En tant qu'organisme d'appui, d'information et de relais, la Fédération hospitalière de France recevait non seulement des informations de la direction générale de la santé et des services du ministère, mais également du terrain et des hôpitaux, en particulier de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris. J'ai ainsi l'impression que l'on a déclenché une énorme machine de guerre face à une épidémie pressentie comme redoutable, au motif que l'on pensait que la médecine générale allait être submergée de malades, que les hôpitaux, en particulier les services de réanimation recevraient un afflux de cas graves et qu'il convenait donc de vacciner de manière décentralisée, avec les collectivités territoriales comme support. On s'est par la suite aperçu que la situation était bien moins grave. De la sorte, le processus s'est déroulé par phases successives et de façon évolutive.
Première des vaccinations organisées, la vaccination à l'hôpital n'a pas été à la hauteur de ce qu'on aurait pu souhaiter en temps de pandémie : seulement 37 % des personnels hospitaliers ont été vaccinés, un peu plus chez les médecins que parmi le personnel infirmier. Il est vrai que les avis médicaux à son sujet étaient contradictoires et tranchés : certains affirmaient que ce n'était pas la peine de se faire vacciner tandis que d'autres incitaient l'ensemble des services à le faire pour des raisons à la fois médicales et médico-légales.
Une première ouverture a eu lieu à la demande des proches des personnels hospitaliers vaccinés. Comme ils ne recevaient pas leur bon de vaccination alors que la maladie était annoncée comme grave et que des doses de vaccin étaient disponibles à l'hôpital puisque tout le monde ne se faisait pas vacciner, ils ont réclamé une vaccination, et le corps médical a fini par accéder à leur demande. Le même phénomène s'est produit dans les centres de vaccination en ville. Au début, on n'acceptait que les gens qui avaient reçu leur bon, selon le niveau de risque établi par le plan – enfants, femmes enceintes, personnes à risque – puis, comme les gens faisaient la queue – tout au moins au début –, on les a admis en consultation et on les a vaccinés. L'élargissement s'est fait au fur et à mesure, avec un petit décalage parfois entre les instructions données et les prises de décision sur le terrain, qui relevaient du bon sens.
Je ne décrirai pas en détail l'organisation des hôpitaux publics. Vous la connaissez : elle avait pour but d'assurer la continuité de l'activité et comportait un plan blanc, des exercices programmés et des simulations de déprogrammation. Les hôpitaux étaient prêts car il avait été annoncé, bien en amont, l'arrivée d'une grippe très contagieuse, qui devait toucher 30 % de la population et tuer massivement, notamment les enfants et les femmes enceintes. Si les jeunes et les femmes enceintes ont hélas payé un certain tribut à cette grippe, leur nombre n'a heureusement pas été aussi important qu'il avait été craint.