Pourquoi ne prend-on pas mieux en compte toutes les ambiguïtés de la réalité afghane ? Le terme « taliban » lui-même recouvre une réalité diverse. Du temps de la présence soviétique, il y avait plusieurs groupes de résistance, en général fondés sur une base ethnique. La France était alors fortement engagée derrière le Jamiat-e-Islami du président Burhanuddin Rabbani et du commandant Massoud. Mais la principale force de résistance, soutenue par les États-Unis et qui ne passait pas pour faire partie des modérés, était alors le Hezb-e-Islami. Or, aujourd'hui, l'essentiel des membres de ce mouvement et son principal leader, Gulbuddin Hekmatyar, sont du côté des talibans. Il y a ensuite toute l'ambiguïté du Pakistan, liée à des raisons géopolitiques. Il y a enfin l'ambiguïté du gouvernement du président Karzaï lui-même, qui dialogue – ou que l'on fait dialoguer – avec ceux qu'on appelle les talibans. Pourquoi ne réévalue-t-on pas plus sérieusement la situation au vu de toutes ces données ?
S'il existait en 2001 un consensus fort entre Jacques Chirac et Lionel Jospin sur l'intervention en Afghanistan, onze ans ont passé. Onze ans, c'est trois ans de plus que la guerre d'Algérie ! Lorsqu'il existe une détermination, on ne laisse pas les situations s'enliser.