La refondation implique qu'on maintienne à l'État la compétence de l'hébergement et de l'accès au logement des plus démunis, qui demeurera ainsi la seule compétence d'aide sociale dont les conseils généraux ne sont pas responsables. Nous pensons qu'il ne convient effectivement pas, à ce stade, de la décentraliser. Sur quoi en effet fonder la compétence d'une collectivité territoriale plutôt que d'une autre pour la prise en charge d'une personne sans domicile ? Comment contrôler le respect, par cent conseils généraux différents, des principes d'inconditionnalité et d'équité dans la prise en charge des personnes sans domicile ?
Pour autant, la coopération de l'État avec les collectivités territoriales est indispensable pour assurer le succès de la refondation. Les compétences qu'exercent les secondes en matière de logement, d'urbanisme, d'aide sociale et de minima sociaux les rendent incontournables, mais nous préconisons de resserrer et de mieux organiser cette collaboration, grâce à l'élaboration d'une stratégie partagée entre l'État et l'Assemblée des départements de France.
Plus précisément, notre attention a été souvent attirée sur le fait qu'un nombre non négligeable – mais non quantifiable – de personnes ayant recours à l'hébergement d'urgence avaient été prises en charge durant leur minorité par un conseil général, au titre de l'aide sociale à l'enfance (ASE). Il n'est pas rare que les travailleurs sociaux aient à s'occuper de l'hébergement de ces personnes en ignorant tout du travail social antérieur réalisé par le département. À l'inverse, les services des conseils généraux ne procèdent pas au suivi des jeunes relevant de l'aide sociale à l'enfance une fois que ceux-ci ont atteint leur majorité. Une connexion entre les dispositifs serait utile. Il nous semble regrettable qu'un travail social important effectué pendant l'enfance puisse être « perdu » sous prétexte que l'autorité publique compétente change au moment de la majorité de la personne concernée.