale.
À partir de 2013, le déficit sera ramené à 3 % puis diminué de un point de PIB chaque année pour atteindre l'équilibre des comptes en 2016. Le respect de cette trajectoire de réduction des déficits jusqu'en 2016 est garanti par un plan de 115 milliards portant sur la période 2011-2016 et fondé sur des hypothèses de croissance réalistes. Outre les mesures complémentaires décidées le 24 août pour un montant de 11 milliards et, le 7 novembre dernier, pour un peu plus de 17 milliards, le plan de 115 milliards repose sur le strict respect des normes de dépenses que nous nous sommes fixées et sur la poursuite de la suppression des niches fiscales et sociales inefficaces. Sur ces 115 milliards, 72 milliards de mesures ont été votées à l'occasion de la loi de finances de 2012 et des différentes lois de finances rectificatives de 2011 et de 2012. Cela représente 39 milliards en dépenses et 33 milliards en recettes. Le Gouvernement a ainsi documenté près des deux tiers de l'effort de consolidation auquel il s'est engagé sur la période 2011-2016.