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Intervention de Jean-Bernard Bayard

Réunion du 13 avril 2011 à 16h00
Mission d'information sur la compétitivité de l'économie française et le financement de la protection sociale

Jean-Bernard Bayard, secrétaire général adjoint de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, FNSEA :

Je vous remercie de nous donner l'occasion de nous exprimer sur la compétitivité de notre économie et le financement de la protection sociale.

Si la France reste à la tête des pays européens pour les volumes de productions agricoles, elle a été dépassée par l'Allemagne et les Pays-Bas pour ce qui est de l'agro-alimentaire.

La compétitivité d'un pays dépend de plusieurs éléments et, en premier lieu, de l'innovation. À cet égard, notre pays est confronté à des distorsions de concurrence. Ainsi, dans le domaine des biotechnologies par exemple, alors qu'un certain nombre de variétés d'organismes génétiquement modifiés (OGM) sont autorisées dans le reste de l'Europe, la France maintient son interdiction. Les productions OGM couvrent 80 000 hectares en Espagne pendant que nous ne produisons pas un seul produit de cette nature, tout en continuant naturellement à les consommer. De même, pour ce qui est des produits « bio », les normes ne sont pas identiques dans tous les pays de l'Union européenne. Par ailleurs, en dépit du tarif proposé pour le rachat de l'électricité, notre pays ne compte que 50 unités de méthanisation contre 5 000 unités en Allemagne. J'ajoute que, grâce au recours à la cogénération, les tomates de Belgique bénéficient d'un avantage de 70 centimes par kilo.

S'agissant des installations classées, on note une certaine évolution. Toutefois, si dans notre pays il faut parfois attendre deux à trois ans avant qu'un dossier soit accepté, ce délai n'existe pas dans les pays voisins. Nous avons progressé s'agissant du seuil des élevages laitiers, mais nos productions porcines et avicoles souffrent d'un différentiel important par rapport à celles des pays voisins.

Nos productions sont par ailleurs pénalisées par l'interdiction d'utiliser un certain nombre de produits phytosanitaires qui sont tolérés dans les pays voisins. D'où le risque de disparition de diverses productions.

Quant à la remise en cause de la détaxation des produits énergétiques servant à l'agriculture, elle mettrait le secteur agricole dans une situation extrêmement difficile.

Nous souhaitons par ailleurs la pérennisation du dispositif de remboursement partiel de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIC), qui est adopté chaque année dans la loi de finances.

J'en viens au coût du travail. En 2010, le salaire minimum de croissance (SMIC) en France s'élevait à 1 343 euros bruts mensuels – avec une part de 22 % de cotisations sociales payées par l'employeur. Or, à la même époque, il n'était que de 633 euros en Espagne – le fait que de nombreux étrangers travaillent en Espagne dans le secteur agricole sans le moindre contrôle contribue à y faire baisser encore le coût du travail. Aux Pays-Bas, les agriculteurs qui embauchent des jeunes sont exonérés de cotisations sociales ; or les jeunes représentent un quart de la main-d'oeuvre permanente. En Allemagne, les employeurs agricoles ne sont pas contraints à se conformer aux minima conventionnels et leurs cotisations patronales représentent environ 20 % du salaire brut. En outre, depuis les accords germano-polonais de 1990, les exploitations allemandes bénéficient d'une réglementation spécifique qui leur permet de recourir à une main-d'oeuvre à bas coût originaire des pays de l'Europe de l'Est – les Polonais représentent aujourd'hui 30 % de la main-d'oeuvre agricole en Allemagne.

De telles distorsions emportent un certain nombre de conséquences. Ainsi, en dix ans, la production d'asperges a baissé de 43 % en France pendant qu'elle augmentait de 64 % en Allemagne. Dans le même temps, la production de fraises a diminué de 31 % en France mais progressé de 65 % en Allemagne…

Il faut sortir de cette situation et prendre des mesures concrètes pour abaisser le coût du travail. La FNSEA est prête à participer à tout débat qui pourrait s'engager autour de ces questions. Nous n'avons nullement l'intention de remettre en cause les avantages acquis en matière de protection sociale, mais le coût du travail doit être revu. En tout cas, la compétitivité de l'agriculture française nécessite de prendre des mesures d'urgence. Pour que l'activité agricole ne soit plus pénalisée, il faut asseoir les cotisations sociales non plus sur les revenus du travail mais sur la consommation : de la sorte, les produits importés supporteraient le même coût social que les produits français.

La réponse à nos problèmes est en partie européenne. L'Europe doit renouer avec sa mission initiale de coopération et de convergence entre les États membres, et éviter que n'ait lieu en son sein une compétition stérile favorisant le dumping social et fiscal.

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