Vous dépassez le lien de proportionnalité que la CNIL a toujours essayé de mettre en avant depuis trente ans. On ne crée pas un fichier énorme pour une infraction faiblement répandue. Vous établissez un rapport excessif entre cinquante millions et 200 000, chiffre que je veux bien admettre. C'est pourquoi le Sénat a refusé le lien fort dans sa rédaction de l'article 5 adoptée par 340 voix contre cinq, puis votée par la majorité de la CMP. Vous avez cependant rétabli l'article 5 dans sa rédaction initiale.
Comme je l'indiquais il y a trois semaines, l'attention du groupe socialiste a été alertée en particulier par l'alinéa 10 de l'article 5 qui, dans le système que vous voulez instaurer, étend à trop de délits la possibilité pour l'autorité policière de consulter ce fichier biométrique. Est-il utile de consulter un fichier biométrique comportant des renseignements intimes sur plusieurs dizaines de millions de personnes pour des délits mineurs tels que le franchissement illicite d'un portillon dans le métro ou le déplacement sans titre de transport ? C'est en effet ce que cela signifie. Je veux bien croire que, pour certains, sauter le portillon dans le métro doit être puni d'une peine très lourde. Mais faut-il pour autant recourir à un fichier biométrique ? Nous craignons une telle dérive. Il est encore temps de revenir à la raison, de ne pas faire en France ce qui n'existe dans aucun pays démocratique d'Europe et de mettre à l'abri nos concitoyens d'aujourd'hui et de demain de ce monde « orwellien » – permettez-moi cette expression – de fichage généralisé.
Je vous invite, en conséquence, à voter la motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)