Certaines questions s'adressent à la représentation nationale elle-même …
Pour répondre à Pierre-Alain Muet, tous les chefs d'entreprise, tant allemands que français, avec lesquels nous avons échangé nous ont dit que les différences entre l'Allemagne et la France concernaient moins la fiscalité que le rapport à l'entreprise. En Allemagne, les habitudes de dialogue social sont incontestablement plus grandes. Le blocage que nous observons au Grand Port maritime de Marseille est le résultat de l'absence d'un dialogue social structuré et positif. Bien sûr, il existe aussi quelques différences en matière de fiscalité ; le crédit impôt recherche, par exemple, a suscité beaucoup de questions et d'intérêt de la part des Allemands.
À l'appui de l'observation que le patrimoine et l'ISF ne sont sans doute pas le sujet le plus important sur le plan économique, je rappellerai quelques chiffres.
En valeur nette des passifs, le patrimoine en France représente un total de 9 200 milliards d'euros, et les seuls actifs financiers représentent 3 800 milliards d'euros. L'augmentation des actifs a été plus forte en France qu'en Allemagne ; or dans un cas, il existe un ISF et dans l'autre, il n'existe plus.
J'entends ce qu'ont dit Pierre Méhaignerie et Gilles Carrez sur la transmission des entreprises : notre rapport fait apparaître des différences dans la fiscalité qui, en effet, peuvent expliquer notamment le fait qu'en Allemagne, les entreprises moyennes restent allemandes.
À Jérôme Chartier, je répondrai que beaucoup de prélèvements qui sont hors du champ des cotisations sociales pèsent sur le coût du travail en France, à la différence de l'Allemagne. En indiquant qu'ils représentent 58 milliards d'euros, nous soulignons leur poids. Si en même temps qu'on allège les cotisations sociales, on renforce d'autres prélèvements, le problème demeure. On rejoint la question de la constance dans la politique fiscale menée, vrai sujet pour notre pays. Il me semble nécessaire de réfléchir aux proportions dans lesquelles on veut faire peser l'effort respectivement sur la consommation, sur le travail et sur le patrimoine.
Je confirme que pour les Allemands, le rendement et la compétitivité sont deux objectifs essentiels de la politique fiscale. L'augmentation de la TVA a répondu à un objectif de rendement – afin de réduire le déficit structurel, les Allemands se préoccupant beaucoup plus que nous de l'équilibre de leurs finances publiques –, mais également à un objectif de réduction du coût du travail, cette augmentation ayant permis de réduire les cotisations. Le même raisonnement a prévalu pour la réforme de l'impôt sur les sociétés : les taux ont été sensiblement réduits, mais les assiettes ont été élargies. D'ailleurs, en ajoutant à l'impôt sur les sociétés l'ensemble des prélèvements qui s'en approchent, on constate peu de différences entre nos deux pays.
Je ne reviens pas sur les différences d'approches des fiscalités nationales et locales. En Allemagne, les différences peuvent être fortes entre les Länder en matière de « taxe commerciale », mais il existe une péréquation beaucoup plus poussée qu'en France. L'État fédéral assure un pilotage efficace des finances publiques, tant vis-à-vis des Länder qu'en matière de protection sociale – pour laquelle on veille à l'équilibre des comptes.
S'agissant de la Cour de Karlsruhe, on peut observer une certaine constance dans l'idée qu'un impôt ne doit pas être confiscatoire, ainsi que dans le souci d'égalité – qui a provoqué la suspension de l'ISF, dont les bases ont été considérées comme trop anciennes et donc injustes. En France, les bases du foncier bâti sont elles aussi anciennes et injustes : si le Conseil constitutionnel était saisi, peut-être formulerait-il certaines observations. Je rappelle que les taxes foncières représentent chez nous 33 milliards d'euros.
Pour répondre à la question d'Aurélie Filippetti sur les handicaps structurels de l'industrie française, il faudrait un peu de temps. Nous apportons quelques explications dans le rapport.
Concernant la politique familiale, les deux pays recourent en effet à des moyens différents – fiscal et budgétaire en Allemagne, fiscal et social en France. On constate une différence d'effort global en matière de prestations en nature : pour la garde des jeunes enfants, la France a l'avantage. Le ciblage des aides est également différent : La France aide davantage les familles de trois enfants et plus ; et compte tenu du quotient familial, même plafonné, qui n'existe pas en Allemagne, elle soutient plus que notre voisin les familles dont les revenus sont les plus élevés. L'Allemagne, elle, aide un peu plus les familles d'un et deux enfants.
Michel Bouvard a évoqué la fiscalité des entreprises. Est-elle homogène par tranche d'entreprises, ou y a-t-il des différences selon les catégories – celles qui relèvent de l'impôt sur le revenu et celles qui relèvent de l'impôt sur les sociétés ? Nous n'avons pas constaté d'effet économique particulier.
Charles de Courson a surtout formulé des observations à destination de ses collègues. Quant à la Cour des comptes, sa façon de dire n'empêche pas, je pense, de comprendre ses messages.
S'agissant des transmissions d'entreprise, je confirme que le régime est beaucoup plus favorable en Allemagne qu'en France mais les conditions à remplir sont très strictes.
Enfin, le prix de l'électricité devrait en effet constituer en France un facteur favorable mais il est à considérer parmi d'autres facteurs, moins favorables, qui peuvent expliquer le résultat global.