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Intervention de François Asensi

Réunion du 19 octobre 2007 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2008 — Prélèvement au titre du budget des communautés européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Asensi :

On se prend pourtant à rêver de ce que pourrait être une ambitieuse politique publique de solidarité européenne. Elle permettrait un rattrapage économique, social et environnemental aux douze derniers pays adhérents. Faut-il rappeler que ce sont les fortes dotations budgétaires de l'Europe qui ont permis à l'Espagne, au Portugal ou à l'Irlande de devenir de grands pays européens ? Pourquoi n'a-t-on pas la même volonté de solidarité pour les nouveaux entrants ?

Par exemple, une ambitieuse politique publique européenne permettrait également de mettre en oeuvre une autre politique agricole commune. La PAC, qui consomme actuellement 43 % du budget européen, n'empêche pas la désertification de nos campagnes, favorise une agriculture intensive destructrice de l'environnement et renforce l'exploitation des paysans du Sud. L'Europe ne devrait-elle pas montrer l'exemple en matière agricole, afin de promouvoir souveraineté alimentaire, préoccupation écologique et juste rémunération des pays en voie de développement ?

Ce qui se produit est le contraire d'une telle politique. À l'intérieur de ses frontières, l'Union européenne n'a donc pour seule ambition que d'installer un ultralibéralisme destructeur des solidarités et des biens publics. À l'extérieur, elle mène une politique de fermeture et de repli sur soi indigne du grand projet humaniste qu'elle doit porter.

Cette politique de l'Europe forteresse s'est tragiquement concrétisée en juin 2005 avec les cadavres des clandestins accrochés aux barbelés de Ceuta et Melilla. Mais c'est chaque jour que l'Europe forteresse produit ses tragiques effets. On décompte au moins 3 000 morts entre décembre 2003 et 2006 aux portes de l'Europe. Plus insidieusement, l'Union européenne tente d'« externaliser » le contrôle de l'immigration, en installant dans les pays d'origine ou de transit des centres de tri. Toutes ces méthodes entraînent des violations répétées des droits de l'homme, que dénoncent les ONG.

L'Europe voulue par le Président de la République poursuit des ambitions contre lesquelles la France s'est pourtant levée en 2005 en votant « non », réclamant une Europe solidaire, une Europe ouverte, une Europe de la paix, une Europe capable de résister au pôle états-unien et au pôle asiatique.

Mais le Président de la République a montré le peu de cas qu'il fait du suffrage universel. À peine élu, il remet sur les rails ce que les Français ont refusé en mai 2005. Quelles sont les ambitions de son traité simplifié, soutenu étonnamment à la fois par les tenants du « oui » et par les eurosceptiques ? Est-il plus clair, plus lisible ? Les rédacteurs ont renoncé eux-mêmes aux expressions de « mini-traité » ou de « traité simplifié », puisqu'il ne comporte, avec ses 12 protocoles et ses 25 déclarations diverses, pas moins de 256 pages, plus technocratiques les une que les autres. Ce mini-traité indique clairement que le message délivré en 2005 est nié par les dirigeants de notre pays. Alors que les Français, par leur refus, réclament une Europe de la solidarité, des droits sociaux et de la démocratie, on leur propose à nouveau une Europe libérale, antisociale et bureaucratique.

Ce déni du suffrage universel atteindrait un sommet si le Gouvernement – ou, plutôt, le Président de la République – refusait au peuple son droit au référendum. Jamais la question européenne n'avait pourtant été aussi centrale que lors du débat tenu en 2005. Il faut, monsieur le ministre, redonner la parole au peuple.

Le jour même où le sommet de Lisbonne entérine ce projet de traité simplifié et à quelques mois de la présidence française de l'Union européenne, cet article 31 du projet de loi de finances porte tout le paradoxe de la politique européenne actuelle. La participation de l'État français au budget européen sera un jour le moyen de mener une politique véritablement ambitieuse pour l'Europe. Mais tant qu'il incarnera cette Europe libérale, sans solidarité, ni démocratie, les députés communistes ne pourront que voter contre.

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