J'irai donc droit au but, monsieur le président, au risque d'être un peu caricatural.
L'Union professionnelle artisanale se félicite de cette table ronde, notamment parce qu'il lui semble important d'assurer le « service après-vente » du RSI et de l'ISU, qui ont été décidés par la représentation nationale. Il s'agit au demeurant d'une très bonne réforme, qui était attendue par les travailleurs indépendants. Le régime social spécifique de ces derniers est le fruit de l'histoire : né en 1945-1946, il s'est ensuite élaboré par strates, depuis la Caisse nationale d'assurance vieillesse des artisans (CANCAVA) et l'Organisation autonome nationale d'assurance vieillesse de l'industrie et du commerce (ORGANIC) à la fin des années 40, jusqu'à la Caisse nationale d'assurance maladie des professions indépendantes (CANAM) dans les années 60. Cependant, depuis plusieurs années, des compensations existent entre ces régimes et le régime général, de sorte que se posait la question de savoir s'il fallait maintenir les premiers, d'autant que certains chefs d'entreprise relèvent du second. À cet égard, la création du RSI allait dans le sens du maintien d'un régime spécifique.
Le système qui existait avant le RSI, on l'oublie trop souvent, n'allait pas non plus sans certaines difficultés héritées de l'histoire : un charcutier, par exemple, cotisait à la CANCAVA et un boucher à l'ORGANIC ! Or de plus en plus de bouchers se sont mis à faire de la charcuterie, se voyant ainsi obligés de passer d'une caisse à une autre. Par ailleurs, des réglementations différentes s'appliquent pour la catégorie des artisans et celle des commerçants : ces différences sont même à l'origine d'une grande partie des difficultés rencontrées par le RSI et l'ISU.
De même, l'invalidité relevait de la CANCAVA et non de l'ORGANIC, et la CANAM, de son côté, a commencé à gérer des indemnités journalières dont bénéficiaient certaines personnes qui avaient d'abord été en invalidité ! Résultat : les organismes se renvoyaient la balle et des assurés se retrouvaient dans un no man's land.
Comme les précédents orateurs l'ont dit, le RSI et l'ISU ont aussi fait apparaître que des travailleurs indépendants cotisaient pour certains risques et pas pour d'autres. En clair, la législation et la réglementation n'étaient pas correctement appliquées.
La réforme du RSI et de l'ISU ayant été mal préparée, elle ne pouvait être que mal engagée : j'espère au moins que cela servira de leçon pour le futur. Comme toute réforme, celle du RSI a suscité beaucoup de freins, de la part tant des conseils d'administration des trois caisses concernées que de leurs personnels.
Par ailleurs, l'UPA ne conteste pas la révision générale des politiques publiques : les cotisations doivent financer les prestations et non le fonctionnement des organismes. Reste que l'État, dès les premières conventions d'objectifs et de gestion, a décidé de réduire les effectifs, estimant que la création du RSI et de l'ISU générerait des économies. Ce fut une erreur majeure : lorsque l'on construit une maison – en l'occurrence, ce serait plutôt un immeuble –, il faut des artisans présents sur le chantier.
De plus, pour l'ensemble des caisses de sécurité sociale, l'outil principal est l'informatique ; or – rigueur oblige – l'État a freiné des quatre fers contre son évolution, alors que chacun savait qu'il n'était pas adapté à la réforme. Il a fallu fusionner trois fichiers ! Dans ces conditions, le fait qu'il n'y ait eu que 10 % d'erreurs tient du miracle.
Comme je l'ai indiqué, des réglementations différentes s'appliquent dans chaque catégorie professionnelle, celle des « artisans » et celle des « commerçants ». En principe, ce sont les centres de formalités des entreprises qui indiquent aux personnes la catégorie dont elles relèvent ; mais l'information qu'ils délivrent n'est pas toujours exacte. Résultat : le RSI doit refaire le travail. Ces dysfonctionnements devraient offrir matière à réflexion.
Le 12 septembre 2011, M. Xavier Bertrand a enfin accepté d'octroyer des moyens temporaires pour un plan d'action commun au RSI et aux URSSAF, et nous nous en félicitons. Cela dit, il faut éviter de changer sans cesse les règles du jeu. Si, par exemple, le régime de l'auto-entrepreneur, dont vous savez ce que nous en pensons à l'UPA, n'a fait qu'aggraver les difficultés, c'est que les modalités de calcul retenues diffèrent de celles des autres travailleurs indépendants. La proposition de loi de M. Jean-Luc Warsmann, quant à elle, prévoit une nouvelle répartition des rôles entre le RSI et les URSSAF ; mais la priorité est de régler les problèmes auxquels sont confrontés les travailleurs indépendants. Il sera toujours temps, ensuite, de modifier les règles du jeu – y compris sur la gouvernance du RSI – dans le cadre d'une concertation.