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Intervention de Christian Mahieux

Réunion du 12 avril 2011 à 16h45
Commission d'enquête sur la situation de l'industrie ferroviaire française: production de matériels roulants voyageurs et frets

Christian Mahieux, membre du secrétariat national de l'Union syndicale Solidaires, SUD Rail :

Aux yeux de la fédération SUD Rail de l'Union Solidaires Transport et de l'Union Solidaires Industrie, la situation de l'industrie française ne peut pas être appréciée indépendamment du cadre global des transports ferroviaires. Je pense en particulier aux choix politiques réalisés en matière de droit au transport collectif pour tous et toutes, et à la priorité donnée au mode de transport le plus utile pour la société, notamment sur les plans écologique et social.

Il va de soi que le sort de la filière est directement lié au développement des transports ferroviaires. Sans entrer dans un débat qui ne constitue pas le thème principal de cette commission d'enquête, je crois utile de rappeler les points suivants :

En premier lieu, la politique des transports mise en oeuvre depuis des décennies favorise, non pas le rail, mais la route. Le choix a ainsi été fait de privilégier le mode de transport où l'exploitation des salariés est la plus importante, et où les marges bénéficiaires sont les plus fortes, au détriment de l'intérêt collectif.

En deuxième lieu, la situation du fret ferroviaire est aujourd'hui alarmante. Au fil des « plans fret » successifs, la SNCF n'a pas cessé de réduire le trafic de marchandises : en 2011, le nombre de tonnes kilomètres transportées par Fret SNCF est revenu au niveau qui était celui de l'ensemble des compagnies de chemins de fer françaises en 1911 !

En troisième lieu, les entreprises publiques que sont la SNCF et la RATP ont un rôle essentiel à jouer pour le développement de l'industrie ferroviaire. Dans cette perspective, il convient de leur octroyer un véritable rôle de service public, et donc d'en finir avec la conception de leurs équipes dirigeantes, qui les transforment en entreprises censées conquérir le monde, quitte à abandonner des zones entières de notre territoire, et à ne pas répondre aux besoins des populations locales.

Enfin, le système ferroviaire français est aujourd'hui dans un état très inquiétant. Cela a des conséquences sur la régularité des transports et fragilise considérablement leur niveau de sécurité. Il est en conséquence urgent de recréer un service public ferroviaire intégré, en mettant un terme à l'éclatement qui a résulté de la constitution de RFF et des multiples organismes inventés pour accompagner la privatisation.

Si l'on considère les bénéfices, le chiffre d'affaires et les dividendes versés aux actionnaires des deux groupes qui représentent 70 % du secteur, Alstom et Bombardier, l'industrie ferroviaire se porte bien en France. Toutefois, la situation est beaucoup moins réjouissante pour les salariés de ces deux entreprises, ainsi que pour les PME et PMI de la filière, et plus généralement pour toutes les entreprises sous-traitantes. La réalité quotidienne de leurs salariés est faite de conditions de travail difficiles, de salaires souvent peu élevés, et de la menace permanente du chômage.

Des entreprises telles qu'Alstom et Bombardier, mais aussi la SNCF et la RATP, ont une responsabilité directe dans la délocalisation de certaines activités liées à la construction ferroviaire dans des pays où l'exploitation des salariés est plus grande qu'en France – la Pologne, la Roumanie, l'Inde, ou encore la Chine. Afin de mettre un terme à cette situation, les commandes publiques passées par la SNCF, la RATP et les régions doivent comporter des clauses sociales. Ces entités publiques doivent exiger que l'argent public investi dans la commande de nouveaux matériels ferroviaires ne serve plus à alimenter le chômage.

Le niveau des commandes de matériel de traction et de transport ferroviaire étant intrinsèquement lié au trafic, la responsabilité de la SNCF et de l'État, son actionnaire unique, est directement engagée. L'industrie ferroviaire subit aujourd'hui les conséquences de la politique menée en matière de fret, laquelle consiste à fermer les triages et à abandonner le trafic de wagons isolés. Il en résulte des conséquences presque automatiques pour nombre d'équipementiers.

Le secteur de la construction et de la maintenance des voies ferrées est, lui aussi, directement lié aux choix budgétaires, donc à des décisions politiques. Si j'insiste sur ce point, c'est qu'il ne faut pas oublier que l'industrie ferroviaire ne concerne pas que le matériel roulant, et que la recherche du moindre coût en matière salariale conduit à des situations dangereuses pour la sécurité des travailleurs et des travailleuses directement concernés ainsi que, bien évidemment, pour les usagers du rail.

À terme, l'Union syndicale Solidaires est favorable à l'instauration d'un pôle public comprenant le secteur ferroviaire dans son ensemble, à savoir le transport et la gestion de l'infrastructure, qui seraient réunis dans une seule entreprise publique, les multiples activités confiées à la sous-traitance pour réaliser des économies au détriment des salariés dans les domaines du nettoyage, de la restauration ou encore du gardiennage, et plus généralement l'industrie ferroviaire. Ce serait la solution la plus réaliste pour améliorer l'efficacité du système dans son ensemble, pour offrir le meilleur service au public et pour garantir un cadre social harmonisé et de haut niveau aux salariés.

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