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Intervention de Camille de Rocca Serra

Réunion du 7 mai 2008 à 15h00
Déclaration du gouvernement sur les langues régionales et débat sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCamille de Rocca Serra :

…celle d'un véritable statut reconnaissant les langues de France comme notre patrimoine commun.

Je l'affirme, nos langues régionales sont les ferments de la cohésion sociale, les liens qui resserrent l'harmonie territoriale. Cette dimension est aujourd'hui évidente. À l'occasion de son dernier déplacement en Corse – où vous étiez présente, madame la ministre –, le Président de la République n'a-t-il pas déclaré devant les élus de l'île : « Renier l'identité d'une région, c'est renier une partie de l'identité de la nation » ? Et d'ajouter : « S'il faut aller plus loin pour que la langue corse reste vivante, je suis prêt à aller plus loin. Je suis prêt à en discuter avec vous sans tabou. La seule limite, c'est que le français demeure la langue de la République. C'est la seule limite. »

Cette limite est également mienne. Parler corse ou parler quelque langue régionale que ce soit permet de se positionner dans l'ensemble national en y fusionnant son altérité régionale. C'est en ce sens que, dès 2004, j'avais cosigné l'amendement, déposé par mon collègue et ami Marc Le Fur, prévoyant que le français soit « la langue de la République dans le respect des langues régionales qui fondent sa diversité ». Parler corse, c'est aussi s'ouvrir à la construction européenne en tendant une main fraternelle à l'Italie, comme parler alsacien, basque ou catalan est un gage d'amitié envers nos voisins allemands ou espagnols.

En cette enceinte chargée d'histoire et de symboles, je veux vous dire tout haut ce que trop de Corses n'arrivent pas à faire entendre : « Si mon âme est corse, mon coeur est français. Pourquoi dès lors perdre mon identité au bénéfice d'être français ? Je suis et veux être français au bénéfice de mon identité. »

Oui, l'alchimie entre identité et altérité permet à chacun de s'identifier pleinement à la Nation, à condition que celle-ci n'entende pas nier pas ses diversités mais les fasse converger vers un sens commun.

Oui, il nous appartient de combiner nos richesses linguistiques et culturelles pour servir le dialogue et les échanges nécessaires. À la lumière de la Déclaration universelle des droits de l'homme, qui énonce que l'universalisme doit reposer sur une conception de la diversité linguistique et culturelle qui dépasse à la fois les tendances à l'homogénéisation et les tendances à l'isolement, facteur d'exclusion, il nous faut trouver la meilleure formule pour faire fructifier notre patrimoine linguistique national sans contrevenir au dogme républicain.

La Charte européenne des langues régionales et minoritaires, adoptée en 1992, a ouvert le débat et nous a posé collectivement un problème. Si elle a le mérite d'avoir été conçue comme un instrument de défense, elle nécessite une mise en adéquation juridique avec notre ordre national.

Les réserves et déclarations formulées par la France en 1999 sont légitimes, mais il convient de les dépasser, et donc de les traduire dans notre droit national. Nous avons collectivement le devoir de rendre juridiquement opérant, pertinent et effectif un texte porteur d'avenir pour notre patrimoine linguistique.

Je décèle dans cette enceinte une volonté forte, après les engagements du candidat Sarkozy, aujourd'hui Président de la République, et ceux du Premier ministre.

Trouvons ensemble la meilleure solution. Si l'obstacle est constitutionnel, est-il possible de réviser la Constitution sans en dénaturer la portée ? Si la révision constitutionnelle est un obstacle infranchissable, une formulation législative peut-elle garantir l'indispensable sécurité juridique ? S'il est enfin possible de rendre compatible la Charte en la révisant ou en l'amendant par le biais de protocoles additionnels, profitons de la présidence française de l'Union européenne pour lui donner un second souffle !

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