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Intervention de Patrice Pattée

Réunion du 25 janvier 2012 à 18h00
Commission d'enquête relative aux modalités, au financement et à l'impact sur l'environnement du projet de rénovation du réseau express régional d'Île-de-france

Patrice Pattée, maire adjoint de Sceaux :

Le RER est-il un système ou un service ? Je crains qu'aujourd'hui, il ne soit d'abord un système.

Ce système a été le moteur du développement de l'agglomération de l'Île-de-France. Le développement de ma ville au xixe siècle est dû à l'arrivée de la ligne de Sceaux – désormais ligne B –, qui a permis aux Parisiens de profiter de la verdure de sa colline. Marne-la-Vallée, Cergy ou La Défense n'existeraient pas sans le RER. Ce système a permis aux Franciliens de trouver un logement, quitte à ce que celui-ci ne soit pas à proximité immédiate de leur lieu de travail, ce qui les oblige à « avaler des kilomètres ».

Mais aujourd'hui, pour reprendre un article du quotidien Le Monde du 11 novembre dernier, ce système est au bord de l'implosion. Qui doit-on incriminer ? Bien sûr, d'abord l'évolution de la charge du réseau. L'étalement de la région parisienne a effectivement abouti à charger le réseau au-delà de sa capacité nominale. Non seulement il est plus que saturé aux heures de pointe, mais celles-ci s'étalent dans le temps jusqu'à couvrir presque toute la journée.

Est aussi en cause l'obsolescence du matériel et de l'infrastructure. Il faut bien constater aujourd'hui que l'infrastructure a fait l'objet d'une maintenance et d'un entretien insuffisants.

Les témoignages indiquent également que l'exploitant privilégie la performance du système – ainsi, le dispositif des bonus et des malus amène, pour éviter des pénalités, à ce que des trains ne s'arrêtent pas dans certaines gares –, aux dépens de la qualité du service et des voyageurs.

À ces causes s'ajoute un problème de gouvernance. Il vaut aussi bien pour la ligne B que pour la ligne A. Cette gouvernance ne s'est pas adaptée à une situation qui s'est complexifiée.

Le schéma directeur de la ligne B n'a pas encore été élaboré. Seul un dossier d'émergence nous a été présenté, le 16 novembre dernier. Il prévoit de très nombreuses études pour mettre la ligne à niveau. Mais l'usager n'a pas besoin de chiffres pour mesurer au quotidien la dégradation du service. Ses sentiments, ce sont la colère, l'exaspération, mais aussi la lassitude : comme le titrait Le Monde, les Franciliens sont un peu « prisonniers du RER »

Cette tendance à baisser les bras a cependant trouvé ses limites avec la crise de l'amiante sur la ligne B, à l'automne dernier, qui a entraîné une dégradation du service pendant des mois, assortie d'une communication totalement défaillante. Le blog ouvert par Le Monde pour suivre le fonctionnement de huit villes de France pendant l'année précédant l'élection présidentielle couvre notamment la ville de Sceaux. Mme Pascale Kremer a consacré sa chronique du 22 octobre au RER B ; s'en sont ensuivis 164 commentaires, puis 63 sur le blog du 23 octobre, 95 sur celui du 8 novembre, 81 sur celui du 9 et enfin 65 sur celui du 17. Bref, fatigués, les voyageurs prennent la parole pour dénoncer les conditions dans lesquelles ils voyagent tous les jours. Pourtant, le RER est une belle mécanique… lorsqu'il fonctionne !

Aujourd'hui, le fil conducteur de l'action doit être de remettre au coeur du dispositif un voyageur qui a été un peu oublié – et cela me semble valoir aussi pour le Grand Paris Express. Ce qui ressort des témoignages, c'est l'incertitude du passager quant à l'heure à laquelle il va arriver à destination ! Paradoxe à peine imaginable aujourd'hui : alors que l'automobiliste peut savoir par la radio, le matin, l'état des « bouchons » autoroutiers d'Île-de-France, il n'est possible au voyageur de connaître l'état du fonctionnement du réseau RER qu'au moment où il constate le retard avec lequel sa rame entre en gare.

Le travail de rattrapage à faire paraît considérable : il y faudra du temps. La RATP, je le lui ai dit, devrait à tout le moins mieux communiquer avec ses usagers sur les retards, notamment grâce à son site Internet ; il n'en est rien aujourd'hui.

Nous sommes, de fait, un peu prisonniers du RER. À Sceaux, la seule solution alternative est de prendre les autobus. Mais leur capacité est sans comparaison avec celle du RER, si le réseau RER est en panne, ils ne peuvent pas absorber la masse de voyageurs qui voudraient se reporter sur ce moyen de transport. Les usagers éprouvent de ce fait un sentiment de colère face à un système qui ne fonctionne plus, et qui ne les informe même pas un minimum des difficultés rencontrées.

J'ai créé sur Facebook une page destinée à collecter des témoignages. Ils vont tous dans le même sens : ils dénoncent un système qui ne se préoccupe en aucun cas du voyageur.

La ligne B, même si elle n'est pas aussi chargée que la ligne A, relie Saint-Rémy-lès-Chevreuse à Roissy, elle souffre aussi d'une difficulté de gouvernance, du fait de la présence de plusieurs opérateurs : RATP, SNCF, sans oublier Réseau ferré de France (RFF). Même sans aller jusqu'à instaurer un opérateur unique, il faudrait au moins que cette ligne soit dotée d'un centre de commandement unique, qui serait situé à Denfert-Rochereau. Or, aujourd'hui, ce centre de commandement est resté à l'état de projet. En cas de crise, il faut contacter par téléphone les correspondants de la RATP, de la SNCF et de RFF. Une telle situation nuit bien sûr à la réactivité de l'opérateur – au sens générique du terme.

La ligne B présente une autre difficulté, liée à ce que les techniciens appellent les « points de retournement ». Ainsi, en cas d'incident empêchant la circulation sur la partie nord de la ligne, un point de retournement, situé à la station Laplace, est activé ; mais les voyageurs se retrouvent alors bloqués dans cette station sans pouvoir emprunter un autre réseau de transport en commun. Une solution serait l'aménagement d'un point de retournement à Denfert-Rochereau ; il permettrait aux usagers de la branche sud du RER B de prendre le tramway à la station Cité universitaire ou d'emprunter le métro à la station Denfert-Rochereau. Aucune décision n'a été prise aujourd'hui en ce sens.

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