Il est urgent de s'en soucier car certaines langues risquent de disparaître au fil du temps. Elles sont aujourd'hui menacées, vous l'avez rappelé, madame la ministre.
La charte, qui considère que la pratique d'une langue régionale est un droit, précise également que la protection et l'encouragement des langues régionales ou minoritaires ne doivent pas se faire au détriment des langues officielles – ce point me paraît essentiel pour notre débat. C'est là, me semble-t-il, la pierre angulaire d'une position qui devrait tous nous rassembler.
Le Président de la République, alors qu'il était candidat à l'élection suprême, déclarait dans son discours de Caen, le 9 mars 2007 : « Le patrimoine linguistique de la France, ce n'est pas seulement le français : c'est aussi l'extraordinaire richesse de ses langues régionales. Je souhaite que leur enseignement soit correctement pris en charge par l'éducation nationale. Je souhaite que l'on soutienne leur pratique et leur diffusion. » Mais, précisait-il aussi, « je ne veux pas de cette logique de confrontation avec le français », élément de « l'unité française que nous avons mis si longtemps à construire et qui reste le bien le plus précieux mais aussi le plus fragile que nous ayons à léguer à nos enfants. » Cette position, je la fais mienne.
Être favorable aux langues régionales soulève nécessairement la question de la ratification de la charte du Conseil de l'Europe. Cette adoption, vous l'avez rappelé, madame la ministre, rendrait nécessaire la modification de l'article 2 de la Constitution ou, du moins, impliquerait qu'il fût complété. Il nous faut donc nous interroger sur les conséquences d'une telle modification. À titre personnel, je ne pense pas qu'il soit préférable, et du reste possible, de donner à un juge européen les moyens de se prononcer sur un élément essentiel de notre pacte républicain, lui-même élément fondateur de la nation française. Ce débat, organisé après la déclaration du Gouvernement, est le signe que nous pouvons dès aujourd'hui mettre tout en oeuvre, non seulement pour reconnaître et transmettre, mais également pour pérenniser et favoriser la connaissance et l'enseignement des langues régionales. Faisons en sorte de respecter les principes et d'atteindre les objectifs, applicables à l'ensemble des langues régionales et minoritaires, qui sont inclus dans la charte européenne.
Ces objectifs, quels sont-ils ? La reconnaissance des langues régionales en tant qu'expression de la richesse culturelle ; la nécessité d'une action résolue de promotion des langues régionales afin de les sauvegarder – vous avez cité, madame la ministre, certaines initiatives concrètes qui vont déjà dans ce sens, grâce à l'appui des collectivités territoriales – ; la promotion des études et de la recherche sur les langues régionales dans les universités ; enfin, l'enseignement et l'étude des langues régionales, qui doivent bénéficier des moyens nécessaires, question sur laquelle je souhaite m'attarder car elle est essentielle.
À l'heure actuelle, la demande d'enseignement des langues régionales n'est pas considérée comme un droit par l'administration, mais comme une possibilité accordée en fonction des enseignants disponibles. C'est une question sensible, pas seulement en Bretagne. Il faut améliorer, notamment en termes de moyens, les conventions entre l'État et certaines écoles bilingues par la prise en charge des enseignants. Permettez-moi de suggérer, en prolongement de ce débat, non pas, comme l'orateur précédent, tant le vote d'une loi que plus modestement la tenue, sous votre autorité, madame la ministre, d'une table ronde avec le ministre de l'éducation nationale et les parlementaires, en vue de fixer les objectifs et de dégager les moyens humains permettant de faciliter, à titre facultatif et non pas obligatoire, l'enseignement des langues régionales, qui ont toute leur place dans le système éducatif.