Monsieur le directeur général, votre responsabilité est importante, et il est bon que, pour l'assumer, vous n'ayez pas hésité à mécontenter les experts. La loi relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé a certes permis à la France d'être à l'avant-garde en matière de sécurité sanitaire, mais, après l'affaire du Mediator, nous n'avions guère le choix. Reste à mener un travail d'harmonisation à l'échelon européen.
Actuellement, la déclaration d'intérêts est publique, mais doit-on laisser sa réactualisation à l'initiative de l'intéressé ? S'il se montre négligent, qui vérifiera qu'elle est toujours d'actualité ? Je salue la création d'une charte de l'expertise sanitaire, mais je crains que, comme celles de la visite médicale ou des industries agro-alimentaires, elle ne soit pas opposable et ait donc peu d'effets. En outre, n'est-il pas inquiétant que ce texte, dont les contours seront définis par un décret en Conseil d'État, ait à prévoir « les modalités de gestion d'éventuels conflits et les cas exceptionnels dans lesquels il peut être tenu compte des travaux réalisés par des experts présentant un conflit d'intérêts » ?
L'article 5 de la loi précise que, pour obtenir l'autorisation de mise sur le marché, il faut effectuer des essais contre les stratégies thérapeutiques existantes « sous forme d'essais contre comparateurs actifs et contre placebo. » Mais cette disposition est suivie d'une phrase qui semble l'annuler : « Si la personne produisant ou exploitant un médicament s'oppose aux essais contre comparateurs actifs, elle doit le justifier. » Je compte sur votre vigilance pour contrôler cette justification.
L'article 7 indique, qu'en raison du « caractère de confidentialité industrielle ou commerciale ou relevant du secret médical », on peut refuser de rendre public le compte rendu des débats des commissions, comités ou instances collégiales d'expertise. N'est-ce pas une entrave à la transparence ? Imposé par les laboratoires, l'accord de protection des données entre l'Union européenne et l'Inde crée un précédent fâcheux.
Parmi les raisons de retirer un médicament, l'article 11 mentionne le fait qu'il soit « nocif » – dans ce cas, pourquoi est-il en vente ? – ou qu'il ne permette pas « d'obtenir de résultats thérapeutiques » – ne pouvait-on l'évaluer avant sa mise sur le marché ? La traduction littérale des textes européens est parfois bien ridicule.
Vous devez faire oeuvre de pédagogie envers nos concitoyens, qui ont cru pendant des années au risque zéro. On sait pourtant qu'un médicament actif a nécessairement des effets négatifs. Il était d'autant plus maladroit de la part du Gouvernement de jeter en pâture à l'opinion une liste de 77 médicaments placés sous surveillance. Nous l'avons souligné, Gérard Bapt et moi-même : pour des médicaments récemment mis sur le marché, c'est l'absence de surveillance qui serait dangereuse.
Estimez-vous que les financements dont vous disposez vous permettront de mener des missions d'études cliniques sur les effets d'un médicament, si un industriel refuse de se soumettre à certaines obligations ?