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Intervention de Philippe Coste

Réunion du 2 juin 2010 à 17h00
Commission d'enquête sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe a

Philippe Coste, ancien directeur départemental des affaires sanitaires et sociales :

La direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS) de Paris est une DDASS très exposée, qui connaît souvent des situations tendues, qu'il s'agisse de l'afflux de familles de réfugiés, de problèmes d'évacuation d'immeubles détruits par un incendie ou d'autres crises sanitaires, comme la légionellose ou le saturnisme. Dans le cas de la pandémie de grippe A(H1N1), le défi était cependant encore plus important à relever.

Du point de vue de notre organisation, le plan variole s'est avéré d'emblée inopérant. Il a donc fallu inventer un nouveau dispositif pour assurer une vaccination de masse dans le cadre d'exigences de sécurité sanitaire fortes : celui-ci a exigé une logistique lourde.

Cette mobilisation a commencé dès la première hospitalisation, le 28 avril 2009. La première réunion spécifique sur la grippe a eu lieu le 20 mai, pour la mise en oeuvre du plan blanc élargi. Cette réunion a été suivie de réunions successives avec le secrétaire général de la ville de Paris, avec la question de la mise en place, d'une part, de centres de coordination sanitaire et sociale dans chaque arrondissement pour répondre aux besoins de la population et, d'autre part, de centres de vaccination dédiés. C'est à ce moment-là qu'ont été évoquées l'utilisation possible de gymnases et la mobilisation des médecins de ville et des médecins de dispensaires et de centres de santé pour assurer la vaccination.

Ces réunions se sont poursuivies au mois de juillet, tant avec le comité départemental de l'aide médicale urgente, le CODAMU, qu'avec les caisses primaires d'assurance maladie, l'ordre des médecins ou l'Assistance publique – Hôpitaux de Paris.

Une première circulaire sur l'organisation des centres est intervenue le 21 août ; elle a d'ailleurs été modifiée le 23 octobre. Le 2 septembre, j'ai été désigné responsable de l'équipe opérationnelle départementale : nous avons poursuivi les réunions auprès du préfet de police, avec les différents acteurs jusqu'à l'organisation du test national qui a eu lieu dans le gymnase Renoir le 15 septembre 2009. Lors de cet exercice, ont été identifiés les principaux besoins, tant informatiques que logistiques : il est ainsi apparu nécessaire de nommer un responsable du centre de vaccination et de disposer d'un logisticien pour organiser le fonctionnement du centre, notamment pour la gestion des files d'attente.

Le 10 octobre, un plan départemental prévoyant l'ouverture de vingt-deux centres de vaccination a été transmis, plan qui a été revu le 15 octobre, pour tenir compte de l'ouverture de centres pédiatriques, ce qui a paru plus adapté en termes de productivité à Paris.

Nous avons ensuite été confrontés à la réalité de la mise en oeuvre de ce plan départemental, au lancement de la vaccination proprement dite.

Les problèmes que nous avons alors rencontrés ont été essentiellement liés à la gestion des ressources humaines. En effet, il est tout d'abord apparu que nous ne disposions pas d'un logiciel adapté pour organiser les plannings et les horaires. Nous avons ensuite eu des difficultés à mobiliser les fonctionnaires des autres administrations, certains personnels ayant fait part de leurs doutes sur l'intérêt de l'opération. S'agissant des internes et des élèves infirmiers, les personnels qui les encadrent se sont montrés parfois peu coopératifs : je rappelle que les infirmières ont notamment manifesté devant le siège de l'Assistance publique – Hôpitaux de Paris et que certains élèves infirmiers craignaient que leur mobilisation ne nuise à leur scolarité.

L'absence de visibilité a également constitué un problème, notamment sur les moyens financiers, puisque nous ne disposions d'aucune enveloppe dédiée pour financer l'opération.

Enfin, le dernier problème a été constitué par l'afflux dans les centres de vaccination : d'abord vides, ils se sont trouvés dès la troisième semaine confrontés à une affluence plus massive, au moment même où nous avions des difficultés à mobiliser les professionnels pour assurer la vaccination et où nous étions donc naturellement tentés de réduire le rythme des vacations. Pour faire face à un certain absentéisme, nous avons donc fait appel à des groupes plus volontaires, en particulier à des médecins généralistes retraités qui s'étaient dits prêts à être mobilisés.

Cette campagne de vaccination a été néanmoins, au-delà de son effet direct, l'occasion de tirer des leçons utiles pour l'avenir : nul doute que si une expérience de ce type devait être renouvelée, les instructions nationales seraient données plus rapidement, puisque l'on pourrait s'appuyer sur ce qui a déjà été fait. Des difficultés qui ont été rencontrées ne le seraient plus à l'avenir : par exemple, pour la mobilisation des médecins du travail, les gestionnaires, installés à Paris, ont fait parvenir des listes sur lesquelles figuraient de nombreux médecins exerçant en banlieue parisienne, et qui auraient donc été plus utiles s'ils avaient été mobilisés dans les départements limitrophes de Paris. En tout état de cause, le retour d'expérience est toujours utile et profitable.

Un constat qui a été dressé est celui d'un inégal accès de fait à la vaccination et d'une forte corrélation entre le gradient social et l'appétence pour la vaccination : c'est un point sur lequel il faudra continuer de travailler.

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